28 mai 2012

Mali : le chef d’Aqmi appelle à imposer la charia « graduellement » dans le nord (SYNTHESE) - maliweb.net

Mali : le chef d’Aqmi appelle à imposer la charia « graduellement » dans le nord (SYNTHESE) - maliweb.net

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Abdelmalek Droukdel, alias Abou Moussab Abdelwadoud
NIAMEY- Le chef d’Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), Abdelmalek Droukdel, alias Abou Moussaab Abdelouadoud, donne une série de conseils à ses combattants qui contrôlent le nord du Mali pour y réussir la création d’un Etat islamique, les appelant à imposer « graduellement » la charia.
Dans un enregistrement sonore de 12 minutes diffusé sur le site internet « Sahara Media », Abdelmalek Droukdel félicite ses combattants pour la victoire « historique » remportée dans le nord du Mali, qu’Aqmi contrôle depuis fin mars.
Pour réussir à créer un Etat islamique, il les exhorte à ne pas faire preuve de « vanité » et à appliquer la charia (loi islamique) « graduellement ».
« L’imposition de la charia ne doit pas seulement être limitée à la juste punition des gens, c’est beaucoup plus large que cela », dit-il, soulignant que « c’est une erreur d’imposer toutes les règles de l’islam d’un seul coup ».
Il conseille à ses « frères », d’apporter la sécurité aux populations des villes contrôlées, notamment Tombouctou, Gao et Kidal et de leur fournir les services essentiels que sont la santé, la nourriture, l’eau, l’électricité, le gaz et le carburant.
A l’égard de la rébellion touareg du Mouvement national de libération de l’Azawad (MNLA), il préconise d’éviter « les provocations » et invite Aqmi à coopérer pour établir des « règles communes » et rejeter les conflits.
Concernant le Mouvement islamiste Ansar Dine (défenseurs de l’islam, en arabe), prépondérant dans la région, il conseille à ses militants de le laisser appliquer le projet d’imposition de la charia dans la région de l’Azawad, le nord du Mali, et de s’occuper de leurs propres activités de jihad (guerre sainte) global sur la terre du Maghreb islamique.
Le MNLA et Ansar Dine ont conclu un accord pour créer dans le nord du Mali la République de l’Azawad fondée sur la loi islamique que rejette catégoriquement le gouvernement de Bamako.
Aqmi entre dissidences internes et mécontentement populaire
Cette position plutôt modérée du chef d’Aqmi découle du constat des groupes terroristes opérant dans le nord Mali, de la prise de conscience réelle des populations de cette zone, privées de leurs libertés depuis bientôt trois mois.
Après les dissidences internes au sein des différents groupes terroristes sévissant au Nord Mali, en raison de désaccords sur le partage des « butins de guerre » et des « postes stratégiques », Aqmi doit faire face à la fronde des populations locales.
Les groupes terroristes sont confrontés à une nouvelle forme de résistance avec les manifestations spontanées des 14 et 15 mai à Gao et dans certaines régions limitrophes pour dénoncer la présence des groupes sur le territoire malien avec son lot d’effets dévastateurs que sont notamment les prises d’otages, le crime organisé, la contrebande et le trafic d’armes et de drogues.
Lors de ces manifestation de colère et de ras-le-bol, au moins six personnes ont été blessées, dont une par balle, à Gao.
Des centaines d’habitants ont protesté notamment contre l’interdiction faite à des jeunes par les groupes armés, de jouer au football ou de regarder la télévision.
Le mécontentement populaire conforte la thèse selon laquelle « le citoyen de la sous-région n’adhère pas au terrorisme par conviction mais par peur et/ou nécessité financière ».
D’où l’urgence de mettre en place un plan d’action socio-économique pour la prise en charge des populations exposées directement au discours terroriste.
En janvier, des experts en sécurité, des journalistes et des acteurs de la société civile ont sillonné des régions classées zones d’évolutions de l’Aqmi au Mali.
Un consensus a été dégagé sur la nécessité de fusionner les efforts de lutte contre le terrorisme et d’associer les populations aux actions menées pour affaiblir graduellement les groupes terroristes, en les privant de toute forme de soutien.

Publié le 2012-05-28 17:06:03 | French. News. Cn

Seneweb News : Mali : les rebelles touaregs proclament un État islamiste

Seneweb News : Mali : les rebelles touaregs proclament un État islamiste
Par Tanguy Berthemet | Le Figaro |  Lundi 28 mai, 2012 03:04  |
Seneweb NewsLetter
source: Le Figaro
Les deux mouvements de la rébellion du nord du pays ont annoncé leur fusion.

C'est une union qui ressemble à un mariage de raison. Dimanche les deux principaux groupes rebelles touaregs, le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) et Ansar Dine ont annoncé dans un bref communiqué leur fusion.

La dissolution des rébellions et la création du Conseil transitoire de l'État islamique de l'Azawad ne sont pas une surprise. Depuis plusieurs semaines, les états-majors des deux branches de la guérilla touareg menaient des négociations à Gao pour mettre fin à leur division et éviter un affrontement fratricide. «Pour le MNLA comme pour Ansar Dine, un rapprochement était en ce moment dans leur intérêt», analyse Robert Dulas, spécialiste des questions touaregs.

Pourtant, les différends étaient réels entre un MNLA, laïc et indépendantiste, et Ansar Dine, islamiste, allié à al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi), avec la volonté d'imposer la charia à tout le Mali. Dans le protocole d'accord révélé dimanche, chacun a fait des concessions, sous la pression des dignitaires touaregs. «Nous sommes pour l'indépendance de l'Azawad», assure ainsi le texte qui précise que «le Coran et la sunna» seront «la source du droit» de l'«État islamique».

La composition du Conseil transitoire était en discussion dimanche. À sa tête devrait se trouver sept membres, dont le secrétaire général de l'ex-MNLA et son dirigeant militaire le colonel Mohammed ag Najim, le chef d'Ansar Dine, Iyad ag Ghaly, ainsi que des représentants des autres communautés du nord du Mali, comme les Songhaïs et les Arabes. L'annonce de la fusion a été accueillie par des tirs de joie à Gao comme à Tombouctou, chacun faisant mine d'ignorer le flou laissé dans l'accord sur bien des points, comme l'absence de choix d'un leader ou les liens du futur État avec Aqmi.

Un allié: l'Aqmi
Proches l'un de l'autre, Ag Najim et ag Ghaly se présentent comme les rivaux à la direction de l'Azawad. Mohammed ag Najim, ancien colonel de l'armée libyenne revenu au pays avec ses troupes en juillet, est l'homme des conquêtes. C'est sous sa direction que le MNLA a mené au printemps une offensive éclair et conquis le nord du Mali et ses villes, Kidal, Gao et Tombouctou. Mais ses troupes ont été immédiatement ou presque évincées de ces cités par ag Ghaly et les combattants d'Ansar Dine.

Cette prise de pouvoir, ce fils d'une grande famille, héros charismatique de la rébellion touareg des années 1990, la doit à son allié, Aqmi. Les salafistes lui ont apporté hommes et finances. À plusieurs reprises, Iyad ag Ghaly, qui s'est radicalisé lors de son séjour comme diplomate en Arabie saoudite, s'est affiché avec les chefs d'Aqmi, notamment l'Algérien Abou Zeid, qui détient une dizaine d'otages occidentaux dont six Français. La proximité avec Aqmi a cependant des inconvénients. À Tombouctou comme à Gao, les populations, habituées à un islam plus modéré, se sont agacées du puritanisme rigide prôné par les nouveaux maîtres. En réponse, Ansar Dine tente depuis de modérer ses éléments les plus fanatiques. Rien ne dit pour autant qu'il ait l'intention de s'éloigner de son «ami», certes encombrant, mais riche et puissant. En se rapprochant du MNLA, Iyad ag Ghaly semble avant tout tenté de restaurer son image écornée sans trop déranger ses alliés, les anciens comme les nouveaux.

De son côté, le MNLA ne pouvait pas non plus imposer ses vues. «Se battre était inenvisageable. Les caisses sont vides au point qu'il est impossible de nourrir les hommes, qui, en conséquence, quittent le mouvement pour celui d'Iyad plus riche», souligne une source. Les promesses de financements discrets du MNLA, notamment par le Qatar, n'ont finalement pas résisté, notamment aux changements politiques en France.

À Bamako, le gouvernement a «rejeté catégoriquement» la création d'un État islamiste dans le nord du Mali. Djibrill Bassolé, le médiateur de Communauté économique des États d'Afrique de l'Ouest (Cédéao), s'est voulu plus pragmatique. «La médiation salue toute dynamique allant vers la cohésion entre les différents mouvements armés, l'essentiel étant que ce groupe prenne l'option d'une solution négociée au conflit», a-t-il souligné, tout en rappelant son hostilité à la partition du Mali.

L'Algérie, la puissance militaire régionale, a pour sa part suggéré un dialogue avec les rebelles. La France et l'Union européenne, qui redoutent la création d'un «Aqmiland» dans le nord du Mali et une déstabilisation de la région, sont restées mesurées. «Cela peut être une possibilité d'avancer vers une solution politique et de voir les Touaregs mettre à l'écart Aqmi, veut croire un diplomate. De toute façon, nous n'avons pas d'autres choix car l'armée malienne n'existe plus et personne semble en mesure de la remplacer.»

