Crise mondiale du riz: L'Afrique, un espoir pour l'humanité... lire sur SIDWAYA
Dans une déclaration parvenue à notre rédaction, un spécialiste en politiques et stratégies agricoles, le docteur Papa A. Seck, par ailleurs directeur général du Centre du riz pour l'Afrique (ADRAO) explique que dans le contexte de la crise rizicole mondiale, l'Afrique est l'avenir du monde pour la riziculture.
L'humanité est présentement face à une crise rizicole très aiguë qui, à n'en point douter, constitue une menace sérieuse pour maintenir la paix sociale. A notre sens, Il ne s'agit nullement d'une surprise car vu le capital de connaissances accumulées par l'homme, il est difficile, voire impossible de ne pas prévoir de tels phénomènes. Le Centre du riz pour l'Afrique (ADRAO) a, depuis au moins 02 ans, prédit une crise rizicole en Afrique à partir de 2008. La dernière alerte date du Conseil des Ministres des Etats membres tenu à Abuja en septembre 2007. Au cours de cette importante rencontre, le Directeur général de l'ADRAO avait fait une présentation intitulée "Crise rizicole en Afrique, mythe ou réalité ?". II en était clairement ressorti que notre continent va vers de réelles difficultés d'approvisionnement. En effet, l'Afrique couvre 10 à 13% de la population mondiale mais absorbe 32% des importations mondiales, et connaît un taux de croissance de sa consommation d'environ 4,5% par an. S'y ajoute le fait que les stocks mondiaux sont au plus bas niveau depuis 25 ans, avec moins de 2 mois de réserve dont la moitié se trouve en Chine. II convient aussi de souligner que des modèles économétriques avaient également estimé que les prix de 2008 seraient au moins le double de ceux de 2002. Enfin, l'offre connaît un rétrécissement graduel. A titre d'exemple, un grand pays producteur comme la Chine a perdu 4 millions d'hectares en 10 ans et pourrait chercher 10 % de ses besoins sur les marchés internationaux, soit 35 % des quantités qui y sont commercialisées. C'est en fait l'équivalent de la part de l'Afrique actuellement. Beaucoup d'initiatives ont été prises par la plupart des gouvernements africains. Mais force est de constater et de souligner, qu'à l'instar des autres parties du monde, rien n'a pu arrêter le phénomène. La crise rizicole est structurelle, elle risque d'être longue et pénible car l'Asie est de moins en moins en mesure de nourrir le monde. Une analyse des 10 dernières années montre que la consommation mondiale augmente en moyenne de 1% par an et la productivité de 0,5 %. Par conséquent, cette crise serait l'effet cumulé de gaps enregistrés chaque année. Nous avons une conviction: l'avenir de la riziculture se trouve en Afrique. Car ce continent, contrairement à l'Asie, a un potentiel immense non exploité repérable à travers ses vastes étendues de terres et ses ressources hydriques faiblement utilisées (Zambie, RDC, Sierra Leone, Mali, Sénégal, etc.). A titre illustratif, nous avons en Afrique au Sud du Sahara, 130 millions d'hectares de bas-fonds dont 3,9 millions seulement sont en culture. Par contre en Asie, le pari n'est pas d'augmenter les superficies rizicoles mais plutôt de les maintenir. En outre, la compétitivité de la production du riz local en Afrique au Sud du Sahara est établie. Il suffit pour s'en convaincre de comparer les rendements obtenus en Thaïlande et au Vietnam, et ceux du Sénégal, du Mali et du Niger. Les préjugés concernant notre compétitivité-coût et notre compétitivité-qualité sont au «musée des idées périmées» . Les problèmes sont ailleurs. Il faut une rupture: l'Afrique doit dépasser la logique de gestion des urgences au profit d'une véritable rationalisation de sa réflexion sur le devenir et engager des actions concrètes de relance. Sous ce rapport, cette crise est plutôt une opportunité pour réfléchir autrement et agir autrement en vue de nous nourrir sur une base endogène et durablement. Par conséquent, une seule question se pose: quels sont les problèmes et que faire ? A court terme, les mesures prises par certains gouvernements africains relatives à l'allégement de la fiscalité et à certains mécanismes visant la transparence des marchés sont fondées. Cependant, celles-ci doivent être plus ciblées en faveur des pauvres. En outre, ils doivent engager sans délai, une réflexion et mettre en place des actions à moyen et long terme. Car de plus en plus, les équations vont se poser en termes de disponibilité de la ressource que son accessibilité. Sous ce registre, les éléments suivants peuvent être avancés : 1. Augmenter significativement la part de la riziculture irriguée à haut rendement dans la production.Actuellement les superficies irriguées en Afrique représentent moins de 10% contre plus de 50% en Asie. La riziculture irriguée permet à la fois d'obtenir des rendements très élevés (de 3 a 4 fois plus élevés par rapport au pluvial) et de faire la double culture. 2. Promouvoir l'utilisation des variétés telles que les NERICA (variété obtenue par l'ADRAO grâce à un croisement entre le riz africain et le riz asiatique). Le NERICA permet une augmentation sensible des rendements dans certains écosystèmes, un cycle plus court (moins de 50 jours comparé aux variétés traditionnelles) et une valeur en protéine plus élevée de 25% par rapport au riz importé. Il y a aujourd'hui 18 variétés de NERICA développées pour les plateaux et 60 pour les bas fonds qui sont homologuées dans 20 pays africains. La simplification et l'accélération des procédures d'homologation de ces variétés par l' adoption des méthodes participatives préconisées par l'ADRAO, méritent d'être retenue dans tous les pays d'Afrique pour réduire de plusieurs années le processus d'adoption. 3. Améliorer l'accès aux semences améliorées : La disponibilité des semences est l'une des contraintes majeures à l'utilisation réussie des variétés améliorées telles que les NERICA. Face à un tel problème, il faut, entre autres, les mesures suivantes: (i) adopter des lois standard sur les semences et définir des mécanismes efficaces de contrôle et de certification de semences, et assurer leur application. (ii) Mettre en place un système de législation semencière pour encourager l'implication du secteur privé dans l'approvisionnement et le commerce des semences. (iii) Renforcer les Systèmes nationaux de recherche agricole (SNRA) pour la production des semences de pré-base et de semences de base. 4. Améliorer les pratiques culturales : L'ADRAO et ses partenaires ont mis en évidence la possibilité d'augmenter les rendements en milieu paysan à travers une gestion intégrée de la campagne rizicole en proposant des alternatives allant de la préparation du terrain jusqu'à la récolte. Des gains de rendement d'une à deux tonnes par hectare ont été obtenus en système irrigué et en bas-fonds, sans augmentation significative des coûts de production; les améliorations se trouvent surtout au niveau de la gestion de la fertilité et la lutte contre les mauvaises herbes. 5. Diminuer les pertes à la récolte et post-récolte : les pertes au niveau de la récolte et post-récolte (en quantité et en qualité) représentent 15 à 50% de la valeur marchande de la production. Par conséquent, la mise à la disposition des acteurs d'équipement performant et leur formation est le point de passage obligé pour réduire les pertes et améliorer la qualité ainsi que l'établissement des liens entre les différents acteurs intervenant dans la chaîne de valeur rizicole. 6. Fortifier les systèmes de recherche et de vulgarisation et leurs liens: la mise en place d'une plate-forme des acteurs rizicoles, d'un fonds d'appui au programme national rizicole et de financements adéquats aux systèmes de recherche et de vulgarisation rizicoles, nous semblent des axes majeurs à considérer. 7. Massifier le soutien aux acteurs de la filière rizicole : il y a un dérèglement du commerce international. Jusqu'à une année récente, les 11 000 riziculteurs américains recevaient des subventions d'une valeur de 1,4 milliards de dollars par an. Par contre, les 7 millions de riziculteurs africains continuent de se battre dans un marché libéralisé sans aucune subvention et avec un accès limité au crédit, aux intrants et à l'information sur le marché. En fait, il y aune évidence: les acteurs ruraux africains, comme tous les autres collègues du monde, ont besoin de soutien conséquent. Améliorer notre infrastructure pour diminuer le coût élevé des intrants : d'une manière générale, les prix des engrais en Afrique sont 2 à 6 fois plus élevés que ceux d'Asie, d'Europe et d'Amérique du Nord surtout liés aux coûts élevés des transports. Nous avons par conséquent, des limites objectives pour une intensification intelligente en vue de doper la productivité rizicole africaine.
Conclusion
L'Afrique doit comprendre qu'il lui faut assurer une offre rizicole suffisante en quantité, satisfaisante en qualité, rémunératrice pour les producteurs et supportable par le budget des consommateurs les plus pauvres. C'est à ce prix et à ce prix seulement qu'elle peut éviter d'être un "otage" des cours mondiaux. Il n'y a pas de secret, on construit une agriculture compétitive et durable grâce à une combinaison intelligente de 03 facteurs: Technologies performantes, infrastructure de base et environnement assaini. Oui c'est possible d'inverser les tendances mais à moyen terme.
Dr. Papa A. Seck Spécialiste en politique et stratégies agricoles
Directeur Général du Centre du riz pour l'Afrique (ADRAO)
18 avr. 2008
Le Monde.fr : Les bienfaits de prix alimentaires plus élevés -
LE MONDE 16.04.08 14h46 • Mis à jour le 16.04.08 14h46
es lamentations universelles qui accueillent la hausse des prix alimentaires sont compréhensibles mais déplacées. Certes, pour les pays pauvres important de la nourriture, cette flambée entraîne des problèmes de balance des paiements, des privations et même des émeutes. Pour tous les pays, cela signifie aussi une poussée malvenue d'inflation. Mais une part croissante de la population mondiale a besoin de prix alimentaires plus élevés si elle veut être capable de se nourrir elle-même dans le futur.
Les prix alimentaires ont connu une hausse météorique. L'indice de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a bondi de 37 % entre décembre 2006 et décembre 2007. La Banque mondiale estime qu'ils ont progressé de 83 % ces trois dernières années. Certains marchés, comme celui du riz, ont été très perturbés. Ces hausses sont un choc d'autant plus grand que le prix réel des aliments avait baissé depuis trente ans.
Plusieurs éléments ont poussé les prix vers le haut. L'envolée des cours de l'énergie, en provoquant ceux du gasoil et des engrais, a augmenté les coûts de production. Les désastres naturels ont tendu davantage les marchés. La diversification des récoltes, de la nourriture vers les agrocarburants, a fait le reste. Mais des forces plus profondes sont à l'oeuvre. La population mondiale augmente, et ses revenus avec. Au fur et à mesure que le sort des gens s'améliore, comme en Chine, ils mangent mieux.
La croissance de la productivité annuelle agricole en Asie est tombée à 1 % au début de ce siècle, moins de la moitié de son taux des deux décennies précédentes.
ABOLIR LES SUBVENTIONS
Améliorer la productivité agricole et la production nécessite une foule de mesures comme une irrigation plus efficace, des crédits plus importants, de nouvelles variétés de cultures (incluant les OGM) et de meilleures infrastructures rurales. Il est important aussi d'abolir la panoplie de subventions gouvernementales qui perturbent le marché mondial.
L'ingrédient crucial, comme toujours, est le prix. A court terme, la Banque mondiale a raison de faire campagne pour atténuer l'impact de prix alimentaires plus élevés sur les pauvres. Mais à plus long terme, le meilleur moyen de réduire la pauvreté - spécialement celle des populations rurales - et de nourrir la planète est de faire en sorte que l'agriculture paie.
_______________________________________________________________
Pour plus de commentaires, connectez-vous sur breakingviews.com
Michael Prest
Article paru dans l'édition du 17.04.08
LE MONDE 16.04.08 14h46 • Mis à jour le 16.04.08 14h46
es lamentations universelles qui accueillent la hausse des prix alimentaires sont compréhensibles mais déplacées. Certes, pour les pays pauvres important de la nourriture, cette flambée entraîne des problèmes de balance des paiements, des privations et même des émeutes. Pour tous les pays, cela signifie aussi une poussée malvenue d'inflation. Mais une part croissante de la population mondiale a besoin de prix alimentaires plus élevés si elle veut être capable de se nourrir elle-même dans le futur.
Les prix alimentaires ont connu une hausse météorique. L'indice de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) a bondi de 37 % entre décembre 2006 et décembre 2007. La Banque mondiale estime qu'ils ont progressé de 83 % ces trois dernières années. Certains marchés, comme celui du riz, ont été très perturbés. Ces hausses sont un choc d'autant plus grand que le prix réel des aliments avait baissé depuis trente ans.
Plusieurs éléments ont poussé les prix vers le haut. L'envolée des cours de l'énergie, en provoquant ceux du gasoil et des engrais, a augmenté les coûts de production. Les désastres naturels ont tendu davantage les marchés. La diversification des récoltes, de la nourriture vers les agrocarburants, a fait le reste. Mais des forces plus profondes sont à l'oeuvre. La population mondiale augmente, et ses revenus avec. Au fur et à mesure que le sort des gens s'améliore, comme en Chine, ils mangent mieux.
La croissance de la productivité annuelle agricole en Asie est tombée à 1 % au début de ce siècle, moins de la moitié de son taux des deux décennies précédentes.
ABOLIR LES SUBVENTIONS
Améliorer la productivité agricole et la production nécessite une foule de mesures comme une irrigation plus efficace, des crédits plus importants, de nouvelles variétés de cultures (incluant les OGM) et de meilleures infrastructures rurales. Il est important aussi d'abolir la panoplie de subventions gouvernementales qui perturbent le marché mondial.
L'ingrédient crucial, comme toujours, est le prix. A court terme, la Banque mondiale a raison de faire campagne pour atténuer l'impact de prix alimentaires plus élevés sur les pauvres. Mais à plus long terme, le meilleur moyen de réduire la pauvreté - spécialement celle des populations rurales - et de nourrir la planète est de faire en sorte que l'agriculture paie.
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Michael Prest
Article paru dans l'édition du 17.04.08
Le Monde.fr : Des experts appellent à repenser l'agriculture de demain Des experts appellent à repenser l'agriculture de demain
LE MONDE 15.04.08 13h49 • Mis à jour le 15.04.08 13h53
es experts n'avaient pas prévu les "émeutes de la faim" qui secouent la planète, mais leur travail ne pouvait tomber plus à propos : dans un rapport publié mardi 15 avril, la communauté scientifique des agronomes appelle à soutenir les petits paysans et à intensifier les recherches en agro-écologie. Le document, approuvé par 59 gouvernements à Johannesburg, le 12 avril, a été rédigé dans le cadre de l'IAASTD (International Assessment of Agricultural Science and Technology for Development), EISTAD en français (Evaluation internationale des sciences et technologies agricoles au service du développement).
Il est le fruit d'un processus similaire à celui suivi – pour l'analyse du changement climatique – par le GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat). Engagé en 2004, l'IAASTD a réuni plus de 400 experts internationaux, chargés de définir les voies que devrait suivre la recherche agronomique pour relever le défi alimentaire dans les prochaines décennies.
Le processus a été piloté par Robert Watson, ancien président du GIEC, et soutenu par la Banque mondiale et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Point original : les organisations non gouvernementales y ont été associées, qu'elles soient écologistes ou qu'elles représentent des entreprises. Un membre de Greenpeace figurait ainsi dans le bureau de l'IAASTD, qui comptait 55 personnes.
Le rapport affirme une "prise de conscience" de la pérennité d'une grave pauvreté rurale, liée au manque de soutien des politiques publiques pour l'agriculture, alors que de nouvelles contraintes se profilent à l'horizon : changement climatique, disponibilités en eau, concurrence des agrocarburants, érosion de la biodiversité…
"ON NE PEUT PAS JOUER SUR LE SEUL FACTEUR DE LA TECHNOLOGIE"
Achim Steiner, secrétaire du Programme des Nations unies pour l'environnement, a ainsi estimé que "si nos systèmes agricoles continuent de mettre l'accent uniquement sur la maximisation de la production au coût le plus bas, l'agriculture connaîtra une grande crise dans vingt à trente ans".
Le document de l'IAASTD marque un renversement d'optique par rapport à la politique qui a favorisé depuis un demi-siècle les cultures d'exportation au détriment des cultures vivrières (cacao en Côte d'Ivoire, arachide au Sénégal, soja en Argentine, etc.). "L'IAASTD propose une réorientation autour des savoirs locaux et communautaires, afin de retrouver une autosuffisance alimentaire, explique le Français Michel Dodet, de l'Institut national de la recherche agronomique (Inra), membre du bureau de l'IAASTD. On ne peut pas jouer sur le seul facteur de la technologie."
La discussion a achoppé sur la question du rôle des organismes génétiquement modifiés (OGM). L'organisation Crop Life International, qui regroupe des entreprises comme Monsanto et Syngenta, s'est ainsi retirée de la discussion en octobre 2007. Le processus n'en a pas moins continué, conduisant à "une vision de compromis entre deux visions dures de l'agriculture : celle qui place la technologie au centre de tout progrès et celle privilégiant les savoirs locaux", selon Marianne Lefort, agronome et coauteur d'un des rapports.
Par ailleurs, l'"agro-écologie", qui est la prise en compte des processus écologiques dans le système agricole, se voit pleinement reconnue par l'IAASTD.
Le rapport de synthèse a été approuvé par 59 des 63 Etats représentés au sein de l'IAASTD. Etats-Unis, Australie, Canada et Royaume-Uni ont indiqué "ne pas pouvoir [l']approuver complètement". Mais, dans une déclaration liminaire, ces pays ont apporté leur soutien à la démarche engagée. De son côté, la Chine a approuvé l'ensemble des textes, exprimant cependant des "réserves" sur le chapitre relatif aux biotechnologies.
La position de l'IAASTD vient conforter un changement d'orientation amorcé par la Banque mondiale, dont le dernier rapport annuel constatait qu'"alors que 75 % de la population pauvre mondiale vit dans les espaces ruraux, seulement 4 % de l'aide publique au développement va à l'agriculture". En fait, observe Michel Dodet, "on redécouvre que la production est une condition du développement".
Les mouvements de paysans, de mieux en mieux organisés, contribuent aussi à cette nouvelle perception. De passage à Paris, Rajagopal P.V., leader du mouvement indien des sans-terre, qui a conduit en octobre une marche de 25 000 paysans sur New Delhi, résumait, lundi 14 avril : "Pendant des années, on a entendu dire que les petits paysans n'étaient pas viables, qu'il fallait laisser faire les grandes exploitations. Aujourd'hui, avec les pénuries alimentaires, les gens comprennent que cette production centralisée ne marche pas."
Hervé Kempf
LE MONDE 15.04.08 13h49 • Mis à jour le 15.04.08 13h53
es experts n'avaient pas prévu les "émeutes de la faim" qui secouent la planète, mais leur travail ne pouvait tomber plus à propos : dans un rapport publié mardi 15 avril, la communauté scientifique des agronomes appelle à soutenir les petits paysans et à intensifier les recherches en agro-écologie. Le document, approuvé par 59 gouvernements à Johannesburg, le 12 avril, a été rédigé dans le cadre de l'IAASTD (International Assessment of Agricultural Science and Technology for Development), EISTAD en français (Evaluation internationale des sciences et technologies agricoles au service du développement).
Il est le fruit d'un processus similaire à celui suivi – pour l'analyse du changement climatique – par le GIEC (Groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat). Engagé en 2004, l'IAASTD a réuni plus de 400 experts internationaux, chargés de définir les voies que devrait suivre la recherche agronomique pour relever le défi alimentaire dans les prochaines décennies.
Le processus a été piloté par Robert Watson, ancien président du GIEC, et soutenu par la Banque mondiale et l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO). Point original : les organisations non gouvernementales y ont été associées, qu'elles soient écologistes ou qu'elles représentent des entreprises. Un membre de Greenpeace figurait ainsi dans le bureau de l'IAASTD, qui comptait 55 personnes.
Le rapport affirme une "prise de conscience" de la pérennité d'une grave pauvreté rurale, liée au manque de soutien des politiques publiques pour l'agriculture, alors que de nouvelles contraintes se profilent à l'horizon : changement climatique, disponibilités en eau, concurrence des agrocarburants, érosion de la biodiversité…
"ON NE PEUT PAS JOUER SUR LE SEUL FACTEUR DE LA TECHNOLOGIE"
Achim Steiner, secrétaire du Programme des Nations unies pour l'environnement, a ainsi estimé que "si nos systèmes agricoles continuent de mettre l'accent uniquement sur la maximisation de la production au coût le plus bas, l'agriculture connaîtra une grande crise dans vingt à trente ans".