27 mai 2012

MALI : Les « fadenw sago » face au tribunal de l’Histoire | Les Echos

MALI : Les « fadenw sago » face au tribunal de l’Histoire | Les Echos
Les griots et autres maîtres de la parole nous ont toujours appris que les Maliens sont les descendants des grands hommes qui ont voué leur combat à la libération et au progrès de leur peuple. Des hommes et des femmes qui avaient fait de ce pays une nation estimée, respectée et crainte parce que braves, courageux et téméraires à la limite, honnêtes, intègres et loyaux. Mais, par lâcheté, par complexe, par cupidité et surtout à cause de la mégalomanie nous avons progressivement sacrifié ces valeurs, dilapidé cet héritage pour nous retrouver aujourd’hui dans un pays qui a perdu son âme et qui sombre progressivement dans le chaos !
« Nous voulons être les dignes héritiers de nos ancêtres, les artisans d’un Mali resplendissant de prospérité intérieure et de rayonnement international… En donnant le nom Mali à notre jeune République, nous avons devant l’histoire fait le serment de réhabiliter les valeurs morales qui ont fait la grandeur de l’Afrique » ! C’est ce que disait Modibo Kéita, au lendemain de l’indépendance du Mali.
Le camarade Modibo Daba Kéita est un grand patriote dont nous avons commémoré la disparition (35eanniversaire) le 16 mai dernier. « Vingt années de lutte faites de sacrifices de tous ordres, vingt ans de lutte farouche pour sauvegarder notre dignité et notre indépendance que nous ne devons jamais dissocier de la dignité et de l’indépendance réelle de toute l’Afrique », avait ajouté ce grand panafricaniste.
Naturellement et légitimement, Modibo Kéita et toute sa génération pouvaient se réclamer du Ghana, du Mandé, de Ségou, du Songhoy, du Kénédougou… parce qu’ils cultivaient ces valeurs qui ont fait la fierté de ces peuples à travers de puissants royaumes et de mythiques empires. Ils en avaient les qualités et le prestige. De nombreux témoignages sur par exemple le très regretté Modibo Kéita le prouvent.
« … Le directeur du cours des moniteurs de Sikasso a réussi à avoir une autorité quasi absolue, un ascendant personnel incontestable sur les anciens tirailleurs, sur une partie des fonctionnaires et sur une portion importante de la population. Modibo Kéita emploie cet ascendant à désagréger les chefferies indigènes et à combattre par tous les moyens l’autorité de l’administration française… Continuellement, il provoque ou exploite des incidents pour diminuer l’autorité de notre administration », s’inquiétait ainsi le gouverneur français Louveau dans une correspondance adressée à sa hiérarchie.
Jamais, le destin du pays n’a autant coïncidé avec celui d’un homme. « C’est son charisme naturel qui a eu pour effet de faciliter son identification avec le parti, le peuple et la nation. Indéniablement, Modibo Kéita incarnait l’âme du Mali. Son prestige immense, son autorité incontestable, découlaient principalement de sa conduite irréprochable et de sa croyance profonde, inébranlable dans le destin du Mali. Une nation qui s’identifiait à Modibo Kéita parce qu’il était l’incarnation réelle de la personnalité malienne, de la dignité nationale de ce peuple orgueilleux de son histoire », témoigne Cheick Oumar Diarra, un grand témoin de l’indépendance du Mali.
Qu’avons-nous fait de l’héritage de cet homme exceptionnel, de ce grand patriote ? Nous l’avons dilapidé pour devenir la risée du monde ! Des fadenw sago ! Hélas ! Homme de dialogue, Modibo Kéita le fut. Il était capable de s’élever très haut pour défendre les intérêts de son pays, rien que les intérêts du Mali. Il prenait toujours de la hauteur pour se mettre au-dessus des calculs et des intérêts partisans chaque fois que la nation était menacée dans on honneur, dans sa dignité, dans son existence.
Grâce à ses qualités de leader et son engament patriotique, il nous a laissé en héritage un Mali réconcilié avec son histoire et sa riche culture. Il a redonné au peuple malien sa dignité et son honneur longtemps bafoués par des décennies de colonisation. Des valeurs et des acquis ébranlés par 23 ans de dictature, écrasés par deux décennies de pratique démocratique et aujourd’hui dans un coma profond suite au coup d’Etat du 22 mars 2012 et scission du pays qui en a suivi.
L’héritage patriotique dilapidé
Nous risquons de ne retrouver tous bientôt devant le tribunal de l’Histoire. Motifs ? Lâcheté et surtout trahison ! Oui nous avons trahi l’esprit de nos références historiques (empereurs et résistants, pères de l’indépendance) et les valeurs qu’ils nous ont légués ! Et cela sur l’autel de nos intérêts particuliers. Que sommes-nous aujourd’hui pour ceux qui ont fait la réputation du Mali du Nord au sud, d’Est en ouest ? Des poltrons qui tremblent face aux envahisseurs.
C’est notre frousse qui fait aujourd’hui que le pays s’enfonce chaque jour plus dans le chaos. C’est notre peur qui fait que nous sommes aujourd’hui tous focalisés sur l’après-intérim et non sur la libération des régions du Nord-Mali. Hélas, nous ne sommes pas sortis de l’auberge car, par peur de l’autre, personne ne veut de compromis dans ce pays meurtri par ses supposés serviteurs.
Personne ! Ni les militaires, ni le FDR, ni les opportunistes qui forment l’aile politique de la junte qui nous ont entraînés dans ce chaos à quelques semaines de l’alternance politique. Ceux qui ne pouvaient pas venir au pouvoir par les urnes supportent les militaires et leur proposition d’improbable conférence.
Ceux qui croyaient avoir gagné Koulouba dans les isoloirs rejettent les militaires et leur proposition de Convention nationale, l’ultime pièce de putschistes pour se maintenir, car conscients qu’une telle rencontre n’aboutira jamais à un consensus. Sans compter qu’on peut organiser une Convention, mais elle ne sera pas nationale sans les 2/3 du territoire occupés par des bandits armés, des terroristes déguisés en islamistes.
Entre-temps la population oubliée souffre et se meurt à Gao, Kidal et Tombouctou sous la tyrannie d’Aqmi, d’Ançar Dine, du Mujao et du MNLA ! Et nous nous restons sur notre position d’observateurs indifférents ! Qui est fou pour se mouiller et se condamner aux geôles du capitaine Amadou Haya Sanogo ? Et pourtant, il y a peu, nous aimions nous revendiquer de la descendance de Soundiata, de Tiramakan, de Fakoly, de Kélé Bourama, d’El hadj Omar, de Samory, de Tiéba et Babemba, des Askia, de Modibo Kéita, Fily Dabo Sissoko, Mamadou Konaté, Modibo Kéita, Lumumba, Kwame Nkrumah, Nelson Mandela Thomas Sankara… Visiblement, c’est plus facile à revendiquer qu’à assumer !
Tièfarinw bana Malila ! Le Mali ne vit plus à l’ère des braves hommes fiers et orgueilleux ! Notre orgueil et notre fierté, c’est faire le gros dos devant les belles femmes ou face aux caméras ; c’est nous enrichir aux dépens du contribuable ! Cela ne surprend pas parce que nous sommes dans le pays où la médiocratie l’a toujours emporté sur l’excellence ces dernières décennies, où la partialité domine l’objectivité, où les pauvres et aujourd’hui les populations du Nord ne figurent en bonne place que dans les discours démagogiques !
Qui doivent changer ça ? Les jeunes bien sûr ! Comment ? Qu’ils cessent de perdre leur énergie dans le soutien à tel capitaine, colonel ou à tel leader politique pour se battre pour le Mali, et pour le Mali seul ! Qu’ils cessent d’ouvrir la bouche pour attendre les fruits murs tombés d’un arbre déjà déraciné pour se mettre réellement au travail ! Nul ne détient le destin de son semblable !
Nous nous sommes autoproclamés génération consciente ! Consciente de quoi ? Pas de la réalité de notre devoir à l’égard de notre patrie ! Pas de la nécessité d’être le boulanger de notre propre vie ! Pas de l’insouciance et de l’irresponsabilité. Refusons le destin qu’on veut imposer à notre patrie ! La jeunesse consciente est celle qui a affronté les islamistes et les bandits armés du MNLA presque les mains nues en début de semaine.
Dépités par les exactions qu’on leur imposait, révoltés par les privations de toutes sortes, ils ont pris conscience qu’ils ne devaient compter que sur eux-mêmes pour se libérer. Ils ont pris conscience que le courage et la volonté constituent leurs premières armes quand ont vit l’oppression. Comme ces braves jeunes de la Cité des Askia, battons-nous pour le Mali de nos rêves, ce Mali que nous voulons léguer à la génération éclairée.
Osez lutter, c’est oser affronter la réalité en face quel que soit le prix à payer ! Nous ne sortirons jamais de ce chaos si nous ne surmontons pas nos peurs, si nous ne nous acceptons pas dans nos différences, si nous ne renonçons pas à toutes les autres considérations pour mettre le Mali et son intégrité territoriale au-dessus de tout.
Dan Fodio

SITUATION AU MALI : Cri de cœur d’un écrivain | Les Echos

SITUATION AU MALI : Cri de cœur d’un écrivain | Les Echos
 Si nous prônons l’oubli de soi au profit du Mali, ne soyons pas chagrins et revanchards. Oublions notre propre personne et nos problèmes personnels pour sauver le Mali.
Le Mali est à un tournant extrêmement délicat de son histoire. Et  pourtant, l’ensemble des Maliens prônent l’oubli de soi au profit du Mali.
A mon humble avis, le récent accord entre le CNERDE et la Cédéao peut être une réelle porte de sortie pour le Mali, quoi qu’on dise. Je reconnais que les patriotes et les nationalistes radicaux sont dans leur bon droit. Ils ont incontestablement l’amour de ce pays auquel ils n’oseraient pas souhaiter la misère.
A mon humble avis, dans ce monde globalisé, un nationalisme trop radical serait contre productif, voire suicidaire. Quel patriote peut être fier d’une prise de position radicale qui aura pour conséquence d’accroître les souffrances d’un peuple déjà éprouvé et extenué ? A ceux qui nous exigent de réunir toutes les garanties de transparence et d’assainissement avant de démarrer, je pose la question suivante : à quand remettent-ils la libération du Nord ?
En signant l’accord de sortie avec la Cédéao, si le capitaine Sanogo et le CNRDRE sont sincères, il faut qu’ils s’assument avec courage et fermeté, dans la sérénité. Qu’ils ne perdent pas de vue les intérêts supérieurs du pays qu’ils ont choisi de préserver. J’invite tous les bords politiques à faire preuve de patriotisme et d’abnégation.
Faisons en sorte que les graves faits qui menacent la sortie de crise soient considérés comme un incident de parcours à dépasser et non à récupérer. Si nous prônons l’oubli de soi au profit du Mali, ne soyons pas chagrins et revanchards. Oublions notre propre personne et nos problèmes personnels pour sauver le Mali.
J’invite le Premier ministre et son gouvernement à ne pas céder au découragement. Ils ont le Mali sur leurs épaules. Dans notre hymne national  il est mentionné « la voie est dure, très dure, qui mène au bonheur commun ; courage et dévouement ; vigilance à tout moment ». Chers compatriotes, sauvons le Mali à tout prix. L’ennemi nous regarde et jubile.
Je prie la Cédéao et la communauté internationale d’aider sincèrement le Mali à résoudre sa crise et à recouvrer son intégrité. Il n’est pas nécessaire d’envoyer des troupes à Bamako pour venir nous compliquer la vie. Il faut surtout mettre l’armée malienne dans les  conditions et l’appuyer au nord pour la reconquête. Ne perdons pas le temps à dialoguer. Un bandit armé est un malfrat qui ne cède pas à de simples exhortations. Surtout que grâce à un concours de circonstances, il se trouve en position de force.
A moins que l’humanité ne souhaite un retour à la jungle, il faut rappeler les bandits armés à l’ordre et la justice et les contraindre à abandonner leurs positions, sans préalable. Le Mali est un et indivisible.
Je termine en exhortant nos compatriotes à calmer les passions, pour ne pas plonger notre pays dans le précipice au nom d’intérêts personnels.
Ensemble, soutenons notre gouvernement pour aller aux élections. Je suis sûr que ce gouvernement prendra en compte les inquiétudes des uns et des autres en vue d’élections transparentes et crédibles. Faisons preuve de retenue. Faisons confiance au gouvernement de transition.
Soutenons l’accord de sortie de crise obtenu qui est le raccourci le plus bénéfique  pour sauver le Mali.
Drissa Doumbia
(écrivain domicilié à Yirimadio

Le Figaro - International : Nord-Mali : la rébellion crée un État islamique

Le Figaro - International : Nord-Mali : la rébellion crée un État islamique

  • Des rebelles islamistes d'Ansar Dine à Tombouctou, le 24 avril. Crédits photo: ROMARIC OLLO HIEN/ AFP PHOTO
    Des rebelles islamistes d'Ansar Dine à Tombouctou, le 24 avril. Crédits photo: ROMARIC OLLO HIEN/ AFP PHOTO Crédits photo : ROMARIC OLLO HIEN/AFP
    L'un veut faire du nord du Mali un État touareg et laïc, l'autre imposer la charria à tout le pays. Pourtant, samedi, les Touaregs du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) ont fusionné avec le groupe islamiste Ansar Dine et proclamé la création de «l'État islamique de l'Azawad».
    «Nous sommes tous pour l'indépendance de l'Azawad», «nous acceptons tous l'islam comme religion», le Coran et la Sunna (paroles et actions du prophète Mahomet rapportées par la tradition) sont «la source du droit», indique le protocole d'accord officialisant cette fusion.