Le document de l'IAASTD marque un renversement d'optique par rapport à la politique qui a favorisé depuis un demi-siècle les cultures d'exportation au détriment des cultures vivrières (cacao en Côte d'Ivoire, arachide au Sénégal, soja en Argentine, etc.). "L'IAASTD propose une réorientation autour des savoirs locaux et communautaires, afin de retrouver une autosuffisance alimentaire, explique le Français Michel Dodet, de l'Institut national de la recherche agronomique (Inra), membre du bureau de l'IAASTD. On ne peut pas jouer sur le seul facteur de la technologie."
La discussion a achoppé sur la question du rôle des organismes génétiquement modifiés (OGM). L'organisation Crop Life International, qui regroupe des entreprises comme Monsanto et Syngenta, s'est ainsi retirée de la discussion en octobre 2007. Le processus n'en a pas moins continué, conduisant à "une vision de compromis entre deux visions dures de l'agriculture : celle qui place la technologie au centre de tout progrès et celle privilégiant les savoirs locaux", selon Marianne Lefort, agronome et coauteur d'un des rapports.
Par ailleurs, l'"agro-écologie", qui est la prise en compte des processus écologiques dans le système agricole, se voit pleinement reconnue par l'IAASTD.
Le rapport de synthèse a été approuvé par 59 des 63 Etats représentés au sein de l'IAASTD. Etats-Unis, Australie, Canada et Royaume-Uni ont indiqué "ne pas pouvoir [l']approuver complètement". Mais, dans une déclaration liminaire, ces pays ont apporté leur soutien à la démarche engagée. De son côté, la Chine a approuvé l'ensemble des textes, exprimant cependant des "réserves" sur le chapitre relatif aux biotechnologies.
La position de l'IAASTD vient conforter un changement d'orientation amorcé par la Banque mondiale, dont le dernier rapport annuel constatait qu'"alors que 75 % de la population pauvre mondiale vit dans les espaces ruraux, seulement 4 % de l'aide publique au développement va à l'agriculture". En fait, observe Michel Dodet, "on redécouvre que la production est une condition du développement".
Les mouvements de paysans, de mieux en mieux organisés, contribuent aussi à cette nouvelle perception. De passage à Paris, Rajagopal P.V., leader du mouvement indien des sans-terre, qui a conduit en octobre une marche de 25 000 paysans sur New Delhi, résumait, lundi 14 avril : "Pendant des années, on a entendu dire que les petits paysans n'étaient pas viables, qu'il fallait laisser faire les grandes exploitations. Aujourd'hui, avec les pénuries alimentaires, les gens comprennent que cette production centralisée ne marche pas."
Hervé Kempf
Les tartuffes de la faim - Opinions
Edito du Monde
Les tartuffes de la faim
LE MONDE 16.04.08 14h44 • Mis à jour le 16.04.08 14h44
es émeutes de la faim ayant fait irruption dans les journaux télévisés, l'heure est à la mobilisation. De Paris à Washington, chacun y va de son idée pour venir en aide aux populations des pays pauvres incapables de faire face à l'augmentation des prix des denrées alimentaires de base, notamment le riz. On ne peut que saluer cet élan de générosité. Ne pas réagir serait criminel et donnerait de l'Occident une image bien peu reluisante.
Pourtant, comment ne pas se sentir mal à l'aise face à ces élans du coeur ? Car les plus généreux aujourd'hui sont peut-être les plus responsables de ce dérèglement planétaire. Les nouvelles habitudes alimentaires des pays émergents, largement importées des pays développés, expliquent en grande partie l'explosion de la demande, et donc les tensions sur les prix.
Ce n'est pas la seule raison. La concurrence des biocarburants en est une autre, essentielle. Or les Etats-Unis, si généreux avec le Programme alimentaire mondial, ont confirmé leur volonté de doubler les surfaces déjà très importantes qu'ils consacrent aux biocarburants. Face à l'automobiliste américain, le paysan haïtien ne fait pas le poids. Même chose pour l'Europe. Non seulement elle veut développer les biocarburants, mais, dans les négociations internationales, elle maintient une politique protectionniste qui déstabilise depuis longtemps les agricultures du tiers-monde et freine la réduction de la pauvreté.
Quant à la responsabilité de la Banque mondiale et au Fonds monétaire international, elle est également considérable. Pendant des décennies, ces institutions ont expliqué aux pays émergents que l'agriculture avait son avenir derrière elle. Les pays émergents ont ainsi favorisé les cultures d'exportation, destinées à leur rapporter des devises ; ils récoltent aujourd'hui les fruits amers de cette politique. Ainsi le Sénégal exporte des produits alimentaires - que l'Europe taxe quand il a l'audace de vouloir les transformer sur place -, mais doit importer environ 80 % du riz qu'il consomme. Or, non seulement le riz devient rare, mais les spéculateurs en font parfois grimper les prix de 30 % en une journée. La générosité soudaine de l'Occident ne saurait faire oublier la part de responsabilité qui est la sienne dans la crise majeure qui menace aujourd'hui.
Article paru dans l'édition du 17.04.08
Edito du Monde
Les tartuffes de la faim
LE MONDE 16.04.08 14h44 • Mis à jour le 16.04.08 14h44
es émeutes de la faim ayant fait irruption dans les journaux télévisés, l'heure est à la mobilisation. De Paris à Washington, chacun y va de son idée pour venir en aide aux populations des pays pauvres incapables de faire face à l'augmentation des prix des denrées alimentaires de base, notamment le riz. On ne peut que saluer cet élan de générosité. Ne pas réagir serait criminel et donnerait de l'Occident une image bien peu reluisante.
Pourtant, comment ne pas se sentir mal à l'aise face à ces élans du coeur ? Car les plus généreux aujourd'hui sont peut-être les plus responsables de ce dérèglement planétaire. Les nouvelles habitudes alimentaires des pays émergents, largement importées des pays développés, expliquent en grande partie l'explosion de la demande, et donc les tensions sur les prix.
Ce n'est pas la seule raison. La concurrence des biocarburants en est une autre, essentielle. Or les Etats-Unis, si généreux avec le Programme alimentaire mondial, ont confirmé leur volonté de doubler les surfaces déjà très importantes qu'ils consacrent aux biocarburants. Face à l'automobiliste américain, le paysan haïtien ne fait pas le poids. Même chose pour l'Europe. Non seulement elle veut développer les biocarburants, mais, dans les négociations internationales, elle maintient une politique protectionniste qui déstabilise depuis longtemps les agricultures du tiers-monde et freine la réduction de la pauvreté.
Quant à la responsabilité de la Banque mondiale et au Fonds monétaire international, elle est également considérable. Pendant des décennies, ces institutions ont expliqué aux pays émergents que l'agriculture avait son avenir derrière elle. Les pays émergents ont ainsi favorisé les cultures d'exportation, destinées à leur rapporter des devises ; ils récoltent aujourd'hui les fruits amers de cette politique. Ainsi le Sénégal exporte des produits alimentaires - que l'Europe taxe quand il a l'audace de vouloir les transformer sur place -, mais doit importer environ 80 % du riz qu'il consomme. Or, non seulement le riz devient rare, mais les spéculateurs en font parfois grimper les prix de 30 % en une journée. La générosité soudaine de l'Occident ne saurait faire oublier la part de responsabilité qui est la sienne dans la crise majeure qui menace aujourd'hui.
Article paru dans l'édition du 17.04.08
Jacques Diouf et Jean-Michel Severino: vie chère
La hausse des prix agricoles, une chance pour l'Afrique ?, par Jacques Diouf et Jean-Michel Severino - Opinions
Point de vue
La hausse des prix agricoles, une chance pour l'Afrique ?, par Jacques Diouf et Jean-Michel Severino
LE MONDE 16.04.08 15h05 • Mis à jour le 16.04.08 15h05
e Monde titrait en "une", le 14 avril, sur la flambée du prix des denrées alimentaires. Le Caire, Dakar, Douala, Abidjan : la rue gronde, les manifestations se multiplient. Si elle pénalise le pouvoir d'achat du consommateur européen, l'envolée simultanée des prix du pétrole et des denrées alimentaires de première nécessité affecte dorénavant la stabilité politique de certains pays du Sud.
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Le prix moyen d'un repas de base a augmenté de 40 % en l'espace d'une année dans certains pays africains dont la moitié des populations vit avec moins de 1 dollar par jour. Cela signifie le retour de la faim dans des régions qui s'en étaient émancipées. Or plusieurs phénomènes d'ordre structurel, du côté de l'offre (effets du changement climatique, faiblesse des stocks et compétition des biocarburants pour les terres agricoles) comme de la demande (croissance démographique, changements alimentaires dans les pays émergents), laisse présager la persistance de prix élevés dans les prochaines années.
A court terme, il n'existe pas de solution satisfaisante pour les gouvernements concernés. Pour un Etat importateur de produits alimentaires et de pétrole, l'envolée concomitante de leurs prix grève les finances publiques. Face au mécontentement grandissant de leurs citoyens, les gouvernements sont contraints de répondre aux besoins immédiats de la population. Des interventions souvent faites au détriment des investissements de long terme, qui seuls permettront à l'Afrique d'échapper durablement au spectre de la pénurie alimentaire. Les interventions publiques d'urgence, nécessaires pour amortir le choc subi par les plus pauvres, ne doivent pas se faire aux dépens de l'adaptation de l'agriculture africaine à cette nouvelle donne mondiale.
L'Afrique est aujourd'hui importateur net de denrées alimentaires. Or les projections indiquent que sa population devrait plus que doubler dans les quarante prochaines années, passant d'environ 800 millions aujourd'hui à 1,8 milliard d'habitants en 2050. La population des villes africaines, la plus vulnérable à la hausse actuelle des prix, devrait quant à elle tripler en seulement deux décennies. Mais, face à l'envolée des cours, le continent ne peut plus se permettre de laisser son déficit commercial agricole s'accroître. Non seulement parce que les prix seront durablement élevés, mais aussi parce que la disponibilité des produits sur le marché international n'est plus assurée si les pays exportateurs réduisent leur exportation pour garantir leur propre sécurité alimentaire.
Pour se préserver de crises alimentaires endémiques, l'Afrique devra donc compter sur son propre potentiel agricole. Elle doit transformer le formidable défi de la hausse des prix en une chance pour son développement économique. L'agriculture africaine a en effet gravement souffert par le passé de la baisse continue des prix des denrées agricoles sur les marchés mondiaux. Avec des produits importés de plus en plus chers, les prix des produits africains vont redevenir attractifs. Les villes du continent devront davantage se tourner, pour leur approvisionnement, vers les marchés locaux, nationaux et régionaux.
Les campagnes seront-elles capables de répondre rapidement à cette demande croissante ? C'est là tout l'enjeu de nos politiques d'accompagnement - et la véritable solution aux difficultés actuelles. L'agriculture africaine possède un fort potentiel de développement, avec un avantage comparatif par rapport aux autres régions du monde. Malgré d'importantes disparités géographiques, et contrairement à une idée répandue, le continent dispose, en effet, de ressources hydriques abondantes mais insuffisamment exploitées. Il bénéficie également d'importantes réserves de terres et de main-d'oeuvre. En outre, l'agriculture africaine étant très faiblement mécanisée, peu utilisatrice d'engrais et très insuffisamment accompagnée par la recherche agronomique, ses marges de productivité restent considérables.
Mais le nécessaire accroissement de la production agricole africaine ne pourra se faire qu'au prix d'ajustements sérieux. Il est du devoir et de l'intérêt de la communauté internationale d'accompagner ces efforts pour que les campagnes africaines puissent à l'avenir nourrir les villes du continent, et les villes jouer pleinement leur rôle de fournisseurs de services pour les campagnes. Cela passera en premier lieu par l'amélioration des liaisons entre espaces ruraux et urbains, afin de favoriser l'apport en intrants modernes et l'accès des exploitants aux marchés locaux.
Cela nécessitera un appui à l'agriculture vivrière par des systèmes spécifiques de crédit et d'assurance. Il faudra enfin aider l'agriculture africaine à s'adapter aux changements climatiques en cours et à choisir des techniques respectueuses de l'environnement. Dès aujourd'hui, la communauté internationale peut aider les agriculteurs pauvres à avoir accès aux semences et aux engrais devenus trop coûteux : c'est le sens de l'initiative contre la hausse des prix alimentaires lancée à Rome en décembre 2007.
Le contexte alimentaire mondial a changé. L'Afrique peut relever ce défi et transformer la crise actuelle en opportunité de développement. Son agriculture doit pour cela être soutenue au-delà des réponses d'urgence. La responsabilité des pays développés est de permettre à l'Afrique d'augmenter rapidement sa production agricole. Le sommet de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) sur la sécurité alimentaire au mois de juin offrira aux hauts dirigeants du monde l'occasion d'adopter les stratégies nécessaires pour relever ce grand défi.
Jacques Diouf est directeur général de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture.
Jean-Michel Severino est directeur général de l'Agence française de développement.
Article paru dans l'édition du 17.04.08
Point de vue
La hausse des prix agricoles, une chance pour l'Afrique ?, par Jacques Diouf et Jean-Michel Severino
LE MONDE 16.04.08 15h05 • Mis à jour le 16.04.08 15h05
e Monde titrait en "une", le 14 avril, sur la flambée du prix des denrées alimentaires. Le Caire, Dakar, Douala, Abidjan : la rue gronde, les manifestations se multiplient. Si elle pénalise le pouvoir d'achat du consommateur européen, l'envolée simultanée des prix du pétrole et des denrées alimentaires de première nécessité affecte dorénavant la stabilité politique de certains pays du Sud.
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Le prix moyen d'un repas de base a augmenté de 40 % en l'espace d'une année dans certains pays africains dont la moitié des populations vit avec moins de 1 dollar par jour. Cela signifie le retour de la faim dans des régions qui s'en étaient émancipées. Or plusieurs phénomènes d'ordre structurel, du côté de l'offre (effets du changement climatique, faiblesse des stocks et compétition des biocarburants pour les terres agricoles) comme de la demande (croissance démographique, changements alimentaires dans les pays émergents), laisse présager la persistance de prix élevés dans les prochaines années.
A court terme, il n'existe pas de solution satisfaisante pour les gouvernements concernés. Pour un Etat importateur de produits alimentaires et de pétrole, l'envolée concomitante de leurs prix grève les finances publiques. Face au mécontentement grandissant de leurs citoyens, les gouvernements sont contraints de répondre aux besoins immédiats de la population. Des interventions souvent faites au détriment des investissements de long terme, qui seuls permettront à l'Afrique d'échapper durablement au spectre de la pénurie alimentaire. Les interventions publiques d'urgence, nécessaires pour amortir le choc subi par les plus pauvres, ne doivent pas se faire aux dépens de l'adaptation de l'agriculture africaine à cette nouvelle donne mondiale.
L'Afrique est aujourd'hui importateur net de denrées alimentaires. Or les projections indiquent que sa population devrait plus que doubler dans les quarante prochaines années, passant d'environ 800 millions aujourd'hui à 1,8 milliard d'habitants en 2050. La population des villes africaines, la plus vulnérable à la hausse actuelle des prix, devrait quant à elle tripler en seulement deux décennies. Mais, face à l'envolée des cours, le continent ne peut plus se permettre de laisser son déficit commercial agricole s'accroître. Non seulement parce que les prix seront durablement élevés, mais aussi parce que la disponibilité des produits sur le marché international n'est plus assurée si les pays exportateurs réduisent leur exportation pour garantir leur propre sécurité alimentaire.
Pour se préserver de crises alimentaires endémiques, l'Afrique devra donc compter sur son propre potentiel agricole. Elle doit transformer le formidable défi de la hausse des prix en une chance pour son développement économique. L'agriculture africaine a en effet gravement souffert par le passé de la baisse continue des prix des denrées agricoles sur les marchés mondiaux. Avec des produits importés de plus en plus chers, les prix des produits africains vont redevenir attractifs. Les villes du continent devront davantage se tourner, pour leur approvisionnement, vers les marchés locaux, nationaux et régionaux.
Les campagnes seront-elles capables de répondre rapidement à cette demande croissante ? C'est là tout l'enjeu de nos politiques d'accompagnement - et la véritable solution aux difficultés actuelles. L'agriculture africaine possède un fort potentiel de développement, avec un avantage comparatif par rapport aux autres régions du monde. Malgré d'importantes disparités géographiques, et contrairement à une idée répandue, le continent dispose, en effet, de ressources hydriques abondantes mais insuffisamment exploitées. Il bénéficie également d'importantes réserves de terres et de main-d'oeuvre. En outre, l'agriculture africaine étant très faiblement mécanisée, peu utilisatrice d'engrais et très insuffisamment accompagnée par la recherche agronomique, ses marges de productivité restent considérables.
Mais le nécessaire accroissement de la production agricole africaine ne pourra se faire qu'au prix d'ajustements sérieux. Il est du devoir et de l'intérêt de la communauté internationale d'accompagner ces efforts pour que les campagnes africaines puissent à l'avenir nourrir les villes du continent, et les villes jouer pleinement leur rôle de fournisseurs de services pour les campagnes. Cela passera en premier lieu par l'amélioration des liaisons entre espaces ruraux et urbains, afin de favoriser l'apport en intrants modernes et l'accès des exploitants aux marchés locaux.
Cela nécessitera un appui à l'agriculture vivrière par des systèmes spécifiques de crédit et d'assurance. Il faudra enfin aider l'agriculture africaine à s'adapter aux changements climatiques en cours et à choisir des techniques respectueuses de l'environnement. Dès aujourd'hui, la communauté internationale peut aider les agriculteurs pauvres à avoir accès aux semences et aux engrais devenus trop coûteux : c'est le sens de l'initiative contre la hausse des prix alimentaires lancée à Rome en décembre 2007.
Le contexte alimentaire mondial a changé. L'Afrique peut relever ce défi et transformer la crise actuelle en opportunité de développement. Son agriculture doit pour cela être soutenue au-delà des réponses d'urgence. La responsabilité des pays développés est de permettre à l'Afrique d'augmenter rapidement sa production agricole. Le sommet de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) sur la sécurité alimentaire au mois de juin offrira aux hauts dirigeants du monde l'occasion d'adopter les stratégies nécessaires pour relever ce grand défi.
Jacques Diouf est directeur général de l'Organisation pour l'alimentation et l'agriculture.
Jean-Michel Severino est directeur général de l'Agence française de développement.
Article paru dans l'édition du 17.04.08
CHIRAC: Crise alimentaire : des solutions existent
Crise alimentaire : des solutions existent, par Jacques Chirac - Opinions
Point de vue
LE MONDE 16.04.08 15h02 • Mis à jour le 16.04.08 15h05
frique, Asie, Amérique latine, Caraïbes : la carte des "émeutes de la faim" s'étend chaque jour. Le monde est confronté au spectre des grandes famines alors même qu'il traverse une crise financière dangereuse. La cohésion, si délicate, de la communauté
internationale est doublement menacée. Je le dis solennellement : cette conjonction des périls fait courir au monde un risque sans précédent.
Sans mesures d'urgence et de fond, nous assisterons à des émeutes de plus en plus violentes, à des mouvements migratoires de plus en plus incontrôlables, à des conflits de plus en plus meurtriers, à une instabilité politique croissante. Les ingrédients d'une crise majeure sont réunis et la situation peut se dégrader très vite.
FACE À CE DANGER, LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE DOIT ASSUMER SES RESPONSABILITÉS, toutes ses responsabilités, dans une totale coopération du Nord et du Sud.
Elle doit se mobiliser autour d'objectifs précis :
- pour résoudre, d'abord, la question de l'urgence : le Conseil de sécurité de l'Organisation des nations unies, qui devrait se tenir au plus tôt sur la crise alimentaire mondiale, doit prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter la déstabilisation des Etats les plus menacés.
L'Europe et les Etats-Unis ont enfin annoncé le déblocage d'une aide d'urgence au profit du Programme alimentaire mondial. Je ne doute pas que les autres grandes puissances, membres du G8, pays émergents et pays de l'OPEP qui tirent des rentes exceptionnelles de l'augmentation du prix du pétrole, auront à coeur de prendre toute leur part de cet effort immédiat de solidarité ;
- pour résoudre, ensuite, les problèmes structurels : je plaide depuis longtemps pour aller plus loin que les seules mesures d'urgence conjoncturelles. C'est une véritable révolution des modes de pensée et d'action en matière de développement, notamment dans le domaine agricole, qui s'impose.
PARVENIR PARTOUT À L'AUTOSUFFISANCE ALIMENTAIRE
L'offre de produits alimentaires au niveau mondial est insuffisante.
Je n'ai jamais cessé de me battre contre le gel de la production en Europe et de promouvoir le développement agricole des pays pauvres.
Il nous faudra, demain, nourrir 9 milliards d'hommes. Tout le monde se rend compte, enfin, que l'humanité a besoin de la production de toutes ses terres agricoles. L'autosuffisance alimentaire est le premier des défis à relever pour les pays en développement. Des outils existent. Nous savons tous ce qu'il faut faire : infrastructures rurales, stockage, irrigation, transport, financement des récoltes, organisation des marchés, microcrédit, etc.
L'agriculture vivrière doit être réhabilitée. Elle doit être encouragée. Elle doit être protégée, n'ayons pas peur des mots, contre une concurrence débridée des produits d'importation qui déstabilisent l'économie de ces pays et découragent les producteurs locaux.
Pour relever ce défi, il est nécessaire d'investir à la fois dans la recherche - pour développer des productions et des variétés adaptées aux nouvelles donnes du changement climatique et de la raréfaction des ressources en eau -, et dans la formation et la diffusion des techniques agricoles. Il faut miser sur les hommes, sur les producteurs locaux, qui doivent percevoir la juste rémunération de leurs efforts. Les échanges doivent obéir à des règles équitables, respectant à la fois le consommateur et le producteur. La libre circulation des produits ne peut pas se faire au détriment des producteurs les plus fragiles.
APPORTER DES FINANCEMENTS INNOVANTS ET STABLES AU DÉVELOPPEMENT
Les besoins d'investissement sont massifs et pour longtemps. Il est vital de maintenir l'effort d'aide publique au développement et de respecter l'objectif de 0,7 % du PIB.
Il est tout aussi vital de dégager des ressources additionnelles par des financements innovants. Que n'ai-je entendu quand j'ai milité, avec mon ami le Président Lula du Brésil, pour l'idée, pourtant évidente, que le financement du développement requiert des ressources pérennes ! La taxe sur les billets d'avion a permis en 2007 de dégager plusieurs centaines de millions d'euros en faveur de l'accès aux médicaments. C'est un succès. D'autres efforts d'imagination devraient permettre de dégager rapidement les ressources nécessaires pour faire face à la crise alimentaire.
Explorons par exemple, comme le suggère le président de la Banque mondiale, M. Robert Zoellick, dans le cadre de conversations avec les fonds souverains, comment orienter une partie de leurs moyens vers des investissements productifs en Afrique. Le prochain G8 pourrait utilement consacrer une séance de travail à l'examen de cette proposition.
La contribution des financements innovants au développement des pays les plus pauvres sera une des priorités de ma fondation. Ce n'est, certes, qu'un moyen mais ayons conscience que, face au caractère inédit de la crise que nous vivons, la communauté internationale n'a d'autres choix que celui de l'imagination et de la solidarité.
Jacques Chirac est président de la Fondation Chirac.
Article paru dans l'édition du 17.04.08
Point de vue
LE MONDE 16.04.08 15h02 • Mis à jour le 16.04.08 15h05
frique, Asie, Amérique latine, Caraïbes : la carte des "émeutes de la faim" s'étend chaque jour. Le monde est confronté au spectre des grandes famines alors même qu'il traverse une crise financière dangereuse. La cohésion, si délicate, de la communauté

Sans mesures d'urgence et de fond, nous assisterons à des émeutes de plus en plus violentes, à des mouvements migratoires de plus en plus incontrôlables, à des conflits de plus en plus meurtriers, à une instabilité politique croissante. Les ingrédients d'une crise majeure sont réunis et la situation peut se dégrader très vite.
FACE À CE DANGER, LA COMMUNAUTÉ INTERNATIONALE DOIT ASSUMER SES RESPONSABILITÉS, toutes ses responsabilités, dans une totale coopération du Nord et du Sud.
Elle doit se mobiliser autour d'objectifs précis :
- pour résoudre, d'abord, la question de l'urgence : le Conseil de sécurité de l'Organisation des nations unies, qui devrait se tenir au plus tôt sur la crise alimentaire mondiale, doit prendre toutes les mesures nécessaires pour éviter la déstabilisation des Etats les plus menacés.
L'Europe et les Etats-Unis ont enfin annoncé le déblocage d'une aide d'urgence au profit du Programme alimentaire mondial. Je ne doute pas que les autres grandes puissances, membres du G8, pays émergents et pays de l'OPEP qui tirent des rentes exceptionnelles de l'augmentation du prix du pétrole, auront à coeur de prendre toute leur part de cet effort immédiat de solidarité ;
- pour résoudre, ensuite, les problèmes structurels : je plaide depuis longtemps pour aller plus loin que les seules mesures d'urgence conjoncturelles. C'est une véritable révolution des modes de pensée et d'action en matière de développement, notamment dans le domaine agricole, qui s'impose.
PARVENIR PARTOUT À L'AUTOSUFFISANCE ALIMENTAIRE
L'offre de produits alimentaires au niveau mondial est insuffisante.
Je n'ai jamais cessé de me battre contre le gel de la production en Europe et de promouvoir le développement agricole des pays pauvres.
Il nous faudra, demain, nourrir 9 milliards d'hommes. Tout le monde se rend compte, enfin, que l'humanité a besoin de la production de toutes ses terres agricoles. L'autosuffisance alimentaire est le premier des défis à relever pour les pays en développement. Des outils existent. Nous savons tous ce qu'il faut faire : infrastructures rurales, stockage, irrigation, transport, financement des récoltes, organisation des marchés, microcrédit, etc.
L'agriculture vivrière doit être réhabilitée. Elle doit être encouragée. Elle doit être protégée, n'ayons pas peur des mots, contre une concurrence débridée des produits d'importation qui déstabilisent l'économie de ces pays et découragent les producteurs locaux.
Pour relever ce défi, il est nécessaire d'investir à la fois dans la recherche - pour développer des productions et des variétés adaptées aux nouvelles donnes du changement climatique et de la raréfaction des ressources en eau -, et dans la formation et la diffusion des techniques agricoles. Il faut miser sur les hommes, sur les producteurs locaux, qui doivent percevoir la juste rémunération de leurs efforts. Les échanges doivent obéir à des règles équitables, respectant à la fois le consommateur et le producteur. La libre circulation des produits ne peut pas se faire au détriment des producteurs les plus fragiles.
APPORTER DES FINANCEMENTS INNOVANTS ET STABLES AU DÉVELOPPEMENT
Les besoins d'investissement sont massifs et pour longtemps. Il est vital de maintenir l'effort d'aide publique au développement et de respecter l'objectif de 0,7 % du PIB.
Il est tout aussi vital de dégager des ressources additionnelles par des financements innovants. Que n'ai-je entendu quand j'ai milité, avec mon ami le Président Lula du Brésil, pour l'idée, pourtant évidente, que le financement du développement requiert des ressources pérennes ! La taxe sur les billets d'avion a permis en 2007 de dégager plusieurs centaines de millions d'euros en faveur de l'accès aux médicaments. C'est un succès. D'autres efforts d'imagination devraient permettre de dégager rapidement les ressources nécessaires pour faire face à la crise alimentaire.
Explorons par exemple, comme le suggère le président de la Banque mondiale, M. Robert Zoellick, dans le cadre de conversations avec les fonds souverains, comment orienter une partie de leurs moyens vers des investissements productifs en Afrique. Le prochain G8 pourrait utilement consacrer une séance de travail à l'examen de cette proposition.
La contribution des financements innovants au développement des pays les plus pauvres sera une des priorités de ma fondation. Ce n'est, certes, qu'un moyen mais ayons conscience que, face au caractère inédit de la crise que nous vivons, la communauté internationale n'a d'autres choix que celui de l'imagination et de la solidarité.
Jacques Chirac est président de la Fondation Chirac.
Article paru dans l'édition du 17.04.08
Sahel Le début de la faim
C’est l’année d’une absence. La pluie est venue, tôt, un peu. Puis plus rien. «Au moment où le mil faisait ses grains, la pluie s’est arrêtée.» En 1968, l’île a disparu. C’était la première fois et Doulo Fofana avait 21 ans. «A la saison des pluies, Boully, mon village de Mauritanie, c’était un bras de terre entouré d’eau. D’un côté, le marigot de Moïlaha, qui reliait le Sud. De l’autre, le Karakoro, qui poursuivait vers l’Est. Cette année-là, il n’y avait plus d’eau pour entourer le village.» Doulo Fofana était agriculteur, comme ses parents. «Toute mon enfance, j’avais connu la pluie.» Il avait aussi une vingtaine de vaches. «Quand j’étais petit, la maman et le père me racontaient qu’il y avait eu un temps très dur, celui des criquets, qui avaient dévasté les champs. En 1968, les vieux ont dit : "Voilà les moments difficiles revenus."»
Les marabouts du village de Doulo Fofana se sont retirés dans la brousse pour réciter des versets du Coran et demander la pluie. Pourtant, beaucoup d’autres régions du Sahel et beaucoup d’autres villages cette année-là, n’ont rien vu, ou pas grand-chose. Un peu moins de pluie, mais pas d’inquiétude. Les récoltes des cultures plantées en 1967 avaient été bonnes. De quoi faire des réserves. Pour la seconde année consécutive, la FAO [Food and agriculture organization, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, ndlr] est optimiste : «La production alimentaire a nettement progressé en 1967 dans toutes les régions en voie de développement.» La situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture est à un «stade de transition et d’espoir», lit-on dans Jeune Afrique d’octobre. Pourtant, en 1968, les précipitations chutent, pour la première fois depuis 1949, bien au-dessous des moyennes du siècle. 1968 est la première des années blanches, une trentaine en tout, où la pluviométrie sera désespérément basse au Sahel.
«Cette série de sécheresses est la plus grande modification de la précipitation observée dans le monde au XXe siècle, relève le climatologue Jan Polcher. Premiers signes du réchauffement climatique ? Longue fluctuation naturelle du climat ? On tente toujours de le savoir aujourd’hui.» Trois décennies durant lesquelles le monde entreverra par épisodes, sur ses petits écrans, la misère du Sud : squelettes de bêtes ensablées, enfants décharnés, terres craquelées.
Pluviométrie aberrante
L’année 1968, l’agronome et économiste Marc Bied-Charreton s’en souvient très bien. Coopérant à l’Office de la recherche scientifique et technique d’Outre-Mer (Orstom, aujourd’hui Institut de recherche pour le développement), il revenait d’une longue mission en Haute-Volta, l’actuel Burkina Faso. «La rupture climatique, on ne s’en est pas rendu compte tout de suite,rapporte celui qui préside aujourd’hui le Comité scientifique français sur la désertification (CSFD). La pluviométrie africaine a toujours été aberrante, irrégulière. Il a fallu les grandes sécheresses de 1972 à 1974 pour comprendre qu’il s’agissait d’une tendance lourde.» Les décennies 1950 et 1960 étaient humides. Les systèmes agricoles traditionnels suffisaient aux besoins d’une population pas si nombreuse. Culture des terres sur trois ou quatre ans, pour ensuite laisser reposer le sol dans une longue jachère, sept, douze ou quinze ans d’affilée. La végétation renaissait, la matière organique nourrissait à nouveau la terre épuisée. «Mais à partir de 1968, le manque d’eau a fait baisser les rendements. Celui du sorgho par exemple : s’il pleut deux fois moins, la récolte est deux fois moindre. C’est aussi à ce moment que les taux de croissance démographique atteignent 2,5 % à 3 % par an…» Alors les agriculteurs vont cultiver plus de terre, épuisant d’autres sols, déboiser, réduire la jachère. La végétation ne repousse plus, les sols sont nus face à l’érosion du vent. Le processus de dégradation des terres est enclenché. Le mot «désertification», apparu chez les scientifiques dès les années 1940, fait progressivement son entrée dans les médias, dans les discours. La sécheresse débutée en 1968 n’a pas directement causé la désertification - certains experts disent même que cet appauvrissement des sols avait déjà commencé et aurait eu lieu malgré tout -, mais elle l’a révélée, favorisée.
Bagarres pour du maïs
La première vache est morte en 1972. En deux ans, tout le petit troupeau de Doulo Fofana a suivi. «La seule trésorerie qu’on avait, c’était ces animaux.» De toute façon, plus personne n’achète de bêtes. Comment les nourrir ? En quelques mois, le prix des denrées alimentaires a explosé. Au fil des pages de Jeune Afrique, le ton a changé. «Le spectacle est devenu familier à Cotonou. On se bouscule, on se piétine, on se bagarre même pour pouvoir acheter quelques kilos de maïs. La nourriture de base dans le pays est devenue rare. La mesure locale (5 kilos environ) qui coûtait en temps normal 75 à 100 francs CFA s’achète aujourd’hui 750 à 825 francs!» En cette année 1972, le président mauritanien annonce que depuis 1969, son pays a perdu la moitié de son cheptel bovin (1,6 million de têtes), un tiers de ses chameaux et plus de la moitié de ses moutons et chèvres. L’année suivante, les «guetteurs de famine» de la FAO, comme ils sont surnommés, lancent un appel alarmant, relayé par les médias occidentaux : «Six millions d’hommes sont menacés de mort en Afrique.» Un tiers de la population sahélienne. Jeune Afrique écrit : «Un fléau d’un autre âge, la famine, menace hommes et bêtes.»
Le fleuve Sénégal ne connaît pas de crue, on peut à certains endroits le traverser à gué. Au Mali, les sables ont gagné vingt kilomètres en lisière du Sahara. On lit dans les journaux que des hommes ramassent, à la surface des marigots, des nénuphars pour en manger des graines. Qu’ils pilent le son de blé et les graines de coton pour tromper la faim. Qu’ils détruisent les fourmilières pour y récupérer les graines stockées par les fourmis. Les Etats africains se regroupent dans le Comité permanent interétats de lutte contre la sécheresse au Sahel (CILSS). On imagine des ponts aériens reliant la France et l’Afrique, on parle de parachuter des vivres au-dessus des zones les plus difficiles à atteindre.
Le premier souvenir de Ba Diallo - il avait une dizaine d’années -, c’est le lait concentré envoyé de RDA. «Et puis de l’autre côté, on avait le mil rouge amené par les Américains.» Ba Diallo vivait dans la région d’élevage de Mopti, au Mali. Il se souvient aussi des quatre hommes qu’on appelait à la rescousse quand une vache tombait d’épuisement. «Deux de chaque côté pour relever la bête avec des pilons, la mettre debout juste avant qu’elle ne meure, pour l’égorger. Sans quoi, on ne pouvait la manger. L’Islam l’interdit.» Son père, Abou Samba Ouléye Diallo, 77 ans, alors sous-préfet de la région de Mopti, ajoute tout bas : «Certains les mangeaient tout de même, bien sûr.» Ba Diallo se souvient aussi des grands éleveurs peuls qui arrivaient en ville. Ces nomades qui, après avoir perdu leur troupeau, soit toute leur richesse, se faisaient sédentaires.
Doulo Fofana, le Mauritanien, lui, était déjà parti plus loin. En 1972, il est arrivé à Paris. «Dès 1968, je m’étais dit : "Je vais faire l’immigration." Toute ma classe d’âge voulait migrer. Beaucoup l’ont fait à cause de la sécheresse. Certains l’auraient fait de toute façon.» C’est d’un café du XVIII e arrondissement de Paris que ce militant du Groupe de recherche et de réalisations pour le développement durable rural (GRDR) raconte son premier retour au pays, en 1977. De toute la forêt qui, avant, entourait son île, il a pu compter les arbres.
SONYA FAURE LIBERATION QUOTIDIEN : vendredi 18 avril 2008
C’est l’année d’une absence. La pluie est venue, tôt, un peu. Puis plus rien. «Au moment où le mil faisait ses grains, la pluie s’est arrêtée.» En 1968, l’île a disparu. C’était la première fois et Doulo Fofana avait 21 ans. «A la saison des pluies, Boully, mon village de Mauritanie, c’était un bras de terre entouré d’eau. D’un côté, le marigot de Moïlaha, qui reliait le Sud. De l’autre, le Karakoro, qui poursuivait vers l’Est. Cette année-là, il n’y avait plus d’eau pour entourer le village.» Doulo Fofana était agriculteur, comme ses parents. «Toute mon enfance, j’avais connu la pluie.» Il avait aussi une vingtaine de vaches. «Quand j’étais petit, la maman et le père me racontaient qu’il y avait eu un temps très dur, celui des criquets, qui avaient dévasté les champs. En 1968, les vieux ont dit : "Voilà les moments difficiles revenus."»
Les marabouts du village de Doulo Fofana se sont retirés dans la brousse pour réciter des versets du Coran et demander la pluie. Pourtant, beaucoup d’autres régions du Sahel et beaucoup d’autres villages cette année-là, n’ont rien vu, ou pas grand-chose. Un peu moins de pluie, mais pas d’inquiétude. Les récoltes des cultures plantées en 1967 avaient été bonnes. De quoi faire des réserves. Pour la seconde année consécutive, la FAO [Food and agriculture organization, l’Organisation des Nations unies pour l’alimentation et l’agriculture, ndlr] est optimiste : «La production alimentaire a nettement progressé en 1967 dans toutes les régions en voie de développement.» La situation mondiale de l’alimentation et de l’agriculture est à un «stade de transition et d’espoir», lit-on dans Jeune Afrique d’octobre. Pourtant, en 1968, les précipitations chutent, pour la première fois depuis 1949, bien au-dessous des moyennes du siècle. 1968 est la première des années blanches, une trentaine en tout, où la pluviométrie sera désespérément basse au Sahel.
«Cette série de sécheresses est la plus grande modification de la précipitation observée dans le monde au XXe siècle, relève le climatologue Jan Polcher. Premiers signes du réchauffement climatique ? Longue fluctuation naturelle du climat ? On tente toujours de le savoir aujourd’hui.» Trois décennies durant lesquelles le monde entreverra par épisodes, sur ses petits écrans, la misère du Sud : squelettes de bêtes ensablées, enfants décharnés, terres craquelées.
Pluviométrie aberrante
L’année 1968, l’agronome et économiste Marc Bied-Charreton s’en souvient très bien. Coopérant à l’Office de la recherche scientifique et technique d’Outre-Mer (Orstom, aujourd’hui Institut de recherche pour le développement), il revenait d’une longue mission en Haute-Volta, l’actuel Burkina Faso. «La rupture climatique, on ne s’en est pas rendu compte tout de suite,rapporte celui qui préside aujourd’hui le Comité scientifique français sur la désertification (CSFD). La pluviométrie africaine a toujours été aberrante, irrégulière. Il a fallu les grandes sécheresses de 1972 à 1974 pour comprendre qu’il s’agissait d’une tendance lourde.» Les décennies 1950 et 1960 étaient humides. Les systèmes agricoles traditionnels suffisaient aux besoins d’une population pas si nombreuse. Culture des terres sur trois ou quatre ans, pour ensuite laisser reposer le sol dans une longue jachère, sept, douze ou quinze ans d’affilée. La végétation renaissait, la matière organique nourrissait à nouveau la terre épuisée. «Mais à partir de 1968, le manque d’eau a fait baisser les rendements. Celui du sorgho par exemple : s’il pleut deux fois moins, la récolte est deux fois moindre. C’est aussi à ce moment que les taux de croissance démographique atteignent 2,5 % à 3 % par an…» Alors les agriculteurs vont cultiver plus de terre, épuisant d’autres sols, déboiser, réduire la jachère. La végétation ne repousse plus, les sols sont nus face à l’érosion du vent. Le processus de dégradation des terres est enclenché. Le mot «désertification», apparu chez les scientifiques dès les années 1940, fait progressivement son entrée dans les médias, dans les discours. La sécheresse débutée en 1968 n’a pas directement causé la désertification - certains experts disent même que cet appauvrissement des sols avait déjà commencé et aurait eu lieu malgré tout -, mais elle l’a révélée, favorisée.