    Les islamistes ont pris le dessus sur les Touaregs

    Depuis le coup d'État militaire du 22 mars qui avait chassé du pouvoir le président Amadou Toumani Touré, les Touaregs du MNLA, Ansar Dine et des milices islamistes liées à Al-Qaida au Maghreb islamique (Aqmi) se sont emparés de plusieurs villes du nord du pays. À mesure que la rébellion progressait, les islamistes ont pris le pas sur les Touaregs laïcs, et ont imposé la charria dans les villes conquises.
    Amnesty International rapporte déjà les premières conséquences de cette politique sur le terrain: «À Gao, tous les bars ont été détruits. À Tombouctou, des membres d'Ansar Dine ont arrêté des personnes accusées de vols et de pillages (qui pourraient) subir des châtiments basés sur la charia». À Kidal, «Ansar Dine a demandé aux femmes de porter le voile et a détruit un night-club», affirme l'ONG.

    Bamako impuissant

    Le gouvernement malien rejette la création de cet État islamique. Ce nouvel accord et l'incertitude autour de la place d'Aqmi dans «l'Azawad» les fragilisent encore un peu plus. Les autorités maliennes de transition ne cessent de proclamer leur volonté de restaurer l'intégrité territoriale du Mali, dont le Nord s'est déclaré unilatéralement indépendant le 6 avril dernier. Mais elles semblent impuissantes, d'autant qu'elles ont peiné jusque-là à s'imposer à Bamako même face à l'ex-junte du capitaine Amadou Haya Sanogo, qui avait renversé le 22 mars le président Amadou Toumani Touré.
    Conjuguée à la crise alimentaire qui sévit au Nord du Mali, la situation chaotique de la région faisait déjà craindre en avril dernier à Amnesty International «un désastre humanitaire majeur». «Toute la nourriture et les médicaments stockés par les grandes agences humanitaires ont été pillés et la plupart des travailleurs humanitaires ont fui (…). Les populations font face à un risque imminent de graves pénuries alimentaire et médicale qui pourraient entraîner de nouvelles pertes humaines».
    LIRE AUSSI:
    »En plus de la crise politique, le Mali doit faire face à la famine
    » Tombouctou, ville ouverte aux djihadistes
    » Mali: le casse-tête d'une intervention extérieure 

26 mai 2012

Fumer le calumet de la paix

Sidwaya

Fumer le calumet de la paix

- Le Quotidien

Editorial

Fumer le calumet de la paix

24 mai 2012, par Webmaster
"Les guerres prenant naissance dans l’esprit des hommes, c’est dans l’esprit des hommes que doivent être élevées les défenses de la paix". Cette phrase pleine de sens est extraite du préambule de l’Acte constitutif de l’UNESCO. A lire entre les lignes, l’on s’aperçoit que cette citation qui est le leitmotiv des clubs UNESCO, vaut son pesant de sagesse. Ces clubs UNESCO au moment de leur rayonnement étaient très présents et très actifs dans nos collèges, lycées et universités et véhiculaient des messages de paix, de solidarité, de cohésion, de développement personnel. Véritables écoles de la vie, la disparition de ces clubs UNESCO aurait-il un rapport avec la recrudescence de la violence constatée aujourd’hui en milieu scolaire et universitaire ?
En tous les cas, se référant à l’extrait du préambule de l’Acte constitutif de l’Organisation des Nations unies pour l’éducation, la science et la culture, on peut se permettre certaines affirmations. En effet, la paix, ce n’est pas quelque chose qui vient de l’extérieur. La paix vient de l’intérieur. Elle prend naissance en nous-mêmes. La paix dans la cité n’est pas l’affaire d’un individu ou un groupe d’individus. Pour que la paix soit durable et générale, il est du devoir de chacun de nous, de faire croître et prospérer la paix en lui. "Ce n’est qu’en trouvant la paix en soi, que l’on peut vivre en paix avec les autres", enseigne le Dalaï Lama (Prix Nobel de la paix 1989). Une leçon de vie pour illustrer cette conception des choses : "J’aimerai savoir comment est le paradis et comment est l’enfer", dit un jour un jeune ange au gardien des cieux. Séance tenante, il fut conduit vers deux portes. Le gardien ouvrit la première porte et permit ainsi à l’ange de regarder à l’intérieur. Au milieu de la pièce, une immense table ronde. Au milieu de la table, une grosse marmite contenant un ragoût à l’arôme délicieux... Le jeune ange saliva d’envie. Les personnes assises autour de la table étaient toutes maigres et livides. Elles étaient toutes affamées. Elles tenaient des cuillères aux très longs manches, attachées à leurs bras. Toutes pouvaient atteindre la marmite de ragoût et remplir une cuillerée. Mais comme le manche de la cuillère était long que leur bras, elles ne pouvaient ramener les cuillères à leur bouche.
Le jeune ange frisonna à la vue de leur misère et de leurs souffrances. "Alors c’est ça l’enfer ?" demanda-t-il. Le gardien des cieux, sans répondre, se dirigea vers la seconde porte. Il l’ouvrit. Surprise ! La scène était presque identique à la précédente : la grande table ronde, la marmite de délicieux ragoût, les cuillères aux longs manches attachées aux bras..
Mais à la différence de la première scène, ici les personnes autour de la table ne sont pas faméliques. Les gens étaient bien nourris, replets, souriants et se parlaient en riant.
Et le jeune ange de s’exclamer : "Je ne comprends pas !". "Et bien, c’est simple", dit le gardien des cieux. "C’est juste une question d’habilité. Ils ont appris à se nourrir les uns les autres, tandis que les gloutons et les égoïstes ne pensent qu’à eux-mêmes". On ne construit pas la paix dans l’égoïsme.
"Quand les toiles des araignées se réunissent, elles peuvent lier un lion" , dit un proverbe éthiopien.
Dans sa quête de paix durable, le gouvernement du Burkina Faso a entrepris une tournée pour aller à la rencontre des forces vives des différentes localités et échanger avec elles sur les préoccupations du moment.
Bien que cette initiative ait été organisée dans un bon esprit à savoir communiquer, dialoguer avec les citoyens, il reste que les équipes gouvernementales n’ont pas reçu le même accueil partout. Car, il existe encore au Burkina des gens qui pensent que les mauvais ce sont les autres. Du coup, le bénéfice de la bonne foi ou de la bonne intention n’existe plus.
" Dis-moi qui tu es et je te dirai qui tu n’es pas ou qui tu ne peux être", semble être la consigne. En tous les cas, celui qui est déterminé à construire ne doit pas s’arrêter dès le premier obstacle. Le tout, c’est de toujours œuvrer à aller vers l’objectif visé ou le but à atteindre. Et garder toujours à l’esprit la philosophie de Jean Jaurès selon laquelle, il ne faut jamais séparer la République des idées de justice sociale sans laquelle elle n’est qu’un mot. La recherche de la paix est une œuvre de longue haleine, c’est un choix de vie. Au commencement, l’arbre n’est qu’une graine.
Rabankhi Abou-Bâkr ZIDA
rabankhi@yahoo.fr

Chronique du vendredi : Le Mali ou la Somalie, le choix est là. - maliweb.net

Chronique du vendredi : Le Mali ou la Somalie, le choix est là. - maliweb.net
e Mali dépasse toutes les prévisions en ce moment et Dieu sait ce que lui réservent les jours prochains.  Pourtant, le chaos-mère est venu du Nord, précipité par la victoire militaire de la rébellion. Pour être exact, il faut dire la victoire des jihadistes d’Aqmi ou de Mujao dot Ansardine n’a été que les lunettes fumées et le Mnla une filière de blanchiment. Pour partie, l’explication de la malédiction nationale se trouve dans l’indifférence nationale à l’égard du chaos d’un Nord sanctuarisé par le crime organisé depuis bien des années et que nous aurions beaucoup plus dénoncé si ça se passait à Sikasso ou Kayes.
Adam Thiam (Le Républicain)
Pour partie, la République a été humiliée sur le front du Nord par son armée y compris la chaîne de commandement. Il ne sert à rien de l’occulter si on veut changer la sinistre réalité. Pas plus qu’il ne sert à quelque chose de mettre nos seuls soldats à l’index puisque c’est tout  le  système lui-même qui est médiocre : la famille s’est désincarnée, la jeunesse a été abandonnée, la morale est dévoyée, la société est corrompue, les non-valeurs et les contre-valeurs dominent, c’est le règne des sauf-conduits et des passe-droits, et les validateurs les plus en vue sont autant de prisonniers de droit commun là où l’imputabilité n’est pas un slogan creux.  Seule consolation, l’excellence n’est venue que de nos artistes, curieusement la couche la moins assistée par l’Etat.  Et cette médiocrité est telle que nous n’avons même pas pu empêcher le putsch du 22 mars ni encore décidé d’en tirer les leçons. Pour rester le Mali et pas devenir la Somalie. Parce que hélas le Mali a deux des ingrédients qui ont fait de ce pays de la Corne de l’Afrique un ensemble de dominions régis  par le canon et la terreur. Premier ingrédient : l’accès  aux armes. Celui-ci ne s’est jamais autant démocratisé malgré les projets initiés ces dernières décennies contre leur prolifération. De par sa position géographique, ses faibles capacités et la vénalité de ses systèmes de surveillance, le Mali est une zone de transit des marchands de la mort prestataires de la sous-région. Et puis, il y eut les sorties, pas les rentrées d’armes pour la guerre de l’Azawad qui a éclaté dans l’interrègne, une période propice à la distraction.  Deuxième ingrédient :  les milices gouvernent au Nord tandis que les troupes au Sud semblent échapper à l’autorité des institutions légales. Cette armée, les masses et même les élites courent, à cet égard, le risque de se « privatiser » entre plusieurs enjeux. Illustration : la consternante violence sur la personne du président de la République en ses locaux et qui en dit plus qu’un livre sur la capacité d’auto-perversion du pays.  Or malgré nos offenses à la paix et à la stabilité du pays, le Mali a les ressorts pour rebondir et ne pas sombrer comme des états de triste référence. D’abord, parce que retour à l’ordre constitutionnel, s’il n’est pas linéaire, est en cours. Vrai, la légalité se saurait être effective sans une armée sous le contrôle des institutions légitimes. Vrai, le besoin d’une  armée républicaine est maintenant criard. Mais en termes de sortie de crise, nous sommes bien plus proches de la lueur en cette fin mai qu’en fin mars où nous redoutions le raidissement de la junte ou en fin avril où l’ex junte avait écarté la présidence de Dioncounda après les quarante jours. L’espoir  est aussi permis par notre capital social, c’est-à-dire le petit liant qui nous tient ensemble. Ce capital a été sur-sollicité par plusieurs crises et contradictions.  Mais l’indice de cousinage, la probabilité d’être l’oncle ou le neveu de celui qui doit vous tuer ou que vous devez tuer sont très élevés ici. C’est une des bouches d’incendie contre les pyromanes érigés en idéologues de l’autarcie mais qui savent bien que le Mali de 2012 ne peut pas survivre à la communauté internationale dont elle bénéficie de ressources conséquentes et dont elle menace la sécurité. Le vivre en commun ici n’est pas seulement un projet mais une nécessité pour mutualiser nos solutions individuelles contre la précarité. La formule d’Ousmane Sy  n’est pas que belle mais exacte quand elle dit qu’ici c’est la nation qui se cherche un Etat. Et pas l’inverse. Y compris dans l’Azawad dont les populations nomades au lieu d’accueillir les rebelles en libérateurs ont préféré les camps de réfugiés. D’ailleurs ils sont nombreux les  militaires loyalistes ou les familles de ceux-ci qui doivent une fière chandelles aux civils touareg au plus fort de la crise. Mais pour que le Mali que nous avons voulu en mars 1991 reste sur orbite, son  capital social doit s’appuyer sur un projet évalué et refondé. Car l’appel de sang nouveau et de nouvelles légitimités confusément exprimé par le citoyen lambda est sincère. En dépit de la posture inquiétante de pêcheurs en eaux troubles qui veulent l’instrumentaliser à leur seul profit. Reste que nous devons rejeter la démocratie de façade, refuser les élections-bidon, la gouvernance de dissimulation et les logiques d’exclusion dont l’Afrique est la piteuse vitrine. Et entre Bamako et Kati, le serment pour un Mali grand plutôt que pathétique est une urgence pressante.
Adam Thiam