Bagarres pour du maïs
La première vache est morte en 1972. En deux ans, tout le petit troupeau de Doulo Fofana a suivi. «La seule trésorerie qu’on avait, c’était ces animaux.» De toute façon, plus personne n’achète de bêtes. Comment les nourrir ? En quelques mois, le prix des denrées alimentaires a explosé. Au fil des pages de Jeune Afrique, le ton a changé. «Le spectacle est devenu familier à Cotonou. On se bouscule, on se piétine, on se bagarre même pour pouvoir acheter quelques kilos de maïs. La nourriture de base dans le pays est devenue rare. La mesure locale (5 kilos environ) qui coûtait en temps normal 75 à 100 francs CFA s’achète aujourd’hui 750 à 825 francs!» En cette année 1972, le président mauritanien annonce que depuis 1969, son pays a perdu la moitié de son cheptel bovin (1,6 million de têtes), un tiers de ses chameaux et plus de la moitié de ses moutons et chèvres. L’année suivante, les «guetteurs de famine» de la FAO, comme ils sont surnommés, lancent un appel alarmant, relayé par les médias occidentaux : «Six millions d’hommes sont menacés de mort en Afrique.» Un tiers de la population sahélienne. Jeune Afrique écrit : «Un fléau d’un autre âge, la famine, menace hommes et bêtes.»
Le fleuve Sénégal ne connaît pas de crue, on peut à certains endroits le traverser à gué. Au Mali, les sables ont gagné vingt kilomètres en lisière du Sahara. On lit dans les journaux que des hommes ramassent, à la surface des marigots, des nénuphars pour en manger des graines. Qu’ils pilent le son de blé et les graines de coton pour tromper la faim. Qu’ils détruisent les fourmilières pour y récupérer les graines stockées par les fourmis. Les Etats africains se regroupent dans le Comité permanent interétats de lutte contre la sécheresse au Sahel (CILSS). On imagine des ponts aériens reliant la France et l’Afrique, on parle de parachuter des vivres au-dessus des zones les plus difficiles à atteindre.
Le premier souvenir de Ba Diallo - il avait une dizaine d’années -, c’est le lait concentré envoyé de RDA. «Et puis de l’autre côté, on avait le mil rouge amené par les Américains.» Ba Diallo vivait dans la région d’élevage de Mopti, au Mali. Il se souvient aussi des quatre hommes qu’on appelait à la rescousse quand une vache tombait d’épuisement. «Deux de chaque côté pour relever la bête avec des pilons, la mettre debout juste avant qu’elle ne meure, pour l’égorger. Sans quoi, on ne pouvait la manger. L’Islam l’interdit.» Son père, Abou Samba Ouléye Diallo, 77 ans, alors sous-préfet de la région de Mopti, ajoute tout bas : «Certains les mangeaient tout de même, bien sûr.» Ba Diallo se souvient aussi des grands éleveurs peuls qui arrivaient en ville. Ces nomades qui, après avoir perdu leur troupeau, soit toute leur richesse, se faisaient sédentaires.
Doulo Fofana, le Mauritanien, lui, était déjà parti plus loin. En 1972, il est arrivé à Paris. «Dès 1968, je m’étais dit : "Je vais faire l’immigration." Toute ma classe d’âge voulait migrer. Beaucoup l’ont fait à cause de la sécheresse. Certains l’auraient fait de toute façon.» C’est d’un café du XVIII e arrondissement de Paris que ce militant du Groupe de recherche et de réalisations pour le développement durable rural (GRDR) raconte son premier retour au pays, en 1977. De toute la forêt qui, avant, entourait son île, il a pu compter les arbres.
SONYA FAURE LIBERATION QUOTIDIEN : vendredi 18 avril 2008
On a longtemps mélangé sécheresse et désertification»
Patrice Burger est animateur de la plateforme française des acteurs de la lutte contre la désertification.
Est-ce qu’en 1968, l’opinion publique prend déjà conscience de l’importance des dérèglements climatiques ?
A l’époque, on ne faisait pas encore le lien entre la sécheresse et les questions climatiques globales dont on parle aujourd’hui. Les images de la famine de 1973 sont la première irruption à la table de Monsieur Tout-le-Monde de quelque chose qu’on n’a pas l’habitude de voir. Mais on mélangeait sécheresse et désertification, et on découvrait en même temps la pauvreté. Tout cela semblait lointain. C’était l’affaire des Africains, des pauvres... Le véritable choc arrivera plutôt avec la sécheresse au Sahel de 1984, qui fera 300 000 morts.
Et les pouvoirs publics ?
Les décideurs ont, dans les années 70, commencé à prendre conscience du lien entre les dérèglements climatiques et l’activité humaine, la croissance démographique, les systèmes agricoles... C’est une remise en cause totale : opinion publique et institutions sont longtemps restées sur le mythe d’un écosystème statique ; sur le modèle du Nord, le monde entier allait progressivement se développer dans un environnement naturel qui resterait le même. On ne prenait pas en compte les rétroactions de l’activité humaine. En 1972, cette vision est battue en brèche par le rapport du Club de Rome, baptisé Halte à la croissance ?, qui provoque beaucoup de controverses. Puis en 1977 a lieu la première conférence des Nations unies sur la désertification, à Nairobi au Kenya. Le processus institutionnel est lancé, qui mènera au Sommet de la Terre, à Rio de Janeiro en 1992. Il n’empêche qu’à l’ONU, la lutte contre la désertification ne sera pas dotée des mêmes moyens que ceux qu’on octroie au réchauffement climatique et à la biodiversité.
Le fait qu’aujourd’hui, même des pays riches soient victimes de la désertification va-t-il changer quelque chose ?
A Madrid, en septembre, l’Espagne a ouvert la Conférence internationale pour la lutte contre la désertification, en affirmant qu’un tiers de son territoire était touché ! Il ne s’agit pas de l’apparition de déserts de sable bien sûr, mais d’une dégradation des terres qui peut, un jour, mener à l’appauvrissement irréversible du sol. Le Nord a compris que la désertification ne touchait pas que les Etats victimes de sécheresse. D’une part, parce que de plus en plus de chercheurs font le lien entre désertification et réchauffement de la planète. Mais aussi parce que les habitants des pays où la désertification sévit le plus migrent vers les pays du Nord.
Patrice Burger. Spécialiste de la désertification Recueilli par S.F. LIBERATION QUOTIDIEN : vendredi 18 avril 2008
Patrice Burger est animateur de la plateforme française des acteurs de la lutte contre la désertification.
Est-ce qu’en 1968, l’opinion publique prend déjà conscience de l’importance des dérèglements climatiques ?
A l’époque, on ne faisait pas encore le lien entre la sécheresse et les questions climatiques globales dont on parle aujourd’hui. Les images de la famine de 1973 sont la première irruption à la table de Monsieur Tout-le-Monde de quelque chose qu’on n’a pas l’habitude de voir. Mais on mélangeait sécheresse et désertification, et on découvrait en même temps la pauvreté. Tout cela semblait lointain. C’était l’affaire des Africains, des pauvres... Le véritable choc arrivera plutôt avec la sécheresse au Sahel de 1984, qui fera 300 000 morts.
Et les pouvoirs publics ?
Les décideurs ont, dans les années 70, commencé à prendre conscience du lien entre les dérèglements climatiques et l’activité humaine, la croissance démographique, les systèmes agricoles... C’est une remise en cause totale : opinion publique et institutions sont longtemps restées sur le mythe d’un écosystème statique ; sur le modèle du Nord, le monde entier allait progressivement se développer dans un environnement naturel qui resterait le même. On ne prenait pas en compte les rétroactions de l’activité humaine. En 1972, cette vision est battue en brèche par le rapport du Club de Rome, baptisé Halte à la croissance ?, qui provoque beaucoup de controverses. Puis en 1977 a lieu la première conférence des Nations unies sur la désertification, à Nairobi au Kenya. Le processus institutionnel est lancé, qui mènera au Sommet de la Terre, à Rio de Janeiro en 1992. Il n’empêche qu’à l’ONU, la lutte contre la désertification ne sera pas dotée des mêmes moyens que ceux qu’on octroie au réchauffement climatique et à la biodiversité.
Le fait qu’aujourd’hui, même des pays riches soient victimes de la désertification va-t-il changer quelque chose ?
A Madrid, en septembre, l’Espagne a ouvert la Conférence internationale pour la lutte contre la désertification, en affirmant qu’un tiers de son territoire était touché ! Il ne s’agit pas de l’apparition de déserts de sable bien sûr, mais d’une dégradation des terres qui peut, un jour, mener à l’appauvrissement irréversible du sol. Le Nord a compris que la désertification ne touchait pas que les Etats victimes de sécheresse. D’une part, parce que de plus en plus de chercheurs font le lien entre désertification et réchauffement de la planète. Mais aussi parce que les habitants des pays où la désertification sévit le plus migrent vers les pays du Nord.
Patrice Burger. Spécialiste de la désertification Recueilli par S.F. LIBERATION QUOTIDIEN : vendredi 18 avril 2008
17 avr. 2008
POUTINE/KADHAFI
Visite inédite de Poutine en Libye
Le président russe Vladimir Poutine est arrivé mercredi soir à Tripoli pour une visite en Libye sans précédent suite à une invitation du leader libyen
Mouammar Kadhafi, a rapporté l'agence libyenne JANA. JANA qui a qualifié cette visite comme historique, a souligné que "le guide de la révolution libyenne a accueilli son hôte devant sa maison, qui témoigne l'échec de l'agression américano- OTAN contre la Libye, en 1986". Poutine est accompagné durant cette visite, la première du genre d'un président russe depuis 1985, par Alexeï Koudrine, vice- premier ministre et ministre russe des Finances, et d'Anatoli Issaïkine, PDG de l'exportateur officiel d'armes russes Rosoboronexport. Selon une source libyenne, Poutine devait rencontrer le leader libyen Mouammar Kadhafi mercredi soir, et il s'entretiendra également avec d'autres responsables du gouvernement libyen pour discuter des relations bilatérales et des questions d'intérêt commun. Les entretiens de Poutine avec les responsables libyens "seront dominée par les dossiers des ventes d'armement, de l'énergie et la question des dettes de Tripoli", a indiqué la presse russe. "La visite de Vladimir Poutine en Libye pourrait potentiellement assurer à la Russie des contrats de livraison d'armes pour presque 3 milliards de dollars", lit-on mardi dans le quotidien russe Vedomosti. Le quotidien Vedomosti prévoie la livraison de 12 nouveaux chasseurs SU-35 et de systèmes de missiles de DCA courte portée Tor-M2E, ainsi que des travaux de réparation et la vente de pièces détachées et de munitions pour des armements datant de l'ex-URSS. De son coté, l'agence Interfax a évoqué aussi d'autres intérêts de la Russie en Libye, surtout dans le domaine de l'énergie, puisqu'en 2007, le géant gazier russe Gazprom avait remporté un appel d'offres pour l'exploitation d'un champ pétrolier dont les réserves étaient estimées à 20 millions de tonnes de pétrole. Il est à noter que la Libye était un important partenaire de l'ancienne URSS et un bon client d'armes soviétiques. Mais les relations entre les deux pays se sont essoufflées après l'éclatement du bloc soviétique. Le volume des échanges commerciaux entre les deux pays est estimé actuellement à environ 200 millions de dollars par an, contre un milliard de dollars à l'époque soviétique.
(Xinhuanet 17/04/2008) TUNIS
Le président russe Vladimir Poutine est arrivé mercredi soir à Tripoli pour une visite en Libye sans précédent suite à une invitation du leader libyen

(Xinhuanet 17/04/2008) TUNIS
16 avr. 2008
LE MALI, L’UN DES PIONNIERS
Stratégie nationale de sécurité alimentaire surAfribone.com
Le Mali, l’un des pionniers dans les pays membres du CILSS
A l’initiative du Commissariat à la Sécurité Alimentaire (CSA), la salle de conférence de la Direction Générale de la Dette publique abrite du 14 au 16 avril 2008 un atelier national sur les indicateurs de sécurité alimentaire et la mise en place du dispositif de suivi-évaluation de la Stratégie Nationale de Sécurité Alimentaire (SNSA).
La cérémonie d’ouverture des travaux était présidée par Mme Lansry Nana Yaya Haïdara, Commissaire à la Sécurité Alimentaire. Le CILSS était représenté par M. Sadio Traoré, Directeur général de l’Institut du Sahel.
Il s’agira, au cours de cet atelier de trois jours, de partager avec les participants les indicateurs contenus dans le tableau de bord, présenter et valider une proposition de dispositif de pilotage et de suivi-évalutation de la Stratégie Nationale de Sécurité Alimentaire (SNSA) en précisant les acteurs et leurs responsabilités.
ETAT DES LIEUX
Dans le cadre du processus Sahel 21 engagé depuis 1999, le Comité Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS) a élaboré le Cadre Stratégique de Sécurité Alimentaire (CSSA) dans une perspective de lutte contre la pauvreté.
Le Mali, à l’instar des autres pays du CILSS, a élaboré sa Stratégie Nationale de Sécurité Alimentaire (SNSA). Dans une logique de rendre opérationnel le CSSA, le CILSS a élaboré une Stratégie Opérationnelle de Sécurité Alimentaire Régionale (SOSAR) dont l’un des volets est « la promotion de la bonne gouvernance de Sécurité Alimentaire ».
Les actions entreprises dans ce sens se résument en trois volets: la mise en place de structures appropriées au niveau national et régional (Conseil National de Sécurité Alimentaire -CNSA- et Conseil Régional de Sécurité Alimentaire -CORESA); l’élaboration et la validation d’un tableau de bord des indicateurs nationaux et régionaux de sécurité alimentaire; l’appui à la mise en place et au fonctionnement d’un dispositif de suivi-évaluation des stratégies nationales de sécurité alimentaire.
Après la tenue de l’atelier technique régional en Avril 2007 à Bamako, qui a validé le tableau de bord des indicateurs de sécurité alimentaire, il s’agira pour le présent atelier qui durera 3 jours, de valider les indicateurs sélectionnés aux niveaux régional et national afin de déclencher les actions d’accompagnement à mettre en oeuvre pour leur documentation.
Le Mali fait partie des pionniers dans les pays membres du Comité Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS) en matière d’élaboration et de mise en oeuvre de politique nationale de sécurité alimentaire. Après le Burkina Faso, notre pays est le deuxième à organiser son atelier national de restitution en exécution de la recommandation de l’atelier régional du CILSS.
Déjà, un atelier technique régional de validation du tableau de bord des indicateurs de sécurité alimentaire a été organisé les 16 et 17 avril 2007 à Bamako auquel tous les pays membres du CILSS ont participé.
Selon Mme Lansry Nana Yaya Haïdara, la tenue des ateliers nationaux permettra le démarrage effectif des opérations de collecte et la fourniture régulière de rapports dans le cadre de la mise en place et de l’animation d’un dispositif de suivi-évaluation de la stratégie régionale et des stratégies nationales dans les différents pays.
“Je puis vous assurer que le Mali est très heureux et fier d’avoir eu l’opportunité d’organiser cet atelier car, l’opérationnalisation d’un dispositif de suivi-évaluation performant est aujourd’hui au centre des préoccupations non seulement du CSA en tant que service chargé d’assurer la mise en oeuvre de la politique nationale de sécurité alimentaire, mais aussi des autorités et instances en charge du pilotage de la politique et des programmes de sécurité alimentaire du pays”, a conclu Mme le commissaire à la Sécurité Alimentaire.
Daba Balla KEITA 15 avril 2008.
Le Mali, l’un des pionniers dans les pays membres du CILSS
A l’initiative du Commissariat à la Sécurité Alimentaire (CSA), la salle de conférence de la Direction Générale de la Dette publique abrite du 14 au 16 avril 2008 un atelier national sur les indicateurs de sécurité alimentaire et la mise en place du dispositif de suivi-évaluation de la Stratégie Nationale de Sécurité Alimentaire (SNSA).
La cérémonie d’ouverture des travaux était présidée par Mme Lansry Nana Yaya Haïdara, Commissaire à la Sécurité Alimentaire. Le CILSS était représenté par M. Sadio Traoré, Directeur général de l’Institut du Sahel.
Il s’agira, au cours de cet atelier de trois jours, de partager avec les participants les indicateurs contenus dans le tableau de bord, présenter et valider une proposition de dispositif de pilotage et de suivi-évalutation de la Stratégie Nationale de Sécurité Alimentaire (SNSA) en précisant les acteurs et leurs responsabilités.
ETAT DES LIEUX
Dans le cadre du processus Sahel 21 engagé depuis 1999, le Comité Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS) a élaboré le Cadre Stratégique de Sécurité Alimentaire (CSSA) dans une perspective de lutte contre la pauvreté.
Le Mali, à l’instar des autres pays du CILSS, a élaboré sa Stratégie Nationale de Sécurité Alimentaire (SNSA). Dans une logique de rendre opérationnel le CSSA, le CILSS a élaboré une Stratégie Opérationnelle de Sécurité Alimentaire Régionale (SOSAR) dont l’un des volets est « la promotion de la bonne gouvernance de Sécurité Alimentaire ».
Les actions entreprises dans ce sens se résument en trois volets: la mise en place de structures appropriées au niveau national et régional (Conseil National de Sécurité Alimentaire -CNSA- et Conseil Régional de Sécurité Alimentaire -CORESA); l’élaboration et la validation d’un tableau de bord des indicateurs nationaux et régionaux de sécurité alimentaire; l’appui à la mise en place et au fonctionnement d’un dispositif de suivi-évaluation des stratégies nationales de sécurité alimentaire.
Après la tenue de l’atelier technique régional en Avril 2007 à Bamako, qui a validé le tableau de bord des indicateurs de sécurité alimentaire, il s’agira pour le présent atelier qui durera 3 jours, de valider les indicateurs sélectionnés aux niveaux régional et national afin de déclencher les actions d’accompagnement à mettre en oeuvre pour leur documentation.
Le Mali fait partie des pionniers dans les pays membres du Comité Inter-Etats de Lutte contre la Sécheresse au Sahel (CILSS) en matière d’élaboration et de mise en oeuvre de politique nationale de sécurité alimentaire. Après le Burkina Faso, notre pays est le deuxième à organiser son atelier national de restitution en exécution de la recommandation de l’atelier régional du CILSS.
Déjà, un atelier technique régional de validation du tableau de bord des indicateurs de sécurité alimentaire a été organisé les 16 et 17 avril 2007 à Bamako auquel tous les pays membres du CILSS ont participé.
Selon Mme Lansry Nana Yaya Haïdara, la tenue des ateliers nationaux permettra le démarrage effectif des opérations de collecte et la fourniture régulière de rapports dans le cadre de la mise en place et de l’animation d’un dispositif de suivi-évaluation de la stratégie régionale et des stratégies nationales dans les différents pays.
“Je puis vous assurer que le Mali est très heureux et fier d’avoir eu l’opportunité d’organiser cet atelier car, l’opérationnalisation d’un dispositif de suivi-évaluation performant est aujourd’hui au centre des préoccupations non seulement du CSA en tant que service chargé d’assurer la mise en oeuvre de la politique nationale de sécurité alimentaire, mais aussi des autorités et instances en charge du pilotage de la politique et des programmes de sécurité alimentaire du pays”, a conclu Mme le commissaire à la Sécurité Alimentaire.
Daba Balla KEITA 15 avril 2008.
15 avr. 2008
Réunion du Comité inter-Etats de lutte contre la sécheresse au Sahel - Temoust - Survie touarègue
Réunion du Comité inter-Etats de lutte contre la sécheresse au Sahel
Nouakchott (PANA via Mauritanie-web ) - Le ministre mauritanien de l’Agriculture et de l’Elevage, Korera Isagha, a présidé lundi à Nouakchott, la cérémonie d’ouverture de la 14ème réunion de suivi du Comité inter Etats de lutte contre la sécheresse au Sahel (CILSS), en présence de nombreux délégués représentant les différents pays de l’organisation, a appris la PANA, de sources officielles.
Les travaux de cette rencontre vont durer 3 jours. La réunion prépare l’organisation de la 42ème session ordinaire du conseil des ministres du CILSS, prévue à Nouakchott à partir du 18 avril.
A l’ordre du jour de cette 14ème réunion préparatoire, figurent le rapport du secrétaire exécutif, le rapport général de l’organisation pour l’année 2007, les projets, plan d’opération et le budget pour l’année 2008.
A signaler que la réunion de Nouakchott intervient dans un contexte sous-régional et international marqué par une forte menace de l’insécurité alimentaire, due à plusieurs facteurs combinés : aléas climatiques, marché international, hausse du prix du pétrole, baisse du dollar...
Le CILSS, qui regroupe 9 pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre (Burkina Faso, Cap-Vert, Gambie, Guinée-Bissau, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad), a pour mission de garantir la sécurité alimentaire dans l’espace du Sahel.
Nouakchott (PANA via Mauritanie-web ) - Le ministre mauritanien de l’Agriculture et de l’Elevage, Korera Isagha, a présidé lundi à Nouakchott, la cérémonie d’ouverture de la 14ème réunion de suivi du Comité inter Etats de lutte contre la sécheresse au Sahel (CILSS), en présence de nombreux délégués représentant les différents pays de l’organisation, a appris la PANA, de sources officielles.
Les travaux de cette rencontre vont durer 3 jours. La réunion prépare l’organisation de la 42ème session ordinaire du conseil des ministres du CILSS, prévue à Nouakchott à partir du 18 avril.
A l’ordre du jour de cette 14ème réunion préparatoire, figurent le rapport du secrétaire exécutif, le rapport général de l’organisation pour l’année 2007, les projets, plan d’opération et le budget pour l’année 2008.
A signaler que la réunion de Nouakchott intervient dans un contexte sous-régional et international marqué par une forte menace de l’insécurité alimentaire, due à plusieurs facteurs combinés : aléas climatiques, marché international, hausse du prix du pétrole, baisse du dollar...
Le CILSS, qui regroupe 9 pays d’Afrique de l’Ouest et du Centre (Burkina Faso, Cap-Vert, Gambie, Guinée-Bissau, Mali, Mauritanie, Niger, Sénégal, Tchad), a pour mission de garantir la sécurité alimentaire dans l’espace du Sahel.
8 avr. 2008
L'histoire du SaharA... LIRE LA SUITE....
Les Anciens, peu soucieux d'ethnographie, de toute façon mal armés conceptuellement pour aborder des cultures différentes des leurs, nous ont si mal renseignés sur leurs Libyens, Garamantes, Éthiopiens, que leur connaissance doit s'appuyer surtout sur l'archéologie. Au moins peut-on comprendre que les peuples des deux rives de cette Méditerranée de sable et de cailloux s'y soient croisés et mêlés de longue date. A l'ouest du Sahara, les Almoravides, venus du Sud, fondèrent le premier empire des deux rives, entre le Niger et la mer Méditerranée au XIe siècle; l'empire Songhaï empiétera ensuite sur l'empire du Maroc au début du XVIe siècle; au XVIIe siècle, le Grand Maroc c'est-à-dire la zone d'influence de l'empire chérifien, s'étend jusqu'à Djenné, Tombouctou et Gao. A la même époque, le Bornou s'étend jusque au Fezzan. Au bout du compte cependant, la prépondérance est revenue à trois groupes de populations proprement sahariennes : il s'agit, au Sud du Fezzan et dans la région du Tibesti, des Toubous (ou Teda), une population parlant une langue nilo-saharienne proche du Kanuri, des Maures, à l'Ouest, qui sont des Arabo-Berbères et, surtout des Berbères Touareg au centre du Sahara.
Le Sahara a été l'objet des ambitions coloniales de la France à partir des années 1880 et se voyait intégrer, sur le papier, à l'Afrique occidentale française (AOF) en 1884. avant d'être reconnu possession française en 1890, par une convention signée avec le Royaume-Uni. La construction d'une série de forts servant de points d'appui aux troupes armées a permis ensuite en quelques années le contrôle presque complet de tout cet espace - seules quelques poches de résistance touareg et la Mauritanie devront attendre le début du XXe siècle pour se voir soumises. Ajoutons que deux autres puissance européennes ont égalent colonisé le Sahara : l'Espagne, d'abord, qui avait pris pied à l'Ouest du Sahara, dans la région du Rio de Oro, dès les années 1860, et l'Italie, engagée en Libye dans une guerre contre la Turquie qu'elle gagne en 1912, puis, qui en 1935, sous Mussolini, investit tout l'arrière-pays saharien jusqu'au Tchad, contestant à la France la bande d'Aouzou. A partir des années 1950 et jusqu'en 1975, la décolonisation aboutit au découpage du Sahara qui se trouve réparti entre plusieurs nouveaux États. Un partage qui se fait au détriment des populations sahariennes, d'où une partie des conflits qu'on a pu observer dans la région au cours des décennies suivantes.
Dates clés :
5500 - 3000 av. J.-C. - Invention de la céramique; domestication et élevage des bovins dans la région des massifs (Aïr, Adrar, Tibesti, Hoggar).
XIe siècle - Islamisation du Sahara.
1890. - Accord Franco-anglais sur le Sahara.
1894 - Prise de Tombouctou par les troupes françaises.
Années 1950 - Début de la décolonisation.
Les Touareg
Les Touareg (au singulier Targui, de l'arabe Tergab = race) constituent la population emblématique du Sahara central. Les Touareg ont le teint bronzé, les cheveux longs, lisses et noirs, la barbe noire et rare, les yeux noirs, rarement bleus, le nez petit, les mains petites, les membres musculeux, la taille haute. Nominalement musulmans, ils ne jeûnent pas, ne font pas les ablutions régulières, ne saignent pas les animaux. Ils sont traditionnellement armés du sabre, de la lame, d'un couteau et souvent d'un bouclier; l'usage du fusil s'est généralisé; ils sont vêtus d'une tunique généralement noire, blanche chez quelques tribus, d'un pantalon, d'une ceinture de laine, d'un turban dont un bout est ramené de façon à voiler la figure, ne laissant apercevoir que les yeux; ce voile ou litham est caractéristique; il abrite les voies respiratoires du sable. Les chefs portent souvent le burnous; la mode a longtemps été d'avoir la moustache longue et la tête rasée, sauf une tresse. La nourriture est le lait et la viande des troupeaux de moutons et de chameaux; le revenu tiré des caravanes qu'ils escortent et, jadis tout une tradition de razzias, leur permet d'ajouter au produit de leurs troupeaux pour se procurer des dattes, des grains, des armes et des objets manufactures dans les oasis du Nord et sur les marchés du Sahel. Ils circulent à dos de chameau, mais en descendent pour le combat. Les femmes sont très libres, et la filiation se définit par la ligne maternelle. La langue des Touareg, le tamachek, appartient au groupe de langues afrasiennes et est celui des dialectes berbères, qui est demeuré le plus imperméable aux éléments arabes. Ils ont une écriture, le tifinrah (singulier tafanek = lettre) qui se retrouve sur des inscriptions rupestres et de nombreux monuments du Nord de l'Afrique; on la rapproche des alphabets punique et himyarite.
Au cours de l'histoire, on les trouve traditionnellement regroupés en quatre confédérations ayant chacune pour centre un massif montagneux, abri de ses troupeaux et de ses tentes, et d'où ils rayonnent dans le désert et sur les routes qui mènent aux pays où ils se ravitaillent Touat au Nord-Ouest, Ghadamèset Ghat au Nord-Est, Tombouctou au Sud-Ouest, Zinder au Sud-Est. Les Touareg du Nord, les moins nombreux parce qu'ils n'accèdent qu'aux oasis et non comme ceux du Sud aux fertiles terres légères qui bordent le Sahel, sont répartis entre les confédérations des Azdjer (Azgar) à l'Est, des Hoggar (Ahggar) à l'Ouest. Les Azdjer (Ajjer) commerçant avec Ghat et Ghadamès, se sont progressivement sédentarisés; ils possèdent un faubourg de Ghadamès, la seule zaouia touareg à Temassinin, quelques-uns se sont établis au Fezzan et à Ghat. Ils ont un cheikh héréditaire, l'amrhar. La famille des lmanân a à sa tête l'amenokal, suzerain nominal de tous les Touareg du Nord; son pouvoir a été abattu il y a plus de trois siècles avec le concours de la tribu des Aouraghen, et les deux confédérations sont morcelées en tribus qui, de fait, sont autonomes. Ces tribus sont, les unes nobles (ihaggaren), les autres serves (imrhad); il faut ajouter à coté des nobles les tribus maraboutiques et certaines tribus mixtes. Chez les Azdjer, les tribus nobles sont les Imanan, anciens chefs religieux et politiques, les Aouraghen, issus des Awrigba, tribu berbère refoulée du littoral dans le désert par les Arabes et qui a peut-être donné son nom à l'Afrique; les lmanrhasaten, les KelIzhabân, les Imettrilalen et les lhaddaren : les tribus maraboutiques sont les Ifoghas et les lhehaouen.
Les Hoggar, séparés des Azdjer par la dépression de l'Igharghar, se ravitaillent surtout à ln-Salah. Ils ne comprennent que des tribus nobles et des serfs; ils sont très morcelés; leur centre est, dans le massif Hoggar, la région d'Idelès; ce sont ceux qui, à l'époque de la colonisation, se montreront les plus hostiles à la France. A l'Ouest, il s'est détaché de leur confédération un groupe établi dans le massif de l'Ahenet et formé de la tribu des Taïtoq, de celle des Tedjeké Nousidi et de dix-neuf tribus serves ou alliées; ils nomadisent au Sud jusqu'à Taodeni et au Soudan; les Ajjer et Hoggar ne dépassent guère au Sud-Est. Asiou, qui forme, avec le point plus occidental de Timissao, la limite coutumière entre eux et les Touareg du Sud.
Les Touareg du Sud sont beaucoup plus nombreux, évalués à 60 000 (?) pour les Keloui à l'Est, le double pour les Aouelimmiden à l'Ouest. Les Keloui vivent dans l'oasis d'Aïr et se rattachent aux Aouraghen; ils sont presque sédentaires, habitent des huttes et non des tentes; ils ont jadis enlevé l'oasis aux Noirs et se sont métissés avec eux. Au Sud de l'Aïr est le groupe des Kel-Guérès et des Itissan, tribus refoulées par les Keloui (ce sont des cavaliers), à la différence des Touareg précédents qui ne montent guère qu'à dos de chameau. Les Aouelimmiden, dont la forteresse naturelle est le massif de l'Adrar oriental, sont les plus puissants des Touareg, ils étaient maîtres de tout le coude du Niger et s'étendaient bien au Sud du fleuve, lorsque les Français se sont emparés de ces régions au XIXe siècle. On les rattache à la grande nation berbère des Lemta; venus de l'Ouest, ils auraient refoulé les Tademekkés et abattu l'empire songhaï. Ils sont sous l'influence maraboutique des Bekkaya de Tombouctou, se divisent en nobles et imrhad et vivent sous la tente.
Le passé touareg. L'histoire des Berbères sahariens est mal connue; le nom de Touareg est celui que leur donnent les Arabes; eux-mêmes s'appellent Imoharh, nom national des Berbères. Les documents fournis par les écrivains antiques ne permettent pas encore de rattacher clairement aux peuples actuels ceux qu'ils mentionnent dans le désert Libyque, Garamantes, Éthiopiens blancs, etc.
Les Touareg descendent principalement de tribus berbères refoulées dans le désert par la grande invasion arabe hillalienne du XIe siècle; auparavant, les Targa habitaient le Maghreb et la région de Sidjilmessa, au Sud de l'Atlas marocain. Ibn Khaldoun, au XIVe siècle, les place dans le désert au Sud de la Tunisie; les Lemta, plus à l'Ouest, au Sud des Riah du Zab; puis les Messoufa, les Lemtouna, au Sud du Sahara marocain, et enfin les Gueddala, les plus occidentaux des Berbères du désert, guerriers voilés du litham.
Au XVIe siècle, Léon l'Africain énumère, d'Est en Ouest : les Berdoa (auj. tribu du Tibesti), entre Aoudjelah et le Bornou; les Lemta, entre la route du Fezzan à Kano et les oasis de Ghadamès et Ouargla; les Targa, entre l'Aïr, le Mzab et le Touat; les Zouenziga, de l'Aïr à Tombouctou; enfin les Sanhadja, au Nord-Ouest de Tombouctou; ceux-ci se sont fondus avec les Maures du Sahara occidental, comme les Berdoa avec les Toubou; les trois autres tribus correspondent aux Touareg actuels.
Échanges Nord-Sud
Avec la période d'expansion de l'Islam commence un « processus » nouveau : les Arabes envahissent, d'abord infinitésimalement le Sahara, puis en plus grand nombre; ils entrent en lutte d'influence avec les Berbères, et c'est longtemps un flux et un reflux continuels; enfin, dans ce combat toujours renouvelé, la victoire demeure indécise : le triomphe reste aux Berbères, qui sont bien toujours la population la plus solidement implantée au Sahara, mais le triomphe social est aux Arabes, dont Ia langue, la religion, les idées et institutions l'emportent décidément.
L'occupation arabe du Sahara offre sans doute des caractères divers. Cependant, ses traits essentiels ne se trouvent pas altérés par la forme locale quelle a pu revêtir. Au début, elle s'est effectuée par une infiltration lente. Les Arabes, jusqu'au Ve siècle de l'hégire, ont été surtout des missionnaires de l'Islam. A peine ont-ils formé de petites colonies dans quelques centres. Interrompu par le soulèvement des Berbères du Maghreb et les conquêtes des Almoravides, le mouvement commencé a repris avec une intensité nouvelle, et sous forme d'invasion, par l'exode des tribus hymiarites d'Égypte au XIe siècle. Lancées par les califes fatimides contre leurs sujets révoltés de l'Afrique du Nord, elles s'y dispersèrent. Celles qui occupent aujourd'hui le Sahara y étaient arrivées pour la plupart dès le XIIIe siècle. Elles eurent à soutenir des luttes souvent acharnées pour s'imposer à la fin aux autochtones. En se mélangeant aux populations berbères, dont quelques-unes à peine conservèrent leur indépendance, elles ont formé une population nouvelle essentiellement métisse, mais dans laquelle le premier rang appartiendra, sous le rapport politique, aux fractions dont la descendance arabe s'est maintenue la plus intacte. A côté des tribus ainsi constituées, et où les familles dites Hassan, de sang pur, dominent les fractions plus mélangées, vivront, sur un pied d'égalité, quelques groupes berbères, descendants directs des anciennes branches souveraines des Sanhadja sahariens ou des premiers Morabethyn (= Almoravides). Les autres rameaux de la population primitive, restés rétifs à tout métissage, formera une caste vassale de la première, les Hassan.
En outre, contemporaine de l'invasion arabe, il s'est produit, du XIe au XIIIe siècle, une immigration de Berbères fixés d'abord sur la limite septentrionale du Sahara. Quelques fractions maraboutiques ont gardé leur autonomie pendant que les autres se métissaient ou subissaient à leur tour la suprématie des maîtres du pays. Tels sont les éléments constitutifs de la population actuelle du Sahara. Mais, indépendamment de quelques migrations temporaires ou plus récentes qui, aux XVIIe et XVIIIe siècles, ont légèrement accru l'importance numérique de l'élément arabe, il y a lieu de faire la part d'un courant de relations très suivies, établies pendant la même période entre l'empire du Maroc et la vallée du Niger septentrional. La conquête de Rouma, faite au nom et pour le compte des sultans de Fès, n'a pas eu d'influence durable sur les destinées politiques de la région. Mais si momentanée qu'ait été l'occupation marocaine, elle n'en a pas moins suffi pour déterminer des rapports suivis entre le Maroc et la zone frontière du Soudan occidental : ces rapports, qu'ont resserrés encore les alliances contractées par les soldats de Djedar et leurs descendants, se sont maintenus jusqu'à l'époque coloniale. Ils ont été assez importants pour donner droit de cité aux Chorfa de Fès, dans tout le moyen Niger.
Pendant que le Sahara devenait un champ clos entre les populations d'origine arabe et celles d'origine berbère, et que les unes et les autres agissaient dans le Soudan septentrional, tant comme guerriers que missionnaires de l'Islam, et y répandaient peu à peu le domaine de la religion musulmane et celui de la langue arabe, les Soudaniens envahissaient, eux aussi, de temps en temps, le Sahara. De grands empires subsahariens ont ainsi dominé certaines parties du désert : l'empire de Ghana, fondé par Soninké ou Asouanek, domina de vastes régions du Soudan occidental. Plus tard, les Mandé (Mandingues, Malinkés), étendirent, au XIIIe siècle, leur pouvoir sur le désert, de Tombouctou (Mali) jusqu'au Touat (en Algérie). Après quoi, les Songhaï, ayant leur capitale à Gao, riveraine du Niger, annexèrent aussi de grands morceaux du Sahara, jusqu'à toucher le Maroc et l'Algérie. Ces invasions, ajoutées à la traite des esclaves fixa dans les oasis sahariennes de plus en plus de populations d'origine subsaharienne jusqu'à la fin du XIXe siècle, pratiquement.
La colonisation
Les rivalités nationales entre les grandes puissances européennes à partir des deux dernières décennies du XIXe siècle ont trouvé dans l'Afrique un champ de bataille privilégié. La politique d'expansion menée ainsi par la France au Sahara à cette époque est d'ordre stratégique : elle s'explique davantage par le souci de damer le pion aux autres puissances en occupant le terrain que par l'idée, par exemple, qu'il y aurait eu là des ressources à exploiter. Il s'agissait donc d'établir une continuité de territoire entre l'Algérie (au Nord de Ghardaïa), où la France était présente depuis 1830, et les possessions françaises en Afrique Subsahariennes, au Sénégal et dans le Golfe de Guinée. En 1890, une convention avec l'Angleterre reconnut aux Français la possession du Sahara entre l'Algérie-Tunisie d'une part, le Niger et le lac Tchad, d'autre part; dès lors, et avec plus d'esprit de suite qu'auparavant, la France s'occupa d'entrer réellement en possession des territoires venus dans sa sphère de domination en Sahara et en Soudan. Ses tentatives, presque toutes couronnées de succès, eurent pour lieux de départ, au Nord l'Algérie, au Sud-Ouest le Sénégal, au Sud le Congo. Ce grand espace prendra, à partir de 1904, le nom d'Afrique occidentale française (A.O.F).
Le Nord. Les expéditions visant plus spécialement le Sahara s'organisèrent naturellement en Algérie. Tout d'abord, les Français avancèrent vers le Sud la ligne des postes du Sahara d'Algérie, qui, de l'Est à l'Ouest, étaient : El-Oued, dans le Souf; Biskra, dans les Ziban; Touggourt, dans l'Oued-Rir; Ghardaïa, dans le pavs des Béni-Mzab; Ouargla, dans la dépression où s'unissent les bas-fonds de l'oued Mia et de la chebka du Mzab, Laghouat, en arrière de Ghardaïa; El-Goléa, en avant d'Ouargla, sur le chemin du Touat; Géryville et Aïn-Sefra, au versant méridional de l'Atlas du Sud Oranais. El-Goléa, que les Français n'avaient jamais occupé à demeure, devint un poste réel, avec profusion d'eau, même avec un lac, depuis le forage de puits artésiens donnant ensemble 107 à 108 litres par seconde (1891). Le poste de Hassi-Inifel, à 400 kilomètres en droite ligne au Sud-Sud-Est. d'El-Goléa, fut installé dans le val de l'oued Mia, comme une précaution contre les Touatiens du Tidikelt, avant de devenir une menace (1892). De même, et la même année, comme garantie et menace contre les Touatiens du Gourara, installation du poste de Mac-Mahon, à 180 kilomètres au Sud-Est d'El-Goléa. En 1893, création du fort de Hassi-Mey, près de Berresof, en Sahara de Tunisie; en 1894, fondation du fort Miribel, à 140 kilomètres un peu à l'Ouest d'El-Goléa, à l'Est-Sud-Est du fort Mac-Mahon, route du Touat; en 1894 également, le fort Lallemand s'élève dans le sillon de l'lgharghar, au Sud de Touggourt, au Sud-Ouest d'Ouargla. Mais, semble-t-il, c'était une démonstration, par une sorte d'ostentation, plutôt qu'une préparation réelle, puisque aucun départ de troupes pour l'archipel touatien ne suivit l'établissement de ces forts sahariens; or, à mesure que la France avait l'air de renoncer à ces précieuses oasis, l'empereur du Maroc les revendiquait plus que jamais.