MALI : Au nom de la paix, Cheick Modibo Diarra comme président de la transition - leFaso.net, l'actualité au Burkina Faso

MALI : Au nom de la paix, Cheick Modibo Diarra comme président de la transition - leFaso.net, l'actualité au Burkina Faso

MALI : Au nom de la paix, Cheick Modibo Diarra comme président de la transition

vendredi 25 mai 2012




La raison médicale a été officiellement avancée pour justifier le voyage en France de Dioncounda Traoré, président malien de la transition. Cet argument est d’autant plus convainquant que l’ancien intérimaire a récemment été physiquement victime du courroux des manifestants pro-putschistes qui ne veulent point le sentir. Si ce justificatif d’ennui sanitaire vaut son pesant de logique, l’ex-président de l’Assemblée n’ayant plus la résistance physique d’un

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25/05/2012 à 14h:35 Par Baba Ahmed, envoyé spécial

À Tombouctou, la police islamique veille. À Tombouctou, la police islamique veille. © Baba Ahmed pour J.A.
Depuis le mois d'avril, les islamistes du mouvement Ansar Eddine règnent en maîtres sur la ville aux Trois Cent Trente-Trois Saints. Acculés à la misère et brimés par la charia, les habitants n'ont plus qu'une idée en tête : fuir. Reportage exclusif à Tombouctou et diaporama photo inédit de notre envoyé spécial.
« Désormais, il n'y a que deux activités possibles à Tombouctou : aller à la mosquée et rester chez soi. » Hallé Ousmane, le maire, cache mal son dépit. Sa ville, inscrite au patrimoine mondial de l'Unesco, se meurt à petit feu. Les façades sont éventrées, les archives de l'administration ont été détruites, des bâtiments saccagés servent d'abris aux animaux... Plus douloureux encore, les visages hagards. « Tombouctou est une ville fantôme, et moi, je ne suis qu'un notable parmi tant d'autres », peste-t-il.



 A Tombouctou, sous le règne des islamistes
Un reportage photo de Baba Ahmed pour Jeune Afrique


Car depuis le 2 avril, ce sont les islamistes d'Ansar Eddine, le groupe fondé par Iyad Ag Ghali - meneur de la rébellion touarègue de 1990 -, qui règnent en maîtres. Ils ont fait une entrée triomphale dans la cité des Trois Cent Trente-Trois Saints à la suite de leurs alliés du Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA), la rébellion touarègue au Mali. Puis ils ont rameuté les salafistes d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi), avec qui ils ont mis la ville en coupe réglée. Débordé, le MNLA s'est installé à l'aéroport, à 4 km au sud. Et l'alliance Ansar Eddine-Aqmi fonctionne si bien qu'il est impossible de les distinguer. Aujourd'hui, Ansar Eddine s'enorgueillit de compter cinq cents combattants dans la seule Tombouctou alors qu'il n'en revendiquait que trois cents dans tout le Nord au début du conflit.

"Généraliser la charia, ça ne pose pas de problème"

La laïcité défendue par le MNLA a fait long feu. Pressés de constituer « l'État de l'Azawad », les rebelles, en négociation avec Iyad Ag Ghali à Gao, ont consenti à tordre le coup à ce principe. « Après tout, le MNLA et Ansar Eddine sont tous les deux constitués de ressortissants de l'Azawad, explique calmement Ousmane Ag Saïd, chargé des affaires religieuses et révolutionnaires du MNLA à Tombouctou. Nous la pratiquons déjà chez nous, dans nos familles, alors généraliser la charia, ça ne pose pas de problème. » À condition de se détacher des djihadistes d'Aqmi, « qui ternissent notre combat », grince un haut cadre du MNLA depuis Gao.

À Tombouctou, en l'absence d'Ag Ghali - dont le nom de djihad est Abou Fadil -, c'est son bras droit qui prend la relève. Sanda Abou Mohamed est un Maure de la région. Ascétique et peu bavard, il fait un peu office d'administrateur général, supervisant aussi bien le ravitaillement en carburant que le positionnement de missiles défensifs autour de la ville. C'est donc lui qui a donné son accord pour qu'un convoi humanitaire du Haut Conseil islamique du Mali et de la Croix-Rouge entre dans Tombouctou le 14 mai. Il a même diligenté une escouade lourdement armée pour l'escorter de Douentza (région de Mopti) jusqu'à sa destination finale. Les 60 tonnes de vivres et de matériel médical sont plus que bienvenues : la ville manque cruellement de tout.

Pendant ce temps à Gao...

Au contraire de Tombouctou, la cohabitation entre la population et les groupes islamistes n'est pas sans heurts à Gao. Le 14 mai, les Gaois, exaspérés par les salafistes et leurs excès, n'ont pas hésité à les affronter. Si le calme est revenu, un humanitaire présent dans la ville estime que « la plus petite étincelle pourrait mettre le feu aux poudres ». Pendant ce temps, le Mouvement national de libération de l'Azawad (MNLA) a trouvé un terrain d'entente avec Iyad Ag Ghali, le fondateur du groupe islamiste Ansar Eddine. Le MNLA consent à faire de l'islam la religion d'État - pourvu qu'il soit modéré - et Ag Ghali à se séparer de ses alliés d'Al-Qaïda au Maghreb islamique (Aqmi) et du Mouvement pour l'unicité et le djihad en Afrique de l'Ouest (Mujao). Ce qui sonne le glas des groupuscules djihadistes. Comment éloigner ces alliés encombrants autrement que par la force ? « Pour l'instant, on va juste leur demander de déposer les armes et d'intégrer la toute nouvelle armée de l'Azawad », confie une source proche des négociations. Malika Groga-Bada
Logiquement, elle se vide peu à peu de ses 50 000 habitants. Ils fuient la pénurie d'argent et de vivres. Mais surtout la charia, la loi islamique, imposée par ceux qu'ils appellent les occupants. Plus de voiles aux couleurs chatoyantes ni de coiffures coquettes. Fini les veillées où l'on se courtise autour d'un verre de thé. Désormais, les sexes opposés doivent se tenir à bonne distance et les femmes se couvrent soigneusement tête, bras et chevilles. La police islamique y veille. Elle a pris ses quartiers au coeur même du vieux Tombouctou, dans les locaux dévastés de la Banque malienne de solidarité. Mi-campement mi-bureaux, le lieu grouille de nouvelles recrues, qui arborent fièrement leur kalachnikov. Ces hommes sont touaregs, songhaïs, parfois bambaras, et communiquent entre eux en arabe. Après une formation sommaire, ils sont envoyés en patrouille ou postés aux points de contrôle installés un peu partout, chargés de faire respecter des principes moraux de l'islam. Premières cibles : les attouchements entre hommes et femmes, et les consommateurs d'alcool.

Les premiers jugements du "tribunal islamique"

À leur tête, le commissaire Khoubey et son adjoint, l'inspecteur Hassan. Rien n'échappe à ces fins limiers, même pas la photographie d'une infirmière qui orne le carnet de notes du journaliste qu'ils reçoivent. Entre deux réponses sur la sécurité de la ville, Hassan finit par s'emparer d'un stylo-bille pour gribouiller sur les bras découverts de l'infirmière. « C'est haram [péché, NDLR] », maugrée-t-il entre deux traits vigoureux, sous le regard approbateur de son supérieur. « Depuis notre arrivée, nous avons fait juger six personnes au tribunal islamique », se réjouit celui-ci. Ledit tribunal n'est pas bien loin, installé dans La Maison, qui était il y a encore quelques mois l'un des hôtels les plus courus par les touristes. Et si aucun bras n'a encore été coupé, « de nombreux coups de fouet ont été administrés aux buveurs de bière », affirme Ben, conservateur du musée municipal.