Les Touareg étaient entrés en relations avec la France après la conquête de l'Algérie. Henri Duveyrier vécut parmi les Azdjer en 1861, et le 26 novembre 1862 fut signé un traité de commerce à Ghadamès entre le commandant Mircher et deux cheikhs des Azdjer; mais ce traité demeura lettre morte, quoique les Azdjer aient été moins ouvertement hostiles à la France que les Hoggar. L'assassinat des explorateurs Dournaux-Duperré et Joubert en 1874, de la grande mission Flatters en 1880, des Pères Richard et Kermabon en 1881, de Morès en 1896, servira de prétexte à l'usage de la force contre eux.
Le Sud. Mais la France faisait des progrès immenses dans la région soudanienne voisine du Sahara méridional et dans ce Sahara lui-même. Elle avait lentement, mais très sûrement, imposé sa domination aux Maures de la rive droite du Sénégal, indomptables jusque-là, et, fait bien autrement symbolique dans l'histoire de l'Afrique, pris Tombouctou, le 10 janvier 1895 : Tombouctou, à l'époque l'une des places fortes des Touaregs et la plus grande porte du désert; en vain les Touaregs massacrèrent-ils avec son état-major le colonel Bonnier, qui venait de conquérir la célèbre ville commune au Sahara et au Soudan, elle resta française, et de là se soumirent peu à peu les Maures et Touaregs du moyen Niger. En 1896, le commandant Hourst descendit le Niger jusqu'à son embouchure, et en route il obtint des Aouellimiden la reconnaissance du protectorat de la France.
De son côté, Foureau convertit le gouvernement à ses idées de pénétration « en force-», et il se mit en route en 1898 avec une escorte de 310 hommes et deux canons aux ordres du commandant Lamy. Les Touareg se montrèrent sur son passage, mais ne le brusquèrent pas d'abord; il franchit le Ahaggâr, se reposa dans l'Aïr où il repoussa de haute lutte une attaque en force des Touaregs, et finit par arriver dans le Damerghou, à Zinder, où il se rencontra avec la mission Joalland-Meynier, venue du Niger, et continua sa marche vers le lac Tchad et le Chari; là il a revu le drapeau français, hissé sur ce fleuve par des expéditions venues du Congo, là aussi, son compagnon, le commandant Lamy, fut tué dans une lutte contre le sultan Rabah (L'histoire du Bornou). Ainsi se réalisa la jonction des trois grands tronçons de l'empire français d'Afrique (Madagascar à part) : Algérie-Tunisie et Sahara, Sénégal et Niger, Congo-Oubangui et Tchad.
Pendant que la mission Foureau-Lamy traversait ainsi le Sahara, une convention nouvelle avec l'Angleterre complétait celle du 5 août 1890. Elle est à la date du 20 mars 1899. Elle délimitait la frontière saharienne des possessions françaises comme suit : à l'Est, la limite orientale du désert occupé par les Français part de la frontière tripolitaine (Fezzan) au point de rencontre du 13° 40' longitude Est avec le tropique du Cancer; elle se dirige au Sud-Est jusqu'au 11° 40' de longitude, puis suit ce méridien vers le Sud jusque vers le 15° parallèle Nord, d'où, longeant vers l'Ouest la frontière du Darfour, elle va rejoindre la limite à déterminer (de 18° 40' à 20° 40' Est) entre cette province «-Égyptienne » et le Ouadaï, reconnu français. Par cet arrangement, la France entrait en possession du Tibesti, de l'Ouanyanga, de l'Ennedi, du Bornou, du Kanem, de l'Ouadaï, soit de tous les pays à l'Est, au Nord-Est, au Nord du lac Tchad. Enfin, et c'est avec la prise de Tombouctou, l'événement le plus marquant de la main-mise sur le Sahara, les Français sont entrés à In-Salah le 29 décembre 1899, par le fait de la mission Flamand : mission officiellement pacifique, mais accompagnée de 140 hommes commandés par le capitaine Pein, Saharien éprouvé. Peu de temps après, le Touat entier fit sa soumission.
Ajoutons qu'au moment où les puissances européennes ont commencé à s'emparer de l'empire du Maroc, l'Espagne s'est octroyée de son côté deux portions du Sahara occidental, une petite enclave autour d'Ifni, une crique de la côte marocaine, à 30 kilomètres au Nord-Est de l'embouchure de l'oued Noua dans l'Atlantique, et un territoire plus vaste, nommé Rio de Oro, plus au Sud, face aux Îles Canaries. L'Espagne légitimait l'implantation à Ifni par les travaux des érudits espagnols, qui ont quelquefois identifié ce point avec le port de Santa Cruz de Mar Pequeña que mentionnent les documents du XVIe siècle et qui faisait un grand commerce avec les Canaries. Ce fut l'opinion de la commission envoyée en 1878, à bord du vaisseau Blasco de Garay, pour rechercher ce point que l'Espagne s'était réservée par le traité de 1860 avec le Maroc. Quelques vestiges d'un ancien établissement espagnol ou portugais existent en effet à Ifni; mais certains auteurs pensent que Santa Cruz se trouvait plus au Sud. Quoi qu'il en soit, le gouvernement marocain ratifia en 1883 la cession d'Ifni à l'Espagne, qui en 1884, manda la troupe pour s'emparer aussi de la région du Rio de Oro, qui possédait une zone de pêche très riche le long de sa côte.
Et après... L'implantation coloniale au Sahara a commencé à se déliter dès le lendemains de la Seconde guerre mondiale. Par exemple, la Mauritanie devient un territoire d'outre-mer dès 1946; la Libye devient indépendante de l'Italie en 1951, et la montée des nationalisme s'exprime un peu partout dès les années 1950. La dislocation de l'AOF deviendra effective en 1960. Entre les mois d'août et novembre de cette année-là, de nouveaux États indépendants sont formés, au Sud du Sahara : Tchad, Niger, Mali, Mauritanie. L'Algérie gagne son indépendance en juillet 1962. Comme ailleurs en Afrique, les limites de ces pays ont été définies à partir du tracé qui leur a été imposé à l'époque coloniale, et n'a cessé de poser, depuis, des difficultés. Les Touaregs se trouvent partagés entre divers États (Algérie, Libye, Mali, Niger, Burkina Faso) qui leur ont la plupart du temps réservé un sort difficile, d'où la révolte touareg de 1962 dans l'Adrar des Iforas au Mali, ou encore la guerre des sables de mai 1990 au Mali et au Niger, recommencée l'année suivante dans l'Aïr (Niger). De leur côté, les Toubous du Tibesti (rattaché au Tchad) ont été portés à des revendications séparatistes, et mêlés aux revendications libyennes sur la bande d'Aozou.
Enfin, après la fin de la dictature franquiste en Espagne (1975), l'ancien Rio de Oro ou Sahara espagnol, devenu le territoire du Sahara Occidental à l'appétit de ses voisins. La Mauritanie en revendique d'abord une partie, puis y renonce en 1979; le Maroc, l'annexe de fait, d'abord par une invasion pacifique (la marche verte) dès novembre 1975, puis par la construction d'un mur délimitant le territoire jugé économiquement intéressant (gisements importants de phosphates, minerai de fer). Les Sahraoui qui demandent leur indépendance, ont quant à eux constitué un mouvement de libération, le Front Polisario, et proclamé la formation, en 1977, d'un État, la République arabe sahraoui démocratique (RASD), mais restent prisonniers des rivalités entre le Maroc et leur principal allié, l'Algérie, et de l'indécision internationale. (O. Reclus / A.-M. B. / A. Le Chatelier / E. Cat.).
Les Anciens, peu soucieux d'ethnographie, de toute façon mal armés conceptuellement pour aborder des cultures différentes des leurs, nous ont si mal renseignés sur leurs Libyens, Garamantes, Éthiopiens, que leur connaissance doit s'appuyer surtout sur l'archéologie. Au moins peut-on comprendre que les peuples des deux rives de cette Méditerranée de sable et de cailloux s'y soient croisés et mêlés de longue date. A l'ouest du Sahara, les Almoravides, venus du Sud, fondèrent le premier empire des deux rives, entre le Niger et la mer Méditerranée au XIe siècle; l'empire Songhaï empiétera ensuite sur l'empire du Maroc au début du XVIe siècle; au XVIIe siècle, le Grand Maroc c'est-à-dire la zone d'influence de l'empire chérifien, s'étend jusqu'à Djenné, Tombouctou et Gao. A la même époque, le Bornou s'étend jusque au Fezzan. Au bout du compte cependant, la prépondérance est revenue à trois groupes de populations proprement sahariennes : il s'agit, au Sud du Fezzan et dans la région du Tibesti, des Toubous (ou Teda), une population parlant une langue nilo-saharienne proche du Kanuri, des Maures, à l'Ouest, qui sont des Arabo-Berbères et, surtout des Berbères Touareg au centre du Sahara.
Le Sahara a été l'objet des ambitions coloniales de la France à partir des années 1880 et se voyait intégrer, sur le papier, à l'Afrique occidentale française (AOF) en 1884. avant d'être reconnu possession française en 1890, par une convention signée avec le Royaume-Uni. La construction d'une série de forts servant de points d'appui aux troupes armées a permis ensuite en quelques années le contrôle presque complet de tout cet espace - seules quelques poches de résistance touareg et la Mauritanie devront attendre le début du XXe siècle pour se voir soumises. Ajoutons que deux autres puissance européennes ont égalent colonisé le Sahara : l'Espagne, d'abord, qui avait pris pied à l'Ouest du Sahara, dans la région du Rio de Oro, dès les années 1860, et l'Italie, engagée en Libye dans une guerre contre la Turquie qu'elle gagne en 1912, puis, qui en 1935, sous Mussolini, investit tout l'arrière-pays saharien jusqu'au Tchad, contestant à la France la bande d'Aouzou. A partir des années 1950 et jusqu'en 1975, la décolonisation aboutit au découpage du Sahara qui se trouve réparti entre plusieurs nouveaux États. Un partage qui se fait au détriment des populations sahariennes, d'où une partie des conflits qu'on a pu observer dans la région au cours des décennies suivantes.
Dates clés :
5500 - 3000 av. J.-C. - Invention de la céramique; domestication et élevage des bovins dans la région des massifs (Aïr, Adrar, Tibesti, Hoggar).
XIe siècle - Islamisation du Sahara.
1890. - Accord Franco-anglais sur le Sahara.
1894 - Prise de Tombouctou par les troupes françaises.
Années 1950 - Début de la décolonisation.
Les Touareg
Les Touareg (au singulier Targui, de l'arabe Tergab = race) constituent la population emblématique du Sahara central. Les Touareg ont le teint bronzé, les cheveux longs, lisses et noirs, la barbe noire et rare, les yeux noirs, rarement bleus, le nez petit, les mains petites, les membres musculeux, la taille haute. Nominalement musulmans, ils ne jeûnent pas, ne font pas les ablutions régulières, ne saignent pas les animaux. Ils sont traditionnellement armés du sabre, de la lame, d'un couteau et souvent d'un bouclier; l'usage du fusil s'est généralisé; ils sont vêtus d'une tunique généralement noire, blanche chez quelques tribus, d'un pantalon, d'une ceinture de laine, d'un turban dont un bout est ramené de façon à voiler la figure, ne laissant apercevoir que les yeux; ce voile ou litham est caractéristique; il abrite les voies respiratoires du sable. Les chefs portent souvent le burnous; la mode a longtemps été d'avoir la moustache longue et la tête rasée, sauf une tresse. La nourriture est le lait et la viande des troupeaux de moutons et de chameaux; le revenu tiré des caravanes qu'ils escortent et, jadis tout une tradition de razzias, leur permet d'ajouter au produit de leurs troupeaux pour se procurer des dattes, des grains, des armes et des objets manufactures dans les oasis du Nord et sur les marchés du Sahel. Ils circulent à dos de chameau, mais en descendent pour le combat. Les femmes sont très libres, et la filiation se définit par la ligne maternelle. La langue des Touareg, le tamachek, appartient au groupe de langues afrasiennes et est celui des dialectes berbères, qui est demeuré le plus imperméable aux éléments arabes. Ils ont une écriture, le tifinrah (singulier tafanek = lettre) qui se retrouve sur des inscriptions rupestres et de nombreux monuments du Nord de l'Afrique; on la rapproche des alphabets punique et himyarite.
Au cours de l'histoire, on les trouve traditionnellement regroupés en quatre confédérations ayant chacune pour centre un massif montagneux, abri de ses troupeaux et de ses tentes, et d'où ils rayonnent dans le désert et sur les routes qui mènent aux pays où ils se ravitaillent Touat au Nord-Ouest, Ghadamèset Ghat au Nord-Est, Tombouctou au Sud-Ouest, Zinder au Sud-Est. Les Touareg du Nord, les moins nombreux parce qu'ils n'accèdent qu'aux oasis et non comme ceux du Sud aux fertiles terres légères qui bordent le Sahel, sont répartis entre les confédérations des Azdjer (Azgar) à l'Est, des Hoggar (Ahggar) à l'Ouest. Les Azdjer (Ajjer) commerçant avec Ghat et Ghadamès, se sont progressivement sédentarisés; ils possèdent un faubourg de Ghadamès, la seule zaouia touareg à Temassinin, quelques-uns se sont établis au Fezzan et à Ghat. Ils ont un cheikh héréditaire, l'amrhar. La famille des lmanân a à sa tête l'amenokal, suzerain nominal de tous les Touareg du Nord; son pouvoir a été abattu il y a plus de trois siècles avec le concours de la tribu des Aouraghen, et les deux confédérations sont morcelées en tribus qui, de fait, sont autonomes. Ces tribus sont, les unes nobles (ihaggaren), les autres serves (imrhad); il faut ajouter à coté des nobles les tribus maraboutiques et certaines tribus mixtes. Chez les Azdjer, les tribus nobles sont les Imanan, anciens chefs religieux et politiques, les Aouraghen, issus des Awrigba, tribu berbère refoulée du littoral dans le désert par les Arabes et qui a peut-être donné son nom à l'Afrique; les lmanrhasaten, les KelIzhabân, les Imettrilalen et les lhaddaren : les tribus maraboutiques sont les Ifoghas et les lhehaouen.
Les Hoggar, séparés des Azdjer par la dépression de l'Igharghar, se ravitaillent surtout à ln-Salah. Ils ne comprennent que des tribus nobles et des serfs; ils sont très morcelés; leur centre est, dans le massif Hoggar, la région d'Idelès; ce sont ceux qui, à l'époque de la colonisation, se montreront les plus hostiles à la France. A l'Ouest, il s'est détaché de leur confédération un groupe établi dans le massif de l'Ahenet et formé de la tribu des Taïtoq, de celle des Tedjeké Nousidi et de dix-neuf tribus serves ou alliées; ils nomadisent au Sud jusqu'à Taodeni et au Soudan; les Ajjer et Hoggar ne dépassent guère au Sud-Est. Asiou, qui forme, avec le point plus occidental de Timissao, la limite coutumière entre eux et les Touareg du Sud.
Les Touareg du Sud sont beaucoup plus nombreux, évalués à 60 000 (?) pour les Keloui à l'Est, le double pour les Aouelimmiden à l'Ouest. Les Keloui vivent dans l'oasis d'Aïr et se rattachent aux Aouraghen; ils sont presque sédentaires, habitent des huttes et non des tentes; ils ont jadis enlevé l'oasis aux Noirs et se sont métissés avec eux. Au Sud de l'Aïr est le groupe des Kel-Guérès et des Itissan, tribus refoulées par les Keloui (ce sont des cavaliers), à la différence des Touareg précédents qui ne montent guère qu'à dos de chameau. Les Aouelimmiden, dont la forteresse naturelle est le massif de l'Adrar oriental, sont les plus puissants des Touareg, ils étaient maîtres de tout le coude du Niger et s'étendaient bien au Sud du fleuve, lorsque les Français se sont emparés de ces régions au XIXe siècle. On les rattache à la grande nation berbère des Lemta; venus de l'Ouest, ils auraient refoulé les Tademekkés et abattu l'empire songhaï. Ils sont sous l'influence maraboutique des Bekkaya de Tombouctou, se divisent en nobles et imrhad et vivent sous la tente.
Le passé touareg. L'histoire des Berbères sahariens est mal connue; le nom de Touareg est celui que leur donnent les Arabes; eux-mêmes s'appellent Imoharh, nom national des Berbères. Les documents fournis par les écrivains antiques ne permettent pas encore de rattacher clairement aux peuples actuels ceux qu'ils mentionnent dans le désert Libyque, Garamantes, Éthiopiens blancs, etc.
Les Touareg descendent principalement de tribus berbères refoulées dans le désert par la grande invasion arabe hillalienne du XIe siècle; auparavant, les Targa habitaient le Maghreb et la région de Sidjilmessa, au Sud de l'Atlas marocain. Ibn Khaldoun, au XIVe siècle, les place dans le désert au Sud de la Tunisie; les Lemta, plus à l'Ouest, au Sud des Riah du Zab; puis les Messoufa, les Lemtouna, au Sud du Sahara marocain, et enfin les Gueddala, les plus occidentaux des Berbères du désert, guerriers voilés du litham.
Au XVIe siècle, Léon l'Africain énumère, d'Est en Ouest : les Berdoa (auj. tribu du Tibesti), entre Aoudjelah et le Bornou; les Lemta, entre la route du Fezzan à Kano et les oasis de Ghadamès et Ouargla; les Targa, entre l'Aïr, le Mzab et le Touat; les Zouenziga, de l'Aïr à Tombouctou; enfin les Sanhadja, au Nord-Ouest de Tombouctou; ceux-ci se sont fondus avec les Maures du Sahara occidental, comme les Berdoa avec les Toubou; les trois autres tribus correspondent aux Touareg actuels.
Échanges Nord-Sud
Avec la période d'expansion de l'Islam commence un « processus » nouveau : les Arabes envahissent, d'abord infinitésimalement le Sahara, puis en plus grand nombre; ils entrent en lutte d'influence avec les Berbères, et c'est longtemps un flux et un reflux continuels; enfin, dans ce combat toujours renouvelé, la victoire demeure indécise : le triomphe reste aux Berbères, qui sont bien toujours la population la plus solidement implantée au Sahara, mais le triomphe social est aux Arabes, dont Ia langue, la religion, les idées et institutions l'emportent décidément.
L'occupation arabe du Sahara offre sans doute des caractères divers. Cependant, ses traits essentiels ne se trouvent pas altérés par la forme locale quelle a pu revêtir. Au début, elle s'est effectuée par une infiltration lente. Les Arabes, jusqu'au Ve siècle de l'hégire, ont été surtout des missionnaires de l'Islam. A peine ont-ils formé de petites colonies dans quelques centres. Interrompu par le soulèvement des Berbères du Maghreb et les conquêtes des Almoravides, le mouvement commencé a repris avec une intensité nouvelle, et sous forme d'invasion, par l'exode des tribus hymiarites d'Égypte au XIe siècle. Lancées par les califes fatimides contre leurs sujets révoltés de l'Afrique du Nord, elles s'y dispersèrent. Celles qui occupent aujourd'hui le Sahara y étaient arrivées pour la plupart dès le XIIIe siècle. Elles eurent à soutenir des luttes souvent acharnées pour s'imposer à la fin aux autochtones. En se mélangeant aux populations berbères, dont quelques-unes à peine conservèrent leur indépendance, elles ont formé une population nouvelle essentiellement métisse, mais dans laquelle le premier rang appartiendra, sous le rapport politique, aux fractions dont la descendance arabe s'est maintenue la plus intacte. A côté des tribus ainsi constituées, et où les familles dites Hassan, de sang pur, dominent les fractions plus mélangées, vivront, sur un pied d'égalité, quelques groupes berbères, descendants directs des anciennes branches souveraines des Sanhadja sahariens ou des premiers Morabethyn (= Almoravides). Les autres rameaux de la population primitive, restés rétifs à tout métissage, formera une caste vassale de la première, les Hassan.
En outre, contemporaine de l'invasion arabe, il s'est produit, du XIe au XIIIe siècle, une immigration de Berbères fixés d'abord sur la limite septentrionale du Sahara. Quelques fractions maraboutiques ont gardé leur autonomie pendant que les autres se métissaient ou subissaient à leur tour la suprématie des maîtres du pays. Tels sont les éléments constitutifs de la population actuelle du Sahara. Mais, indépendamment de quelques migrations temporaires ou plus récentes qui, aux XVIIe et XVIIIe siècles, ont légèrement accru l'importance numérique de l'élément arabe, il y a lieu de faire la part d'un courant de relations très suivies, établies pendant la même période entre l'empire du Maroc et la vallée du Niger septentrional. La conquête de Rouma, faite au nom et pour le compte des sultans de Fès, n'a pas eu d'influence durable sur les destinées politiques de la région. Mais si momentanée qu'ait été l'occupation marocaine, elle n'en a pas moins suffi pour déterminer des rapports suivis entre le Maroc et la zone frontière du Soudan occidental : ces rapports, qu'ont resserrés encore les alliances contractées par les soldats de Djedar et leurs descendants, se sont maintenus jusqu'à l'époque coloniale. Ils ont été assez importants pour donner droit de cité aux Chorfa de Fès, dans tout le moyen Niger.
Pendant que le Sahara devenait un champ clos entre les populations d'origine arabe et celles d'origine berbère, et que les unes et les autres agissaient dans le Soudan septentrional, tant comme guerriers que missionnaires de l'Islam, et y répandaient peu à peu le domaine de la religion musulmane et celui de la langue arabe, les Soudaniens envahissaient, eux aussi, de temps en temps, le Sahara. De grands empires subsahariens ont ainsi dominé certaines parties du désert : l'empire de Ghana, fondé par Soninké ou Asouanek, domina de vastes régions du Soudan occidental. Plus tard, les Mandé (Mandingues, Malinkés), étendirent, au XIIIe siècle, leur pouvoir sur le désert, de Tombouctou (Mali) jusqu'au Touat (en Algérie). Après quoi, les Songhaï, ayant leur capitale à Gao, riveraine du Niger, annexèrent aussi de grands morceaux du Sahara, jusqu'à toucher le Maroc et l'Algérie. Ces invasions, ajoutées à la traite des esclaves fixa dans les oasis sahariennes de plus en plus de populations d'origine subsaharienne jusqu'à la fin du XIXe siècle, pratiquement.
La colonisation
Les rivalités nationales entre les grandes puissances européennes à partir des deux dernières décennies du XIXe siècle ont trouvé dans l'Afrique un champ de bataille privilégié. La politique d'expansion menée ainsi par la France au Sahara à cette époque est d'ordre stratégique : elle s'explique davantage par le souci de damer le pion aux autres puissances en occupant le terrain que par l'idée, par exemple, qu'il y aurait eu là des ressources à exploiter. Il s'agissait donc d'établir une continuité de territoire entre l'Algérie (au Nord de Ghardaïa), où la France était présente depuis 1830, et les possessions françaises en Afrique Subsahariennes, au Sénégal et dans le Golfe de Guinée. En 1890, une convention avec l'Angleterre reconnut aux Français la possession du Sahara entre l'Algérie-Tunisie d'une part, le Niger et le lac Tchad, d'autre part; dès lors, et avec plus d'esprit de suite qu'auparavant, la France s'occupa d'entrer réellement en possession des territoires venus dans sa sphère de domination en Sahara et en Soudan. Ses tentatives, presque toutes couronnées de succès, eurent pour lieux de départ, au Nord l'Algérie, au Sud-Ouest le Sénégal, au Sud le Congo. Ce grand espace prendra, à partir de 1904, le nom d'Afrique occidentale française (A.O.F).
Le Nord. Les expéditions visant plus spécialement le Sahara s'organisèrent naturellement en Algérie. Tout d'abord, les Français avancèrent vers le Sud la ligne des postes du Sahara d'Algérie, qui, de l'Est à l'Ouest, étaient : El-Oued, dans le Souf; Biskra, dans les Ziban; Touggourt, dans l'Oued-Rir; Ghardaïa, dans le pavs des Béni-Mzab; Ouargla, dans la dépression où s'unissent les bas-fonds de l'oued Mia et de la chebka du Mzab, Laghouat, en arrière de Ghardaïa; El-Goléa, en avant d'Ouargla, sur le chemin du Touat; Géryville et Aïn-Sefra, au versant méridional de l'Atlas du Sud Oranais. El-Goléa, que les Français n'avaient jamais occupé à demeure, devint un poste réel, avec profusion d'eau, même avec un lac, depuis le forage de puits artésiens donnant ensemble 107 à 108 litres par seconde (1891). Le poste de Hassi-Inifel, à 400 kilomètres en droite ligne au Sud-Sud-Est. d'El-Goléa, fut installé dans le val de l'oued Mia, comme une précaution contre les Touatiens du Tidikelt, avant de devenir une menace (1892). De même, et la même année, comme garantie et menace contre les Touatiens du Gourara, installation du poste de Mac-Mahon, à 180 kilomètres au Sud-Est d'El-Goléa. En 1893, création du fort de Hassi-Mey, près de Berresof, en Sahara de Tunisie; en 1894, fondation du fort Miribel, à 140 kilomètres un peu à l'Ouest d'El-Goléa, à l'Est-Sud-Est du fort Mac-Mahon, route du Touat; en 1894 également, le fort Lallemand s'élève dans le sillon de l'lgharghar, au Sud de Touggourt, au Sud-Ouest d'Ouargla. Mais, semble-t-il, c'était une démonstration, par une sorte d'ostentation, plutôt qu'une préparation réelle, puisque aucun départ de troupes pour l'archipel touatien ne suivit l'établissement de ces forts sahariens; or, à mesure que la France avait l'air de renoncer à ces précieuses oasis, l'empereur du Maroc les revendiquait plus que jamais.
Les Touareg étaient entrés en relations avec la France après la conquête de l'Algérie. Henri Duveyrier vécut parmi les Azdjer en 1861, et le 26 novembre 1862 fut signé un traité de commerce à Ghadamès entre le commandant Mircher et deux cheikhs des Azdjer; mais ce traité demeura lettre morte, quoique les Azdjer aient été moins ouvertement hostiles à la France que les Hoggar. L'assassinat des explorateurs Dournaux-Duperré et Joubert en 1874, de la grande mission Flatters en 1880, des Pères Richard et Kermabon en 1881, de Morès en 1896, servira de prétexte à l'usage de la force contre eux.
Le Sud. Mais la France faisait des progrès immenses dans la région soudanienne voisine du Sahara méridional et dans ce Sahara lui-même. Elle avait lentement, mais très sûrement, imposé sa domination aux Maures de la rive droite du Sénégal, indomptables jusque-là, et, fait bien autrement symbolique dans l'histoire de l'Afrique, pris Tombouctou, le 10 janvier 1895 : Tombouctou, à l'époque l'une des places fortes des Touaregs et la plus grande porte du désert; en vain les Touaregs massacrèrent-ils avec son état-major le colonel Bonnier, qui venait de conquérir la célèbre ville commune au Sahara et au Soudan, elle resta française, et de là se soumirent peu à peu les Maures et Touaregs du moyen Niger. En 1896, le commandant Hourst descendit le Niger jusqu'à son embouchure, et en route il obtint des Aouellimiden la reconnaissance du protectorat de la France.
De son côté, Foureau convertit le gouvernement à ses idées de pénétration « en force-», et il se mit en route en 1898 avec une escorte de 310 hommes et deux canons aux ordres du commandant Lamy. Les Touareg se montrèrent sur son passage, mais ne le brusquèrent pas d'abord; il franchit le Ahaggâr, se reposa dans l'Aïr où il repoussa de haute lutte une attaque en force des Touaregs, et finit par arriver dans le Damerghou, à Zinder, où il se rencontra avec la mission Joalland-Meynier, venue du Niger, et continua sa marche vers le lac Tchad et le Chari; là il a revu le drapeau français, hissé sur ce fleuve par des expéditions venues du Congo, là aussi, son compagnon, le commandant Lamy, fut tué dans une lutte contre le sultan Rabah (L'histoire du Bornou). Ainsi se réalisa la jonction des trois grands tronçons de l'empire français d'Afrique (Madagascar à part) : Algérie-Tunisie et Sahara, Sénégal et Niger, Congo-Oubangui et Tchad.
Pendant que la mission Foureau-Lamy traversait ainsi le Sahara, une convention nouvelle avec l'Angleterre complétait celle du 5 août 1890. Elle est à la date du 20 mars 1899. Elle délimitait la frontière saharienne des possessions françaises comme suit : à l'Est, la limite orientale du désert occupé par les Français part de la frontière tripolitaine (Fezzan) au point de rencontre du 13° 40' longitude Est avec le tropique du Cancer; elle se dirige au Sud-Est jusqu'au 11° 40' de longitude, puis suit ce méridien vers le Sud jusque vers le 15° parallèle Nord, d'où, longeant vers l'Ouest la frontière du Darfour, elle va rejoindre la limite à déterminer (de 18° 40' à 20° 40' Est) entre cette province «-Égyptienne » et le Ouadaï, reconnu français. Par cet arrangement, la France entrait en possession du Tibesti, de l'Ouanyanga, de l'Ennedi, du Bornou, du Kanem, de l'Ouadaï, soit de tous les pays à l'Est, au Nord-Est, au Nord du lac Tchad. Enfin, et c'est avec la prise de Tombouctou, l'événement le plus marquant de la main-mise sur le Sahara, les Français sont entrés à In-Salah le 29 décembre 1899, par le fait de la mission Flamand : mission officiellement pacifique, mais accompagnée de 140 hommes commandés par le capitaine Pein, Saharien éprouvé. Peu de temps après, le Touat entier fit sa soumission.
Ajoutons qu'au moment où les puissances européennes ont commencé à s'emparer de l'empire du Maroc, l'Espagne s'est octroyée de son côté deux portions du Sahara occidental, une petite enclave autour d'Ifni, une crique de la côte marocaine, à 30 kilomètres au Nord-Est de l'embouchure de l'oued Noua dans l'Atlantique, et un territoire plus vaste, nommé Rio de Oro, plus au Sud, face aux Îles Canaries. L'Espagne légitimait l'implantation à Ifni par les travaux des érudits espagnols, qui ont quelquefois identifié ce point avec le port de Santa Cruz de Mar Pequeña que mentionnent les documents du XVIe siècle et qui faisait un grand commerce avec les Canaries. Ce fut l'opinion de la commission envoyée en 1878, à bord du vaisseau Blasco de Garay, pour rechercher ce point que l'Espagne s'était réservée par le traité de 1860 avec le Maroc. Quelques vestiges d'un ancien établissement espagnol ou portugais existent en effet à Ifni; mais certains auteurs pensent que Santa Cruz se trouvait plus au Sud. Quoi qu'il en soit, le gouvernement marocain ratifia en 1883 la cession d'Ifni à l'Espagne, qui en 1884, manda la troupe pour s'emparer aussi de la région du Rio de Oro, qui possédait une zone de pêche très riche le long de sa côte.
Et après... L'implantation coloniale au Sahara a commencé à se déliter dès le lendemains de la Seconde guerre mondiale. Par exemple, la Mauritanie devient un territoire d'outre-mer dès 1946; la Libye devient indépendante de l'Italie en 1951, et la montée des nationalisme s'exprime un peu partout dès les années 1950. La dislocation de l'AOF deviendra effective en 1960. Entre les mois d'août et novembre de cette année-là, de nouveaux États indépendants sont formés, au Sud du Sahara : Tchad, Niger, Mali, Mauritanie. L'Algérie gagne son indépendance en juillet 1962. Comme ailleurs en Afrique, les limites de ces pays ont été définies à partir du tracé qui leur a été imposé à l'époque coloniale, et n'a cessé de poser, depuis, des difficultés. Les Touaregs se trouvent partagés entre divers États (Algérie, Libye, Mali, Niger, Burkina Faso) qui leur ont la plupart du temps réservé un sort difficile, d'où la révolte touareg de 1962 dans l'Adrar des Iforas au Mali, ou encore la guerre des sables de mai 1990 au Mali et au Niger, recommencée l'année suivante dans l'Aïr (Niger). De leur côté, les Toubous du Tibesti (rattaché au Tchad) ont été portés à des revendications séparatistes, et mêlés aux revendications libyennes sur la bande d'Aozou.
Enfin, après la fin de la dictature franquiste en Espagne (1975), l'ancien Rio de Oro ou Sahara espagnol, devenu le territoire du Sahara Occidental à l'appétit de ses voisins. La Mauritanie en revendique d'abord une partie, puis y renonce en 1979; le Maroc, l'annexe de fait, d'abord par une invasion pacifique (la marche verte) dès novembre 1975, puis par la construction d'un mur délimitant le territoire jugé économiquement intéressant (gisements importants de phosphates, minerai de fer). Les Sahraoui qui demandent leur indépendance, ont quant à eux constitué un mouvement de libération, le Front Polisario, et proclamé la formation, en 1977, d'un État, la République arabe sahraoui démocratique (RASD), mais restent prisonniers des rivalités entre le Maroc et leur principal allié, l'Algérie, et de l'indécision internationale. (O. Reclus / A.-M. B. / A. Le Chatelier / E. Cat.).
7 avr. 2008
La flambée des prix menace la sécurité alimentaire... lire dans SIDWAYA
La sécurité alimentaire et nutritionnelle au Sahel et en Afrique de l'Ouest est menacée par les entraves aux échanges régionaux et la flambée des prix des denrées alimentaires au niveau mondial.
La flambée des prix constitue une menace pour la stabilité des pays de la sous région.
Des céréales comme le fonio voient leurs prix augmenter à cause du mauvais fonctionnement du marché.
La production céréalière brute prévisionnelle 2007-2008 révisée pour l'ensemble des pays du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest, excepté le Liberia, se chiffre à 48 066 000 tonnes contre 49 121 000 tonnes en 2006/2007. Cependant, cette production est inégalement répartie entre et à l'intérieur des pays, avec des déficits importants au Sénégal, au Cap-Vert, en Gambie et à l'extrême Nord du Nigeria et du Ghana. Par ailleurs, les mauvaises productions de maïs ont été confirmées dans la sous-région. Les actions engagées par les Etats pour augmenter la disponibilité céréalière à travers les cultures de contre-saison et de décrue, auront certainement des effets localisés sur l'offre alimentaire. Cependant, le niveau de production attendu aura une capacité limitée pour combler les baisses constatées durant la campagne pluviale 2007-2008. La présente campagne a été marquée par un accroissement de la production de niébé, de tubercules et de légumes, qui pourraient améliorer l'alimentation des populations. Il convient de souligner que cette légère baisse des productions en 2007-2008 fait suite à deux bonnes années de productions qui avaient permis aux producteurs, aux commerçants et aux pouvoirs publics dans certains pays de reconstituer leurs stocks. Le niveau de ces stocks n'est pas réellement connu. Mais de l'avis des acteurs des marchés, les gros producteurs du Nigeria et les commerçants grossistes au Mali, Bénin, Burkina Faso, Niger et Nigeria détiendraient d'importants stocks, qui une fois libérés pourraient significativement améliorer l'approvisionnement dans les marchés. Mis à part le cas du maïs et dans une moindre mesure le sorgho, les productions des autres denrées (mil, niébé, tubercules et produits dérivés) sont globalement suffisantes pour assurer une alimentation acceptable des populations. Toutefois, les marchés doivent fonctionner normalement et ce n'est pas le cas notamment au niveau des flux commerciaux. La situation pastorale est satisfaisante dans la région avec des prix du bétail qui se maintiennent à un niveau meilleur sur les marchés que l'année dernière et des termes d'échange encore en faveur des éleveurs. Toutefois, suite à la montée des prix dans certains pays, on signale une augmentation de l'offre des petits ruminants, ce qui pourrait les mois prochains se traduire par une baisse des prix et des pertes de revenus pour les éleveurs. Les situations alimentaires et nutritionnelles présentées par les pays et complétées par les informations issues des missions conjointes d'évaluation des marchés et des flux transfrontaliers indiquent que les prix pratiqués ont des évolutions variées selon les produits et les zones. C'est ainsi qu'on note actuellement trois grandes zones d'évolution au Sahel et en Afrique de l'Ouest : - Dans la partie est (Niger, Nigeria, Tchad et Bénin), la situation est marquée par un important déficit en céréales au Nord Nigeria et une forte demande des industries agroalimentaires. Les prix des céréales accusent une forte hausse qui commence à affecter l'accès aux aliments particulièrement au Niger et au Nigeria ; - Dans la partie centrale (Burkina Faso, Mali, Ghana, Togo et Côte d'ivoire), les prix évoluent normalement concernant les céréales sèches avec toutefois des hausses significatives pour le riz à cause essentiellement du contexte international ; - Dans la partie ouest (Sénégal, Mauritanie, Guinée Bissau, Gambie, Cap-Vert), on assiste à une hausse modérée des prix des céréales sèches et de fortes hausses des prix des denrées importées. Dans ces pays, plus dépendants des importations du riz et du blé, les difficultés d'approvisionnement et d'accès menacent déjà la sécurité alimentaire des ménages. Si la hausse des prix des céréales importées se justifie par le contexte du marché mondial, par contre celle des céréales sèches se justifie en grande partie par le mauvais fonctionnement des marchés. Ce dernier est exacerbé par les mesures entravant la libre circulation des céréales et aussi une spéculation au niveau des marchés.
Présentement, la situation alimentaire est globalement satisfaisante dans la zone centre de la sous-région. Mais elle reste préoccupante dans certaines zones du Niger, de la Gambie, à l'extrême nord du Nigeria, au nord-est de la Guinée Bissau, au sud-est de la Mauritanie, au Sénégal, au Cap-Vert, dans les centres urbains et dans les zones structurellement déficitaires. Dans d'autres zones de certains pays, la situation alimentaire reste fragile à cause de l'insécurité.
En ce qui concerne la situation nutritionnelle au Sahel et en Afrique de l'Ouest, elle montre d'ores et déjà des tendances préoccupantes qui doivent appeler à un renforcement des actions nutritionnelles. Par voie de conséquence, il est important d'améliorer l'accès pour les populations vulnérables à des denrées alimentaires diversifiées dans les court, moyen et long termes.
La flambée des prix est entrain d’anéantir les efforts des paysans africains.
La production du maïs accuse des insuffisances dommageables pour une alimentation acceptable des populations.
La situation alimentaire et nutritionnelle peut se détériorer davantage les mois prochains si le fonctionnement des marchés et l'accès aux denrées alimentaires ne sont pas améliorés. Une hausse généralisée des prix et des difficultés d'approvisionnement en céréales sont à craindre particulièrement pendant la période de soudure. Ce risque est d'autant plus réel que les stocks institutionnels (stocks nationaux de sécurité alimentaire, stocks d'intervention) et communautaires, bien que relativement importants ne seront pas en mesure de répondre à toutes les sollicitations.
Compte tenu de tout ce qui précède, il est recommandé :Aux Etats :
* De respecter la libre circulation des biens et des personnes, notamment des produits alimentaires, conformément aux textes réglementaires des Organisations d'intégration sous régionale ; *D'engager des concertations régulières avec les acteurs du marché pour assurer un approvisionnement régulier en céréales ; *D'améliorer les conditions d'importations de céréales et autres produits alimentaires dans la zone avec abaissement ou suppression des taxes à l'importation et ouverture de lignes de crédit à l'importation ; * De procéder à des ouvertures ciblées des stocks publics dans les zones où les prix sont les plus élevés tout en évitant de les épuiser avant la période de soudure ; * De renforcer les actions d'atténuation des crises alimentaires : cash for work, food for work, ventes à prix modérés, aide d'urgence ciblée, etc., dans les zones d'insécurité alimentaire pendant la période de soudure ; * De renforcer les actions de prévention et de prise en charge des enfants de moins de 5 ans et des femmes enceintes et allaitantes malnutries dans les zones à risque ; * D'assurer un approvisionnement adéquat en semences de qualité et en engrais aux producteurs céréaliers de la sous-région ; * De renforcer le crédit agricole notamment dans les grands bassins de production.
Aux systèmes d'alerte précoce nationaux et régionaux
* De faire une mise à jour régulière de l'évolution de la situation alimentaire et nutritionnelle et d'en informer les décideurs ; * De renforcer le suivi des marchés, la concertation avec les décideurs et les commerçants au niveau national et régional.
A la CEDEAO et l'UEMOA
* D'engager des concertations rapides pour la levée des entraves actuelles au commerce régional ; * De veiller au respect de la libre circulation des personnes et des biens dans les espaces communautaires.
Aux partenaires techniques et financiers
* D'appuyer la mise à niveau des stocks de sécurité alimentaire ; * D'accompagner les Etats et les populations dans leurs efforts de lutte contre l'insécurité alimentaire et nutritionnelle.