"Nous protégons jalousement ces manuscrits précieux", promet Abou Moussa, d'Ansar Eddine.
Dans la cour de l'hôpital régional, on décharge cartons de médicaments et matériel de soins. Le soulagement est palpable. Les nouveaux maîtres de la ville ont ordonné la gratuité des actes médicaux et des traitements, oubliant que l'hôpital n'était plus ravitaillé depuis la fin de mars et qu'il tourne avec une petite équipe de volontaires : un généraliste, une sage-femme et deux aides-soignants. « Le nombre des consultations a grimpé en flèche, explique Seydou Bassaloum, le surveillant général. En moyenne 150 consultations par jour, contre 100 avant l'arrivée d'Ansar Eddine et l'instauration de la gratuité des soins. »

civilités. L'arrivée d'une équipe de Médecins sans frontières est un vrai soulagement. L'ONG a dépêché sur place trois médecins et a pris en charge le salaire du personnel pédiatrique, gynéco-obstétrique et chirurgical. Mais Bassaloum tient à souligner « la présence très utile » des islamistes, qui ont versé des salaires de 35 000 et 40 000 F CFA aux bénévoles qui ont assuré un service minimum. « Et ils nous ont rendu l'ambulance qui avait été réquisitionnée par le MNLA, explique Bassaloum. Depuis, ils nous ont même donné une deuxième voiture, et ils s'occupent de fournir le carburant. »

La tombe de Cheikh Sidi Mahmoud Ben Amar profanée

L'opération séduction s'est intensifiée après le coup de sang de la population, le 4 mai. Ce jour-là, les islamistes ont profané la tombe de Cheikh Sidi Mahmoud Ben Amar, l'un des Trois Cent Trente-Trois Saints qui font la fierté de Tombouctou. Oubliant leur peur, les habitants ont bruyamment manifesté leur mécontentement. Depuis, les moudjahidine se sont confondus en excuses et ont promis de veiller sur le patrimoine de la ville, dont des milliers de manuscrits, scientifiques, littéraires ou historiques, datant pour certains du XIIe siècle. « Nous les protégerons jalousement, déclare Abou Moussa, chargé, chez Ansar Eddine, de la garde de ces précieux ouvrages. Non seulement ils font partie de notre patrimoine commun, mais les préceptes qu'ils défendent ne sont pas opposés à l'islam. » « Ils vont plus loin dans leur démarche pour s'intégrer : ils cherchent à prendre femme et proposent des dots de 500 000 F CFA », confie un élu déchu.

Le tribunal islamique, installé dans la La Maison, qui était l'un des hôtels les plus courus par les touristes.
Pas sûr que ces civilités parviennent à calmer la frustration générale. La saison agricole est censée débuter cette semaine, mais les agriculteurs ne peuvent acheter ni semences ni engrais. Le carburant se fait rare, alors que les pompes hydrauliques et les goupes électrogènes fonctionnent au fuel, et que les coupures sont de plus en plus fréquentes. Constitués en petites équipes, les habitants désensablent les anciens puits et forages. Cela suffira-t-il ? Ces points d'eau datent des années 1970. À l'époque, la ville était trois fois moins peuplée. « On va droit dans le mur, se lamente Elhadj Mahmoudy, un camionneur. Enfin... j'espère que nos nouveaux patrons sauront nous épargner cela. »

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Texte et photos Baba Ahmed, envoyé spécial




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24 mai 2012

Je veux comprendre… La crise politique et humanitaire au Mali

Je veux comprendre… La crise politique et humanitaire au Mali

Après cinq mois de conflits armés, un coup d’État et 3,5 millions de personnes en situation d’insécurité alimentaire, le Mali semble dans l’impasse. Laura vous explique pourquoi.

La République du Mali est un pays enclavé (c’est à dire sans accès à la mer) d’Afrique de l’Ouest qui fait partie des Pays les Moins Avancés. Sa population de 15 millions d’habitants est très jeune puisque plus de la moitié des Maliens ont moins de 16 ans, ce qui s’explique par l’incroyable taux de fécondité (6,3 enfants par femme) et par la faiblesse de l’espérance de vie (53 ans).
Le Mali fait face à une importante crise politique depuis janvier 2012. Alors que la démocratie s’était peu à peu imposée dans le pays depuis 1991, la rébellion touareg, les groupes armés islamiques et l’armée malienne sont parvenus à déstabiliser dramatiquement le pays.
Je veux comprendre… La crise politique et humanitaire au Mali drapeau 300x200

Une crise politique qui empire et s’enlise

Les caractéristiques géographiques du Mali ont une importance particulière dans l’explication des événements que traverse aujourd’hui le pays.
Au nord s’étend une zone désertique qui fait la transition entre Sahel et Sahara, appelée l’Azawad. Les touaregs, un peuple nomade dont les tribus s’étendent sur 5 États de l’Ouest africain, sont largement majoritaires dans cette région et revendiquent depuis 1958 un droit à l’autodétermination. Le Mouvement National pour la Libération de l’Awazad (MNLA) est un groupe armé laïc créé à la fin de l’année 2011 pour regrouper plusieurs factions touaregs, notamment les combattants qui ont fui le nouveau régime libyen en emportant avec eux les armes léguées par les hommes de Kadhafi.
Cette région faiblement peuplée fait également partie de la zone d’action d’Al-Qaida au Maghreb Islamique (AQMI) et sert de plaque tournante à de nombreux trafics illicites. L’État malien est absent de cette contrée difficile d’accès et dont les frontières poreuses offrent aux terroristes une précieuse capacité de mobilité.
D’autres groupes de moindre importance se sont établis dans cette zone de non-droit : le groupe armé islamiste Ansar Dine, qui souhaite imposer la charia dans l’ensemble du pays, et le mouvement islamiste Boko Haram dont la présence dans la ville de Gao (à l’est du pays) ne cesse d’étonner puisque ce groupe extrêmement violent opère d’ordinaire au Nigéria.
Je veux comprendre… La crise politique et humanitaire au Mali Cartes1
A droite : la zone délimitée en rouge est celle revendiquée par les rebelles touareg. Les étoiles rouges sont les villes qu'ils contrôlent.
En janvier 2012, le MNLA et les islamistes ont lancé des offensives armées contre des installations militaires et ont pris possession de trois villes importantes en commettant de graves violations des Droits de l’Homme. Si ces groupes n’ont en commun que la volonté de supprimer toute représentation (armée ou non) du gouvernement malien au nord du pays, il semble que cette ambition parvienne à faire naître d’éphémères alliances, ce qui explique qu’à ce jour le nord du pays n’a toujours pas été repris par l’armée malienne.
Excédés par « l’incapacité du gouvernement à donner aux forces armées les moyens nécessaires pour défendre l’intégrité du territoire national » contre les groupes armés, les militaires ont renversé le 21 mars le gouvernement du Président Touré à Bamako, à un mois seulement des élections présidentielles. La Constitution a été suspendue et de nombreux opposants politiques ont été arrêtés, certains même assassinés. Quelques jours plus tard, un accord a été trouvé entre les militaires et la Communauté Économique des États de l’Afrique de l’Ouest (CÉDÉAO) pour que le pouvoir soit transmis à un civil, Dioncounda Traoré, pour une période d’un an. Mais la sortie de crise est incertaine, puisque les partisans du putsch ont agressé le Président Traoré dans son bureau lundi dernier avant de nommer le responsable du coup d’État, le capitaine Sanogo, à la tête du pays sans que celui-ci ne réagisse officiellement.
Faute d’interlocuteurs gouvernementaux, les rebelles ont renforcé leur emprise sur le Nord et ont commencé des négociations avec la CÉDÉAO concernant le futur de l’Awazad, mais aucun plan de sortie de crise n’est envisageable sans cohésion au sein des pouvoirs civils et militaires maliens.
Je veux comprendre… La crise politique et humanitaire au Mali Sanogo Traore1
A gauche, le putschiste Amadou Sanogo. A droite, le président de transition Dioncounda Traoré.

Une crise humanitaire dramatiquement aggravée par la crise politique

Les 15 millions d’habitants vivent essentiellement dans des zones rurales, et 80% d’entre eux travaillent dans le secteur agricole alors que 4% seulement des terres sont cultivables.
Avant même le début de la crise politique, les craintes d’une crise alimentaire au Sahel étaient vives à cause de la faiblesse des intempéries, des mauvaises récoltes et de la hausse des prix que cela induit. Le Sahel est une zone semi-aride sous le Sahara qui traverse l’Afrique d’un océan à l’autre en passant par le Mali. Les ONG estiment que 18 millions de personnes sont aujourd’hui dans une situation d’insécurité alimentaire dans cette région, dont 3,5 millions au Mali. 560 000 enfants maliens de moins de 5 ans souffrent déjà de malnutrition.
Les violences qui se déroulent actuellement au Mali aggravent considérablement la situation. D’après les dernières estimations, près de 335 000 personnes ont été déplacées en raison des conflits, et l’aide humanitaire est difficilement acheminable. Ces mouvements de population ont un impact particulièrement néfaste sur la situation alimentaire déjà critique puisque les déplacés internes (qui restent dans les frontières de leur pays) et les réfugiés (qui quittent leur territoire national) s’établissent dans des régions touchées par la sécheresse.
Dans un rapport publié le 16 mai, Amnesty International relate des violations de Droits de l’Homme qu’elle considère comme les pires ayant été perpétrées au Mali depuis son indépendance en 1960. Il y est question d’exécutions sommaires, de recrutement d’enfants soldats, de violences sexuelles et de détentions arbitraires commises par tous les acteurs du conflit : rebelles touaregs, islamistes mais également militaires.

Comment aider ?

Si peu de choses peuvent être faites à notre niveau concernant la crise politique, nous pouvons avoir un impact certain sur la crise alimentaire. Le plus important est d’informer votre entourage sur les tenants et aboutissants de cette crise. L’opération KONY 2012, bien qu’imparfaite, a prouvé que les réseaux sociaux étaient un outil particulièrement efficace pour les opérations humanitaires, et Action contre la faim a lancé une opération sur Twitter la semaine dernière au bénéfice de la population du Sahel à l’aide du hashtag #ActionSahel.

21 mai 2012

Irrédentisme Touareg au Mali - maliweb.net

Irrédentisme Touareg au Mali - maliweb.net
La sortie des historiens la semaine passée, le contenu de leurs contributions et la passion qui animait les débats sont les raisons qui nous poussent à mettre ce texte à votre disposition. Chers lecteurs, nous espérons qu’il contribuera à vous éclairer sur des pans de notre histoire qui sont soit méconnus ou bien occultés sciemment par nos intellectuels et dont la prise en compte nous permettra, nous en sommes sûrs de trouver un règlement définitif à ce que l’on a communément appelé : La situation du Nord Mali. La situation au nord du Mali nécessite une réflexion, sans passion, sans à priori, sans parti pris ; en un mot une réflexion faite avec lucidité, recul sans aucune forme partisane.
Une approche emprunte de lucidité pour le résorber
L’indépendance du Mali des années 1960 n’a pas permis une gestion efficiente de l’ensemble Kel-Tamacheq
C’est seulement une telle approche, empreinte de  lucidité qui peut nous permettre de trouver un début de solution à cette problématique aujourd’hui récurrente.
Cette démarche  ne peut se faire qu’à travers une genèse du problème qui a vu ses débuts dans les velléités touarègues qui ont connues leur apogée dans les années 1916, date des batailles de Félingué (Niger), Andéramboukane (Mali) qui a sonné le glas de la plus grande confédération Touarègue au sud du Sahara, celle des Iwillimiden avec Fihroun Ag Alinsar à sa tête.

L’indépendance du Mali des années 1960 n’a pas permis une gestion efficiente de l’ensemble Kel-Tamacheq.
Le mode d’administration n’intégrait pas les Kel-Tamacheq
Le mot efficient est employé pour dire que le mode d’administration auquel ont été soumis les Kel-Tamacheq à l’indépendance, n’a pas permis de les intégrer dans la nouvelle Nation. Bien que se réclamant de  celle-ci, les Kel-Tamacheq se sentaient administrés à distance sans jamais être associés aux décisions qui pourtant les concernaient.
Cette mise à l’écart volontaire et/ou involontaire a été en partie la cause de quelques incompréhensions qui se sont traduites par des soulèvements dont les plus connus sont les suivants :
Les rebellions et/ou révoltes de 1962 -1990-2006 et 2012 :
Sans avoir la prétention de faire une étude exhaustive des différentes rebellions et/ou révoltes dites Touarègues. Nous tenterons  d’en évoquer simplement les causes et les conséquences sans faire  de bilan chiffré.
La rébellion de 1962 :
Au lendemain de l’indépendance du Mali, éclate une révolte dans l’Adrar des Iforas, assimilable à une Réplique autochtone au pouvoir  de la première République.
Ses causes, d’ordre historique, socio-économique et même politique, pourraient également être liées au passé belliqueux des Kel Tamachaq.
Vers le VIIIe siècle, la conquête arabe s’était retrouvée face à une stratégie d’occupation diffuse de l’espace par les Kel Tamachaq.
Ceux-ci n’ont donc pas été effectivement islamisés par la force. C’est l’échec des arabes.
Ayant été à la base de nombreux troubles dans le sud Marocain sous Moulaye Ismaël, les Kel Tamachaq ont tenté et fini par contrôler les salines de Teggaza (actuel Taoudenit), sous l’empire Songhay.
Vers la fin du XVème siècle, ils rendirent impossible l’hégémonie  des Marocains au Nord du Soudan et furent les maîtres du septentrion soudanais (Tombouctou) jusqu’à la conquête coloniale.
Au XIXè siècle, ils s’opposèrent farouchement à la pénétration française
Au XIXè siècle, ils s’opposèrent farouchement (dans la boucle du Niger et dans l’Azawagh) à la pénétration coloniale.
Revigorés par ce passé glorieux et l’effet sûrement positif de leur attitude réfractaire face à la domination coloniale, les Kel-Tamachaq ne pourraient logiquement, qu’être hostiles au pouvoir de 1960 de la nouvelle Nation malienne.
Ce nouveau pouvoir n’avait pour effet, selon eux, que de les confiner dans une isolation similaire à celle déjà vécue pendant la période coloniale.
Les causes pourraient  aussi découler de  la gestion mitigée du Soudan Français par le colonisateur.
Les années qui ont précédé les indépendances en Afrique, ont été émaillées de sursauts nationalistes épars et insaisissables par la métropole.
En effet les élites africaines formatées dans les moules coloniaux pour aider la France à mieux ²gérer² les indigènes, prirent très tôt conscience de l’importance du rôle de relais incontournable dont elles étaient investies.
Elles s’impliquent activement et dangereusement dans les pratiques éhontées de la domination coloniale des peuples d’Afrique.
Les pionniers de l’indépendance s’organisèrent…
Face à ce ²complot² savamment hourdi, dont les retombées pourraient être fatales au devenir des peuples opprimés d’Afrique, les pionniers de l’indépendance (Ahmed Sékou TOURE en Guinée, Modibo KEITA au Mali, Léopold Sédar SEINGHOR au Sénégal, Houphouët BOIGNY en Côte d’Ivoire…) s’organisèrent.
Initialement, ce fut à travers d’actions isolées et éparses, puis ils constituèrent de véritables blocs régionaux pour mieux résister et déjouer les stratégies colonialistes, mais aussi et surtout sensibiliser, organiser et conscientiser leurs compatriotes face à l’adversaire redoutable qu’est l’envahisseur colon.

D’autres encore plus fins, comme l’²avocat² de la métropole en Afrique, (Houphouët BOIGNY de la Côte d’Ivoire), réfléchissaient déjà aux liens que devrait entretenir  la métropole avec ses anciennes colonies, si celles-ci devenaient indépendantes.
Au Mali, quelques contacts furent pris…
[Sur convocation des chefs Touareg par les officiers français, « Hamatou Ag Fihroun s’était rendu à Gao à la place de l’Amanokal Tiljatt en vue de la signature d’une  pétition en faveur de l’O.C.R.S. stupéfaits et contrariés par le caractère de cette invitation dont seuls les chefs nomades étaient concernés, les députés Songhay de la ville de Gao, en l’occurrence, Alassane TOURGA, Alousseïny TOURE, Abdoulaye MAIGA dit Mankman et Agnadoumbou MOULAYE, alors venus à leur accueil, ne se privèrent pas d’invectiver leurs hôtes.
Ces derniers de les rassurer sur leur intention, qui contrairement à ce que l’on pourrait lui prêter, n’avait pour but que la séparation des Chrétins, Ikufar, des musulmans.
Une lettre ouverte au Président français Général Charles De Gaulle
Des entretiens se multiplièrent avec nombre de chefs coutumiers, commerçants et notables de la boucle du Niger sur la nécessité de la création de l’O.C.R.S. Ils aboutirent à la rédaction d’une lettre ouverte au Président Français  en la personne du Général Charles DE GAULLE. Ci-après le contenu, lettre publiée dans l’ouvrage de Pierre BOILEY, Les Touaregs Kel Adagh Dépendances et révoltes : du Soudan français au Mali contemporain paru en 1999, édition KARTHALA.
« Opposition formelle au système autonome ou fédéraliste d’Afrique Noire ou d’Afrique du Nord ».
« Nous avons l’honneur de vous déclarer très sincèrement une fois de plus que nous voulons rester toujours Français musulmans avec notre cher statut privé. Nous vous affirmons notre opposition formelle au fait d’être compris dans un système autonome ou fédéraliste d’Afrique Noire ou d’Afrique du Nord.  Nos intérêts et nos aspirations ne pourraient dans aucun cas être valablement défendu tant que nous sommes rattachés à un territoire valablement représenté et gouverné par une majorité noire dont l’ethnique, les intérêts et les aspirations ne sont pas même que les nôtres. C’est pourquoi nous sollicitons votre haute  intervention équitable pour être séparer politiquement et administrativement et le plus tôt possible d’avec le Soudan Français pour intégrer notre pays et sa région boucle du Niger au Sahara Français dont nous faisons parti historiquement et ethniquement ».
Les Populations nomades écartées de cette initiative
C’est malgré cette euphorie nationaliste que fut créée en  1957, l’Organisation commune des Régions sahariennes, OCRS par  loi  n° 57-7-27 du 10 janvier 1957, dans  un but économique et géostratégique, mettant d’office l’exploitation des ressources minières du  Sahara (hydrocarbures, et autres minerais) au profit de la reconstruction de la France d’après guerre.
La thèse selon laquelle les populations nomades elles-mêmes n’étaient nullement au fait d’un  tel projet est la plus plausible et écarte toute possibilité de leur implication dans son initiation.
Toutefois, la convocation des seuls chefs traditionnels à la rencontre de Gao et la lettre ouverte au Président de la République française, ne militent guère pour l’innocence des Kel-Tamachaq.
Hamatou Ag Fihroun et Intalla Ag Attaher écartés au congrès de l’US-RDA de Gao…
Bien qu’ayant l’assentiment des notables Songhaï, cosignataires, les termes de la fameuse lettre ouverte étaient si explicites et édifiants qu’ils finirent par entamer la cohésion sociale pourtant séculaire entre ces deux groupes sociaux.
En effet, le qualificatif ²noir² qui n’était pas attribuable aux Kel-Tamachaq et maures, ne pouvait désigner logiquement que les Songhay, Peuls ou Bamanan au sud, d’où le signe perceptible des velléités  d’une discrimination raciale qui ne dit pas son nom.
N’est ce pas là, les raisons de l’écartement de Hamatou Ag Fihroun et Intalla Ag Attaher qui représentaient Ménaka et Kidal  au congrès constitutif de l’US-RDA de 1958, par la section US-RDA de Gao de tout mandat électif en désignant en leur lieu et place comme députés avec résidence à Gao  Abdoulaye MAIGA dit Mankman pour Ménaka et Alassane TOURGA pour Kidal pendant la première législature de la jeune République du Mali en 1960 ?
Esprit séparatiste
La politique de la métropole qui consiste à maintenir les touaregs dans leur état de nomade en créant des écoles qui nomadisent avec les campements vécue par les sédentaires comme un privilège a contribuée à mettre en exergue cette discrimination entre la race blanche et la noire, qui jusqu’ici est latente.
Cette  gestion des Kel Tamachaq par le colon français est sans doute l’une des sources des problèmes actuels, et est de ce point de vue, l’initiatrice de l’esprit séparatiste et racial que l’on retrouve  entre noirs et blancs jusqu’aujourd’hui au Mali.
La réaction des nomades (à l’indépendance du Mali) en 1962-1963, n’était pas forcément comprise des nouvelles autorités  du pays.
Au lieu de considérer la révolte de 1962-1963, comme un simple soulèvement  mené par un petit groupe (20 personnes ?) sous la direction d’Aladi Ag Alla, dont le père (Alla) fut décapité en 1951 par un peloton méhariste ; ou la réaction des aristocrates en passe de perdre leurs privilèges traditionnels… les autorités maliennes ont crié fort au racisme, à la haine du noir, et au mépris qu’ont les Kel Tamasheq pour ce dernier. Toutes choses qui ont été préjudiciables pour cette communauté.
Méconnaissance des acteurs politiques d’alors du mécanisme intra-communautaires
La gestion des autorités de l’US-RDA de la révolte de 1962 – 1963, allait mettre en évidence  la méconnaissance des acteurs politiques d’alors du mécanisme que constituent les liens intra-communautaires. Et surtout   l’immaturité politique des Kel-Tamachaq.
Face à ce qui précède, l’on constate que l’US-RDA de Modibo KEITA qui venait de remporter les élections a vite remis en cause son « idéologie égalitaire », dans le nord mali en utilisant l’armée nationale contre les populations civiles globalement  étrangères à ladite rébellion.
En effet, au congrès de Bamako (1960), l’US-RDA, parti socialiste, choisit une voie inadaptée aux structures maliennes en général, et nomades en particulier.
Les causes historiques
Les causes historiques concernent l’action de l’US-RDA. Si dans un premier temps, le P.S.P. était considéré par le colonisateur comme un parti modéré et « sage », dans un second temps, l’USRDA était considéré comme une sorte de « haut-parleur », qui  porte loin les principes de l’égalité des hommes, et le droit aux anciens tributaires  de s’émanciper. De surcroît, ce parti politique par inexpérience, a reconduit l’ancien système de gestion de l’administration coloniale. Partout dans la région de Gao, la rumeur faisait entendre :  « les biens seront communs, les femmes seront communes, et les vieillards sommairement exécutés ».