Source : CILSS/CEDEAO/ONU
La sécurité alimentaire et nutritionnelle au Sahel et en Afrique de l'Ouest est menacée par les entraves aux échanges régionaux et la flambée des prix des denrées alimentaires au niveau mondial.
La flambée des prix constitue une menace pour la stabilité des pays de la sous région.
Des céréales comme le fonio voient leurs prix augmenter à cause du mauvais fonctionnement du marché.
La production céréalière brute prévisionnelle 2007-2008 révisée pour l'ensemble des pays du Sahel et de l'Afrique de l'Ouest, excepté le Liberia, se chiffre à 48 066 000 tonnes contre 49 121 000 tonnes en 2006/2007. Cependant, cette production est inégalement répartie entre et à l'intérieur des pays, avec des déficits importants au Sénégal, au Cap-Vert, en Gambie et à l'extrême Nord du Nigeria et du Ghana. Par ailleurs, les mauvaises productions de maïs ont été confirmées dans la sous-région. Les actions engagées par les Etats pour augmenter la disponibilité céréalière à travers les cultures de contre-saison et de décrue, auront certainement des effets localisés sur l'offre alimentaire. Cependant, le niveau de production attendu aura une capacité limitée pour combler les baisses constatées durant la campagne pluviale 2007-2008. La présente campagne a été marquée par un accroissement de la production de niébé, de tubercules et de légumes, qui pourraient améliorer l'alimentation des populations. Il convient de souligner que cette légère baisse des productions en 2007-2008 fait suite à deux bonnes années de productions qui avaient permis aux producteurs, aux commerçants et aux pouvoirs publics dans certains pays de reconstituer leurs stocks. Le niveau de ces stocks n'est pas réellement connu. Mais de l'avis des acteurs des marchés, les gros producteurs du Nigeria et les commerçants grossistes au Mali, Bénin, Burkina Faso, Niger et Nigeria détiendraient d'importants stocks, qui une fois libérés pourraient significativement améliorer l'approvisionnement dans les marchés. Mis à part le cas du maïs et dans une moindre mesure le sorgho, les productions des autres denrées (mil, niébé, tubercules et produits dérivés) sont globalement suffisantes pour assurer une alimentation acceptable des populations. Toutefois, les marchés doivent fonctionner normalement et ce n'est pas le cas notamment au niveau des flux commerciaux. La situation pastorale est satisfaisante dans la région avec des prix du bétail qui se maintiennent à un niveau meilleur sur les marchés que l'année dernière et des termes d'échange encore en faveur des éleveurs. Toutefois, suite à la montée des prix dans certains pays, on signale une augmentation de l'offre des petits ruminants, ce qui pourrait les mois prochains se traduire par une baisse des prix et des pertes de revenus pour les éleveurs. Les situations alimentaires et nutritionnelles présentées par les pays et complétées par les informations issues des missions conjointes d'évaluation des marchés et des flux transfrontaliers indiquent que les prix pratiqués ont des évolutions variées selon les produits et les zones. C'est ainsi qu'on note actuellement trois grandes zones d'évolution au Sahel et en Afrique de l'Ouest : - Dans la partie est (Niger, Nigeria, Tchad et Bénin), la situation est marquée par un important déficit en céréales au Nord Nigeria et une forte demande des industries agroalimentaires. Les prix des céréales accusent une forte hausse qui commence à affecter l'accès aux aliments particulièrement au Niger et au Nigeria ; - Dans la partie centrale (Burkina Faso, Mali, Ghana, Togo et Côte d'ivoire), les prix évoluent normalement concernant les céréales sèches avec toutefois des hausses significatives pour le riz à cause essentiellement du contexte international ; - Dans la partie ouest (Sénégal, Mauritanie, Guinée Bissau, Gambie, Cap-Vert), on assiste à une hausse modérée des prix des céréales sèches et de fortes hausses des prix des denrées importées. Dans ces pays, plus dépendants des importations du riz et du blé, les difficultés d'approvisionnement et d'accès menacent déjà la sécurité alimentaire des ménages. Si la hausse des prix des céréales importées se justifie par le contexte du marché mondial, par contre celle des céréales sèches se justifie en grande partie par le mauvais fonctionnement des marchés. Ce dernier est exacerbé par les mesures entravant la libre circulation des céréales et aussi une spéculation au niveau des marchés.
Présentement, la situation alimentaire est globalement satisfaisante dans la zone centre de la sous-région. Mais elle reste préoccupante dans certaines zones du Niger, de la Gambie, à l'extrême nord du Nigeria, au nord-est de la Guinée Bissau, au sud-est de la Mauritanie, au Sénégal, au Cap-Vert, dans les centres urbains et dans les zones structurellement déficitaires. Dans d'autres zones de certains pays, la situation alimentaire reste fragile à cause de l'insécurité.
En ce qui concerne la situation nutritionnelle au Sahel et en Afrique de l'Ouest, elle montre d'ores et déjà des tendances préoccupantes qui doivent appeler à un renforcement des actions nutritionnelles. Par voie de conséquence, il est important d'améliorer l'accès pour les populations vulnérables à des denrées alimentaires diversifiées dans les court, moyen et long termes.
La flambée des prix est entrain d’anéantir les efforts des paysans africains.
La production du maïs accuse des insuffisances dommageables pour une alimentation acceptable des populations.
La situation alimentaire et nutritionnelle peut se détériorer davantage les mois prochains si le fonctionnement des marchés et l'accès aux denrées alimentaires ne sont pas améliorés. Une hausse généralisée des prix et des difficultés d'approvisionnement en céréales sont à craindre particulièrement pendant la période de soudure. Ce risque est d'autant plus réel que les stocks institutionnels (stocks nationaux de sécurité alimentaire, stocks d'intervention) et communautaires, bien que relativement importants ne seront pas en mesure de répondre à toutes les sollicitations.
Compte tenu de tout ce qui précède, il est recommandé :Aux Etats :
* De respecter la libre circulation des biens et des personnes, notamment des produits alimentaires, conformément aux textes réglementaires des Organisations d'intégration sous régionale ; *D'engager des concertations régulières avec les acteurs du marché pour assurer un approvisionnement régulier en céréales ; *D'améliorer les conditions d'importations de céréales et autres produits alimentaires dans la zone avec abaissement ou suppression des taxes à l'importation et ouverture de lignes de crédit à l'importation ; * De procéder à des ouvertures ciblées des stocks publics dans les zones où les prix sont les plus élevés tout en évitant de les épuiser avant la période de soudure ; * De renforcer les actions d'atténuation des crises alimentaires : cash for work, food for work, ventes à prix modérés, aide d'urgence ciblée, etc., dans les zones d'insécurité alimentaire pendant la période de soudure ; * De renforcer les actions de prévention et de prise en charge des enfants de moins de 5 ans et des femmes enceintes et allaitantes malnutries dans les zones à risque ; * D'assurer un approvisionnement adéquat en semences de qualité et en engrais aux producteurs céréaliers de la sous-région ; * De renforcer le crédit agricole notamment dans les grands bassins de production.
Aux systèmes d'alerte précoce nationaux et régionaux
* De faire une mise à jour régulière de l'évolution de la situation alimentaire et nutritionnelle et d'en informer les décideurs ; * De renforcer le suivi des marchés, la concertation avec les décideurs et les commerçants au niveau national et régional.
A la CEDEAO et l'UEMOA
* D'engager des concertations rapides pour la levée des entraves actuelles au commerce régional ; * De veiller au respect de la libre circulation des personnes et des biens dans les espaces communautaires.
Aux partenaires techniques et financiers
* D'appuyer la mise à niveau des stocks de sécurité alimentaire ; * D'accompagner les Etats et les populations dans leurs efforts de lutte contre l'insécurité alimentaire et nutritionnelle.
Source : CILSS/CEDEAO/ONU
4 avr. 2008
L'Afrique piégée par la flambée des prix des aliments - Afrique
Le Monde.fr : L'Afrique piégée par la flambée des prix des aliments - Afrique
LE MONDE 04.04.08 14h15 • Mis à jour le 04.04.08 14h15
La rue africaine ne parle que de cela : les prix des denrées quotidiennes sont devenus fous. En quelques mois, la conjonction des hausses du blé, du riz, de l'huile sur les marchés mondiaux, de médiocres récoltes locales et l'absence de contrôle des prix, a accru les tensions sociales et compromis la stabilité politique.
Spectaculaire dans les villes africaines mais prégnante aussi en Asie, la flambée des prix a confirmé les propos de Jacques Diouf, le directeur général de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) prophétisant, dès octobre 2007, des "émeutes de la faim" alors que le prix moyen d'un repas de base a augmenté de 40 % en une année."Beaucoup de gens ne mangent plus qu'un plat par jour", entend-on à Dakar. "Avec 1 500 francs CFA (2,25 euros) pour nourrir ma famille, je ne sais plus quoi faire", dit une ménagère sur un marché de Bamako, au Mali.
De Douala (Cameroun) à Abidjan (Côte d'Ivoire) et du Caire (Egypte) à Dakar (Sénégal), les manifestations de rues secouent les capitales africaines et contraignent les gouvernants à prendre des mesures pour contrôler les prix.
"Gbagbo, marché est cher", "Gbagbo, on a faim", clamaient lundi 31 mars des femmes d'Abdidjan à l'adresse du président ivoirien. Des affrontements avec la police ont causé la mort d'au moins deux personnes. De fait, le prix du kilogramme de riz est passé de 250 à 650 francs CFA (de 0,22 à 0,97 euro) au cours de l'année ; celui de l'huile a augmenté de plus de 40 %. Le savon, le lait, la viande ont suivi, ce dont ne rendent pas compte les chiffres officiels (8 % d'inflation en 2007 pour l'ensemble du continent noir). "Dans les pays de la zone CFA, la hausse serait encore plus importante si le franc CFA n'était pas accroché à l'euro, une devise forte. Le coût des importations en est diminué d'autant. Les pays dont la monnaie est accrochée au dollar souffrent davantage", assure un économiste de l'Agence française de développement (AFD).
Suppression des droits de douane et baisse de la TVA : le chef de l'Etat ivoirien, comme ses homologues camerounais, sénégalais ou égyptien confrontés eux aussi à la rue, s'est engagé à faire baisser les prix en jouant sur les rares leviers que l'Etat maîtrise encore. La recette n'est pas de celles que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale préconisent car elle pèse sur les finances publiques.
Seule la gravité de la situation a amené les institutions financières à se montrer plus accommodantes vis-à-vis des pays en développement. Le gouvernement égyptien a ajouté une mesure plus radicale : l'interdiction temporaire d'exporter le riz produit localement.
Aucun pays n'est à l'abri de troubles. A Dakar, une manifestation interdite "contre la vie chère" a dérapé dimanche 30 mars, trois mois après l'annonce de mesures pour contenir l'inflation : suppression de taxes sur le riz, création de "magasins témoin" exemplaires par la modération de leurs prix, diminution du traitement des ministres et même du chef de l'Etat. Les mesures n'ont pas produit l'effet escompté. "Les commerçants n'ont pas joué le jeu et l'Etat n'a plus les moyens de contrôler", constate Mamadou Barry, de l'ONG sénégalaise Enda.
Au Maroc, secoué lui aussi par des manifestations "contre la vie chère", des rassemblements sont prévus en avril. La marge de manoeuvre du gouvernement est réduite. Cas rare en Afrique, une "caisse de compensation", prend partiellement en charge, au Maroc, la hausse des produits de première nécessité mais son enveloppe, augmentée dans le budget 2008, sera épuisée cet été.
En Mauritanie où l'autosuffisance alimentaire ne dépasse pas 30 %, la situation est encore plus dramatique. Incapable de financer l'importation de denrées agricoles, le pays va connaître "une crise alimentaire sérieuse en 2008", a prévenu le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies.
Au Burkina Faso, une commission parlementaire "contre la vie chère" a été installée après les manifestations de la mi-mars dans plusieurs villes . Les syndicats appellent à une "grève générale" les 8 et 9 avril pour réclamer des augmentations de salaires, le contrôle des prix et la réduction des taxes sur les carburants.
Conseiller pour l'Afrique au Fonds monétaire international (FMI), Eugène Nyambal estime que la situation est le résultat des politiques prônées par les institutions financières internationales. Depuis des décennies elles ont encouragé les cultures d'exportation comme le coton, au détriment des cultures vivrières qu'il était plus avantageux d'acquérir, à bas prix, sur le marché international. Elles ont aussi poussé au démantèlement des structures de contrôle des prix. "La plupart de ces pays attendent des solutions de la Banque mondiale ou du FMI qui sont eux-mêmes dépassés par les évolutions récentes", ajoute-t-il, insistant sur les conséquences des troubles actuels sur les régimes en place qui n'ont pas développé de politique de soutien à l'agriculture locale. Jeudi soir, à l'occasion de la fête de l'indépendance, le président sénégalais Abdoulaye Wade a ainsi annoncé la relance d'un "programme national d'autosuffisance" agricole.
La Banque mondiale a fait amende honorable dans son dernier rapport annuel et mis l'accent sur la renaissance des cultures vivrières. Il faudra des années pour modifier le modèle de développement.
Philippe Bernard et Jean-Pierre Tuquoi
Article paru dans l'édition du 05.04.08
LE MONDE 04.04.08 14h15 • Mis à jour le 04.04.08 14h15
La rue africaine ne parle que de cela : les prix des denrées quotidiennes sont devenus fous. En quelques mois, la conjonction des hausses du blé, du riz, de l'huile sur les marchés mondiaux, de médiocres récoltes locales et l'absence de contrôle des prix, a accru les tensions sociales et compromis la stabilité politique.
Spectaculaire dans les villes africaines mais prégnante aussi en Asie, la flambée des prix a confirmé les propos de Jacques Diouf, le directeur général de l'Organisation des Nations unies pour l'alimentation et l'agriculture (FAO) prophétisant, dès octobre 2007, des "émeutes de la faim" alors que le prix moyen d'un repas de base a augmenté de 40 % en une année."Beaucoup de gens ne mangent plus qu'un plat par jour", entend-on à Dakar. "Avec 1 500 francs CFA (2,25 euros) pour nourrir ma famille, je ne sais plus quoi faire", dit une ménagère sur un marché de Bamako, au Mali.
De Douala (Cameroun) à Abidjan (Côte d'Ivoire) et du Caire (Egypte) à Dakar (Sénégal), les manifestations de rues secouent les capitales africaines et contraignent les gouvernants à prendre des mesures pour contrôler les prix.
"Gbagbo, marché est cher", "Gbagbo, on a faim", clamaient lundi 31 mars des femmes d'Abdidjan à l'adresse du président ivoirien. Des affrontements avec la police ont causé la mort d'au moins deux personnes. De fait, le prix du kilogramme de riz est passé de 250 à 650 francs CFA (de 0,22 à 0,97 euro) au cours de l'année ; celui de l'huile a augmenté de plus de 40 %. Le savon, le lait, la viande ont suivi, ce dont ne rendent pas compte les chiffres officiels (8 % d'inflation en 2007 pour l'ensemble du continent noir). "Dans les pays de la zone CFA, la hausse serait encore plus importante si le franc CFA n'était pas accroché à l'euro, une devise forte. Le coût des importations en est diminué d'autant. Les pays dont la monnaie est accrochée au dollar souffrent davantage", assure un économiste de l'Agence française de développement (AFD).
Suppression des droits de douane et baisse de la TVA : le chef de l'Etat ivoirien, comme ses homologues camerounais, sénégalais ou égyptien confrontés eux aussi à la rue, s'est engagé à faire baisser les prix en jouant sur les rares leviers que l'Etat maîtrise encore. La recette n'est pas de celles que le Fonds monétaire international (FMI) et la Banque mondiale préconisent car elle pèse sur les finances publiques.
Seule la gravité de la situation a amené les institutions financières à se montrer plus accommodantes vis-à-vis des pays en développement. Le gouvernement égyptien a ajouté une mesure plus radicale : l'interdiction temporaire d'exporter le riz produit localement.
Aucun pays n'est à l'abri de troubles. A Dakar, une manifestation interdite "contre la vie chère" a dérapé dimanche 30 mars, trois mois après l'annonce de mesures pour contenir l'inflation : suppression de taxes sur le riz, création de "magasins témoin" exemplaires par la modération de leurs prix, diminution du traitement des ministres et même du chef de l'Etat. Les mesures n'ont pas produit l'effet escompté. "Les commerçants n'ont pas joué le jeu et l'Etat n'a plus les moyens de contrôler", constate Mamadou Barry, de l'ONG sénégalaise Enda.
Au Maroc, secoué lui aussi par des manifestations "contre la vie chère", des rassemblements sont prévus en avril. La marge de manoeuvre du gouvernement est réduite. Cas rare en Afrique, une "caisse de compensation", prend partiellement en charge, au Maroc, la hausse des produits de première nécessité mais son enveloppe, augmentée dans le budget 2008, sera épuisée cet été.
En Mauritanie où l'autosuffisance alimentaire ne dépasse pas 30 %, la situation est encore plus dramatique. Incapable de financer l'importation de denrées agricoles, le pays va connaître "une crise alimentaire sérieuse en 2008", a prévenu le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies.
Au Burkina Faso, une commission parlementaire "contre la vie chère" a été installée après les manifestations de la mi-mars dans plusieurs villes . Les syndicats appellent à une "grève générale" les 8 et 9 avril pour réclamer des augmentations de salaires, le contrôle des prix et la réduction des taxes sur les carburants.
Conseiller pour l'Afrique au Fonds monétaire international (FMI), Eugène Nyambal estime que la situation est le résultat des politiques prônées par les institutions financières internationales. Depuis des décennies elles ont encouragé les cultures d'exportation comme le coton, au détriment des cultures vivrières qu'il était plus avantageux d'acquérir, à bas prix, sur le marché international. Elles ont aussi poussé au démantèlement des structures de contrôle des prix. "La plupart de ces pays attendent des solutions de la Banque mondiale ou du FMI qui sont eux-mêmes dépassés par les évolutions récentes", ajoute-t-il, insistant sur les conséquences des troubles actuels sur les régimes en place qui n'ont pas développé de politique de soutien à l'agriculture locale. Jeudi soir, à l'occasion de la fête de l'indépendance, le président sénégalais Abdoulaye Wade a ainsi annoncé la relance d'un "programme national d'autosuffisance" agricole.
La Banque mondiale a fait amende honorable dans son dernier rapport annuel et mis l'accent sur la renaissance des cultures vivrières. Il faudra des années pour modifier le modèle de développement.
Philippe Bernard et Jean-Pierre Tuquoi
Article paru dans l'édition du 05.04.08
1 avr. 2008
MISSODROME
Emirats: 10.000 chameaux du Golfe en lice pour un concours de beauté
Plus de 10.000 chameaux des six monarchies pétrolières du Golfe sont en lice cette semaine pour un concours de beauté dans le
désert d'Abou Dhabi, doté de prix d'un montant total de 35 millions de dirhams (9,5 millions de dollars. Le concours, prévu à partir de mercredi dans le cadre d'un festival de 9 jours, marqué aussi par une exposition d'artisanat et des soirées musicales, est destiné à "préserver l'héritage" de la région, a déclaré le chef de la haute commission préparatoire du festival, cheikh Mohammad Ben Beti Al-Hamed. Organisé à Dhafra, dans le désert de l'émirat d'Abou Dhabi, le concours de beauté, supervisé par un jury dont les membres ne seront identifiés qu'à la fin de l'événement, a attiré plusieurs propriétaires et éleveurs de chameaux dans les Emirats arabes unis, en Arabie saoudite, au Qatar ainsi qu'à Bahreïn, à
Oman et au Koweït, a-t-il ajouté. La manifestation, "Mazayin Dhafra Camel Festival 2008", est placée sous le patronage de cheikh Mohammad Ben Zayed Al-Nahyane, prince héritier d'Abou Dhabi, l'un des sept membres de la fédération des Emirats. Les habitants des monarchies du Golfe sont réputés pour leur passion pour l'élevage de chameaux, fidèles aux traditions bédouines de cette région désertique où ce mammifère endurant a été toujours le compagnon de l'homme. Perpétuant ces traditions, des enchères sont organisées dans des pays du Golfe pour la vente de chameaux dressés pour participer à des courses de vitesse.



Lundi 31 mars 2008
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