Ce qui n’était que rumeur se concrétisait de plus en plus par des exactions perpétrées par les milices du parti socialiste de Modibo KEITA, situation qui allait  bouleverser les mentalités nomades et les éloigner de tout porteur d’uniformes qu’ils confondent à la milice.
Raison de plus pour que, dans la tradition orale l’on retienne quelques raisons ayant motivées le soulèvement de quelques individus en 1962-1963.
Parmi ces raisons, celles-ci nous paraissent essentielles :
-           L’humiliation (amputer le turban, faire asseoir des gens au soleil, les obliger à faire   des travaux dégradants  chez les Kel-tamachaq : comme la corvée  d’eau etc…) ;
-           La vengeance de Alla (tué par les français) par son fils Alladi;
-           Le confinement et/ou la tentative de sédentarisation des nomades  (les administrations coloniale et  malienne, chacune en ce qui la concerne, ont tenté de limiter la mouvance des Kel tamachaq à coup de décrets, de décisions ou d’arrêtés).
La cause directe
La cause directe  de la révolte de l’Adrar fut les propos injurieux tenus par un garde-goum à Alladi au sujet de son père  Alla  que voici : « nous te couperons la tête comme nous l’avons fait à ton père ».
Dans la région de Gao, les orales font état d’exactions et humiliations parmi certaines  tribus Dawsahak, par des gendarmes commandés par un certain adjudant chef Zoulbaïba, lui-même de la tribu Kel Antsar. Il semble que la présence de certains groupes touareg dont les territoires sont très distants de l’Adrar des Iforas  aux côtés de ceux-ci dans une révolte qui au demeurant  ne concernait que l’Adrar  des Iforas peut être mise en rapport avec le passage meurtrier de Zoulbaïba dans leurs campements secteur d’Ansongo.
Racisme de protestation contre l’administration de l’US-RDA
Il nous paraît essentiel donc, de relever que le racisme invoqué dans les sources orales, ne saurait être le rejet systématique de l’autre, le Noir, mais d’un racisme de protestation contre l’administration de l’US-RDA.
Cette administration procédait par des bains de soleil, ôtait le turban, chose que même le colon jusqu’ici, s’est retenu de  faire. De ce point de vue, le climat de méfiance des Kel Tamachaq à l’égard des administrations, ne saurait s’expliquer autrement, surtout si l’on considère les conséquences de cette révolte de 1962-1963.
Conséquences de la Révolte de 1962-1963 sur l’évolution Socio-économique des Kel Tamachaq.
Face aux ²massacres² ou ²génocide², aux arrestations sous l’US-RDA à Kidal, des exils ont été observés en milieu Tamachaq.
Les arrestations de certains notables touaregs et leur déportation de leurs localités  pour le bagne de Kidal où quelques uns sont morts par la torture en 1963, serait à l’origine de plusieurs départs souvent définitifs vers la Libye, l’Algérie et même en Arabie Saoudite.
Cette attitude qu’ont adoptée les autorités de la nouvelle république du Mali face aux Felagga n’a  pas épargné le bétail. Ainsi, des sources orales rapportent que l’adjudant de gendarmerie de la fraction Kel Intsar,  Zoulbaïba et son équipe ont tué des centaines d’animaux à Higar, arrondissement de Talataye, dans le cercle d’Ansongo.

Plusieurs perquisitions à caractères macabres ont été opérées dans cette région. C’est le cas  de Tagourdaq, arrondissement de Talataye, toujours dans le cercle d’Ansongo où des hommes et des femmes ont été sommairement  exécutés dans l’anonymat.
Le tissu socio-économique de la région bouleversé
Le tissu socio-économique de la région a été bouleversé par les échos de ce qui se passe à Kidal où des tentatives de « destructions culturelles » ont été opérées. A cet égard, des Kel Tamachaq devraient apprendre à danser au rythme du balafon par la force.
Des cas évidents de viols ont été constatés ; ultime humiliation dans une société Kel-Tamachaq où le viol est inconnu, pire il est assimilé à un crime sans nom…
Le tissu social et le cycle des pâturages ont été bouleversés par la présence d’une administration militaire ignorant tout de la région, sauf la répression.
Issue rapide à la rébellion de 1962-1963
Si la rébellion de 1963 a trouvé une issue rapide, cela est  seulement  imputable à l’arrestation de Zaïd Ag Attacher, Alladi Ag Alla, et Iliass Ag Ayouba par les autorités Algériennes qui les ont livrés au pouvoir de Bamako. Une solution similaire était-elle encore possible en 1990 ?
La rébellion de 1990
Trente ans après l’indépendance du Mali, vingt sept ans après la rébellion de 1962-1963, éclate une deuxième rébellion, par l’attaque de la localité de Menaka, dans la nuit du 28 au 29 juin 1990. Cette nouvelle rébellion ressemble à la première du point de vue de ses causes et de ses conséquences, mais en diffère essentiellement par son envergure et ses acteurs.
Au total, la rébellion de 1962-1963 était celle de quelques jeunes n’ayant appris aucune technique militaire, et celle de 1990, l’œuvre de jeunes militaires professionnels. Cet aspect peut-il être occulté par nos responsables politiques?
A suivre…
Tiéfolo Coulibaly (stagiaire

Irrédentisme Touareg au Mali - maliweb.net

Irrédentisme Touareg au Mali - maliweb.net
La sortie des historiens la semaine passée, le contenu de leurs contributions et la passion qui animait les débats sont les raisons qui nous poussent à mettre ce texte à votre disposition. Chers lecteurs, nous espérons qu’il contribuera à vous éclairer sur des pans de notre histoire qui sont soit méconnus ou bien occultés sciemment par nos intellectuels et dont la prise en compte nous permettra, nous en sommes sûrs de trouver un règlement définitif à ce que l’on a communément appelé : La situation du Nord Mali. La situation au nord du Mali nécessite une réflexion, sans passion, sans à priori, sans parti pris ; en un mot une réflexion faite avec lucidité, recul sans aucune forme partisane.
Une approche emprunte de lucidité pour le résorber
L’indépendance du Mali des années 1960 n’a pas permis une gestion efficiente de l’ensemble Kel-Tamacheq
C’est seulement une telle approche, empreinte de  lucidité qui peut nous permettre de trouver un début de solution à cette problématique aujourd’hui récurrente.
Cette démarche  ne peut se faire qu’à travers une genèse du problème qui a vu ses débuts dans les velléités touarègues qui ont connues leur apogée dans les années 1916, date des batailles de Félingué (Niger), Andéramboukane (Mali) qui a sonné le glas de la plus grande confédération Touarègue au sud du Sahara, celle des Iwillimiden avec Fihroun Ag Alinsar à sa tête.

L’indépendance du Mali des années 1960 n’a pas permis une gestion efficiente de l’ensemble Kel-Tamacheq.
Le mode d’administration n’intégrait pas les Kel-Tamacheq
Le mot efficient est employé pour dire que le mode d’administration auquel ont été soumis les Kel-Tamacheq à l’indépendance, n’a pas permis de les intégrer dans la nouvelle Nation. Bien que se réclamant de  celle-ci, les Kel-Tamacheq se sentaient administrés à distance sans jamais être associés aux décisions qui pourtant les concernaient.
Cette mise à l’écart volontaire et/ou involontaire a été en partie la cause de quelques incompréhensions qui se sont traduites par des soulèvements dont les plus connus sont les suivants :
Les rebellions et/ou révoltes de 1962 -1990-2006 et 2012 :
Sans avoir la prétention de faire une étude exhaustive des différentes rebellions et/ou révoltes dites Touarègues. Nous tenterons  d’en évoquer simplement les causes et les conséquences sans faire  de bilan chiffré.
La rébellion de 1962 :
Au lendemain de l’indépendance du Mali, éclate une révolte dans l’Adrar des Iforas, assimilable à une Réplique autochtone au pouvoir  de la première République.
Ses causes, d’ordre historique, socio-économique et même politique, pourraient également être liées au passé belliqueux des Kel Tamachaq.
Vers le VIIIe siècle, la conquête arabe s’était retrouvée face à une stratégie d’occupation diffuse de l’espace par les Kel Tamachaq.
Ceux-ci n’ont donc pas été effectivement islamisés par la force. C’est l’échec des arabes.
Ayant été à la base de nombreux troubles dans le sud Marocain sous Moulaye Ismaël, les Kel Tamachaq ont tenté et fini par contrôler les salines de Teggaza (actuel Taoudenit), sous l’empire Songhay.
Vers la fin du XVème siècle, ils rendirent impossible l’hégémonie  des Marocains au Nord du Soudan et furent les maîtres du septentrion soudanais (Tombouctou) jusqu’à la conquête coloniale.
Au XIXè siècle, ils s’opposèrent farouchement à la pénétration française
Au XIXè siècle, ils s’opposèrent farouchement (dans la boucle du Niger et dans l’Azawagh) à la pénétration coloniale.
Revigorés par ce passé glorieux et l’effet sûrement positif de leur attitude réfractaire face à la domination coloniale, les Kel-Tamachaq ne pourraient logiquement, qu’être hostiles au pouvoir de 1960 de la nouvelle Nation malienne.
Ce nouveau pouvoir n’avait pour effet, selon eux, que de les confiner dans une isolation similaire à celle déjà vécue pendant la période coloniale.
Les causes pourraient  aussi découler de  la gestion mitigée du Soudan Français par le colonisateur.
Les années qui ont précédé les indépendances en Afrique, ont été émaillées de sursauts nationalistes épars et insaisissables par la métropole.
En effet les élites africaines formatées dans les moules coloniaux pour aider la France à mieux ²gérer² les indigènes, prirent très tôt conscience de l’importance du rôle de relais incontournable dont elles étaient investies.
Elles s’impliquent activement et dangereusement dans les pratiques éhontées de la domination coloniale des peuples d’Afrique.
Les pionniers de l’indépendance s’organisèrent…
Face à ce ²complot² savamment hourdi, dont les retombées pourraient être fatales au devenir des peuples opprimés d’Afrique, les pionniers de l’indépendance (Ahmed Sékou TOURE en Guinée, Modibo KEITA au Mali, Léopold Sédar SEINGHOR au Sénégal, Houphouët BOIGNY en Côte d’Ivoire…) s’organisèrent.
Initialement, ce fut à travers d’actions isolées et éparses, puis ils constituèrent de véritables blocs régionaux pour mieux résister et déjouer les stratégies colonialistes, mais aussi et surtout sensibiliser, organiser et conscientiser leurs compatriotes face à l’adversaire redoutable qu’est l’envahisseur colon.

D’autres encore plus fins, comme l’²avocat² de la métropole en Afrique, (Houphouët BOIGNY de la Côte d’Ivoire), réfléchissaient déjà aux liens que devrait entretenir  la métropole avec ses anciennes colonies, si celles-ci devenaient indépendantes.
Au Mali, quelques contacts furent pris…
[Sur convocation des chefs Touareg par les officiers français, « Hamatou Ag Fihroun s’était rendu à Gao à la place de l’Amanokal Tiljatt en vue de la signature d’une  pétition en faveur de l’O.C.R.S. stupéfaits et contrariés par le caractère de cette invitation dont seuls les chefs nomades étaient concernés, les députés Songhay de la ville de Gao, en l’occurrence, Alassane TOURGA, Alousseïny TOURE, Abdoulaye MAIGA dit Mankman et Agnadoumbou MOULAYE, alors venus à leur accueil, ne se privèrent pas d’invectiver leurs hôtes.
Ces derniers de les rassurer sur leur intention, qui contrairement à ce que l’on pourrait lui prêter, n’avait pour but que la séparation des Chrétins, Ikufar, des musulmans.
Une lettre ouverte au Président français Général Charles De Gaulle
Des entretiens se multiplièrent avec nombre de chefs coutumiers, commerçants et notables de la boucle du Niger sur la nécessité de la création de l’O.C.R.S. Ils aboutirent à la rédaction d’une lettre ouverte au Président Français  en la personne du Général Charles DE GAULLE. Ci-après le contenu, lettre publiée dans l’ouvrage de Pierre BOILEY, Les Touaregs Kel Adagh Dépendances et révoltes : du Soudan français au Mali contemporain paru en 1999, édition KARTHALA.
« Opposition formelle au système autonome ou fédéraliste d’Afrique Noire ou d’Afrique du Nord ».
« Nous avons l’honneur de vous déclarer très sincèrement une fois de plus que nous voulons rester toujours Français musulmans avec notre cher statut privé. Nous vous affirmons notre opposition formelle au fait d’être compris dans un système autonome ou fédéraliste d’Afrique Noire ou d’Afrique du Nord.  Nos intérêts et nos aspirations ne pourraient dans aucun cas être valablement défendu tant que nous sommes rattachés à un territoire valablement représenté et gouverné par une majorité noire dont l’ethnique, les intérêts et les aspirations ne sont pas même que les nôtres. C’est pourquoi nous sollicitons votre haute  intervention équitable pour être séparer politiquement et administrativement et le plus tôt possible d’avec le Soudan Français pour intégrer notre pays et sa région boucle du Niger au Sahara Français dont nous faisons parti historiquement et ethniquement ».
Les Populations nomades écartées de cette initiative
C’est malgré cette euphorie nationaliste que fut créée en  1957, l’Organisation commune des Régions sahariennes, OCRS par  loi  n° 57-7-27 du 10 janvier 1957, dans  un but économique et géostratégique, mettant d’office l’exploitation des ressources minières du  Sahara (hydrocarbures, et autres minerais) au profit de la reconstruction de la France d’après guerre.
La thèse selon laquelle les populations nomades elles-mêmes n’étaient nullement au fait d’un  tel projet est la plus plausible et écarte toute possibilité de leur implication dans son initiation.
Toutefois, la convocation des seuls chefs traditionnels à la rencontre de Gao et la lettre ouverte au Président de la République française, ne militent guère pour l’innocence des Kel-Tamachaq.
Hamatou Ag Fihroun et Intalla Ag Attaher écartés au congrès de l’US-RDA de Gao…
Bien qu’ayant l’assentiment des notables Songhaï, cosignataires, les termes de la fameuse lettre ouverte étaient si explicites et édifiants qu’ils finirent par entamer la cohésion sociale pourtant séculaire entre ces deux groupes sociaux.
En effet, le qualificatif ²noir² qui n’était pas attribuable aux Kel-Tamachaq et maures, ne pouvait désigner logiquement que les Songhay, Peuls ou Bamanan au sud, d’où le signe perceptible des velléités  d’une discrimination raciale qui ne dit pas son nom.
N’est ce pas là, les raisons de l’écartement de Hamatou Ag Fihroun et Intalla Ag Attaher qui représentaient Ménaka et Kidal  au congrès constitutif de l’US-RDA de 1958, par la section US-RDA de Gao de tout mandat électif en désignant en leur lieu et place comme députés avec résidence à Gao  Abdoulaye MAIGA dit Mankman pour Ménaka et Alassane TOURGA pour Kidal pendant la première législature de la jeune République du Mali en 1960 ?
Esprit séparatiste
La politique de la métropole qui consiste à maintenir les touaregs dans leur état de nomade en créant des écoles qui nomadisent avec les campements vécue par les sédentaires comme un privilège a contribuée à mettre en exergue cette discrimination entre la race blanche et la noire, qui jusqu’ici est latente.
Cette  gestion des Kel Tamachaq par le colon français est sans doute l’une des sources des problèmes actuels, et est de ce point de vue, l’initiatrice de l’esprit séparatiste et racial que l’on retrouve  entre noirs et blancs jusqu’aujourd’hui au Mali.
La réaction des nomades (à l’indépendance du Mali) en 1962-1963, n’était pas forcément comprise des nouvelles autorités  du pays.
Au lieu de considérer la révolte de 1962-1963, comme un simple soulèvement  mené par un petit groupe (20 personnes ?) sous la direction d’Aladi Ag Alla, dont le père (Alla) fut décapité en 1951 par un peloton méhariste ; ou la réaction des aristocrates en passe de perdre leurs privilèges traditionnels… les autorités maliennes ont crié fort au racisme, à la haine du noir, et au mépris qu’ont les Kel Tamasheq pour ce dernier. Toutes choses qui ont été préjudiciables pour cette communauté.
Méconnaissance des acteurs politiques d’alors du mécanisme intra-communautaires
La gestion des autorités de l’US-RDA de la révolte de 1962 – 1963, allait mettre en évidence  la méconnaissance des acteurs politiques d’alors du mécanisme que constituent les liens intra-communautaires. Et surtout   l’immaturité politique des Kel-Tamachaq.
Face à ce qui précède, l’on constate que l’US-RDA de Modibo KEITA qui venait de remporter les élections a vite remis en cause son « idéologie égalitaire », dans le nord mali en utilisant l’armée nationale contre les populations civiles globalement  étrangères à ladite rébellion.
En effet, au congrès de Bamako (1960), l’US-RDA, parti socialiste, choisit une voie inadaptée aux structures maliennes en général, et nomades en particulier.
Les causes historiques
Les causes historiques concernent l’action de l’US-RDA. Si dans un premier temps, le P.S.P. était considéré par le colonisateur comme un parti modéré et « sage », dans un second temps, l’USRDA était considéré comme une sorte de « haut-parleur », qui  porte loin les principes de l’égalité des hommes, et le droit aux anciens tributaires  de s’émanciper. De surcroît, ce parti politique par inexpérience, a reconduit l’ancien système de gestion de l’administration coloniale. Partout dans la région de Gao, la rumeur faisait entendre :  « les biens seront communs, les femmes seront communes, et les vieillards sommairement exécutés ».

Ce qui n’était que rumeur se concrétisait de plus en plus par des exactions perpétrées par les milices du parti socialiste de Modibo KEITA, situation qui allait  bouleverser les mentalités nomades et les éloigner de tout porteur d’uniformes qu’ils confondent à la milice.
Raison de plus pour que, dans la tradition orale l’on retienne quelques raisons ayant motivées le soulèvement de quelques individus en 1962-1963.
Parmi ces raisons, celles-ci nous paraissent essentielles :
-           L’humiliation (amputer le turban, faire asseoir des gens au soleil, les obliger à faire   des travaux dégradants  chez les Kel-tamachaq : comme la corvée  d’eau etc…) ;
-           La vengeance de Alla (tué par les français) par son fils Alladi;
-           Le confinement et/ou la tentative de sédentarisation des nomades  (les administrations coloniale et  malienne, chacune en ce qui la concerne, ont tenté de limiter la mouvance des Kel tamachaq à coup de décrets, de décisions ou d’arrêtés).
La cause directe
La cause directe  de la révolte de l’Adrar fut les propos injurieux tenus par un garde-goum à Alladi au sujet de son père  Alla  que voici : « nous te couperons la tête comme nous l’avons fait à ton père ».
Dans la région de Gao, les orales font état d’exactions et humiliations parmi certaines  tribus Dawsahak, par des gendarmes commandés par un certain adjudant chef Zoulbaïba, lui-même de la tribu Kel Antsar. Il semble que la présence de certains groupes touareg dont les territoires sont très distants de l’Adrar des Iforas  aux côtés de ceux-ci dans une révolte qui au demeurant  ne concernait que l’Adrar  des Iforas peut être mise en rapport avec le passage meurtrier de Zoulbaïba dans leurs campements secteur d’Ansongo.
Racisme de protestation contre l’administration de l’US-RDA
Il nous paraît essentiel donc, de relever que le racisme invoqué dans les sources orales, ne saurait être le rejet systématique de l’autre, le Noir, mais d’un racisme de protestation contre l’administration de l’US-RDA.
Cette administration procédait par des bains de soleil, ôtait le turban, chose que même le colon jusqu’ici, s’est retenu de  faire. De ce point de vue, le climat de méfiance des Kel Tamachaq à l’égard des administrations, ne saurait s’expliquer autrement, surtout si l’on considère les conséquences de cette révolte de 1962-1963.
Conséquences de la Révolte de 1962-1963 sur l’évolution Socio-économique des Kel Tamachaq.
Face aux ²massacres² ou ²génocide², aux arrestations sous l’US-RDA à Kidal, des exils ont été observés en milieu Tamachaq.
Les arrestations de certains notables touaregs et leur déportation de leurs localités  pour le bagne de Kidal où quelques uns sont morts par la torture en 1963, serait à l’origine de plusieurs départs souvent définitifs vers la Libye, l’Algérie et même en Arabie Saoudite.
Cette attitude qu’ont adoptée les autorités de la nouvelle république du Mali face aux Felagga n’a  pas épargné le bétail. Ainsi, des sources orales rapportent que l’adjudant de gendarmerie de la fraction Kel Intsar,  Zoulbaïba et son équipe ont tué des centaines d’animaux à Higar, arrondissement de Talataye, dans le cercle d’Ansongo.

Plusieurs perquisitions à caractères macabres ont été opérées dans cette région. C’est le cas  de Tagourdaq, arrondissement de Talataye, toujours dans le cercle d’Ansongo où des hommes et des femmes ont été sommairement  exécutés dans l’anonymat.
Le tissu socio-économique de la région bouleversé
Le tissu socio-économique de la région a été bouleversé par les échos de ce qui se passe à Kidal où des tentatives de « destructions culturelles » ont été opérées. A cet égard, des Kel Tamachaq devraient apprendre à danser au rythme du balafon par la force.
Des cas évidents de viols ont été constatés ; ultime humiliation dans une société Kel-Tamachaq où le viol est inconnu, pire il est assimilé à un crime sans nom…
Le tissu social et le cycle des pâturages ont été bouleversés par la présence d’une administration militaire ignorant tout de la région, sauf la répression.
Issue rapide à la rébellion de 1962-1963
Si la rébellion de 1963 a trouvé une issue rapide, cela est  seulement  imputable à l’arrestation de Zaïd Ag Attacher, Alladi Ag Alla, et Iliass Ag Ayouba par les autorités Algériennes qui les ont livrés au pouvoir de Bamako. Une solution similaire était-elle encore possible en 1990 ?
La rébellion de 1990
Trente ans après l’indépendance du Mali, vingt sept ans après la rébellion de 1962-1963, éclate une deuxième rébellion, par l’attaque de la localité de Menaka, dans la nuit du 28 au 29 juin 1990. Cette nouvelle rébellion ressemble à la première du point de vue de ses causes et de ses conséquences, mais en diffère essentiellement par son envergure et ses acteurs.
Au total, la rébellion de 1962-1963 était celle de quelques jeunes n’ayant appris aucune technique militaire, et celle de 1990, l’œuvre de jeunes militaires professionnels. Cet aspect peut-il être occulté par nos responsables politiques?
A suivre…
Tiéfolo Coulibaly (stagiaire